Ne perdez pas de temps à lire ce texte, connectez-vous vite pour commenter les articles des CDF. Attention à ne pas confondre vos minuscules et vos majuscules.
Vous avez oublié votre mot de passe ?
Inscription
Vous avez oublié votre mot de passe ? Il reste un espoir ! Saisissez votre adresse e-mail ; nous vous enverrons un nouveau mot de passe. Cette procédure est quasiment gratuite : elle ne vous coûtera qu'un clic humiliant.
Nous vous avons envoyé un email sur votre adresse, merci d'y jeter un oeil !

CONDITIONS D'INSCRIPTION :

1. Vous devez nous adresser, via le formulaire ci-dessous, un texte (format .txt inférieur à 100 ko) en rapport avec le football, dont la forme est libre : explication de votre passion, anecdote, aventure, souvenir, essai, commentaire composé, portrait, autobiographie, apologie, réquisitoire, etc. Vous serez ensuite informés de la validation de votre inscription par mail. Les meilleurs textes seront mis en ligne sur le Forum.

2. Nous ne disposons pas d'assez de temps pour justifier les retards d'inscription ou les non-inscriptions, et ne pouvons pas nous engager à suivre une éventuelle correspondance à ce sujet. Merci de votre compréhension.

Nous avons bien reçu votre candidature, on y jette un oeil dès que possible. Merci !

Partager :

Peut-on parler de football sans en regarder ?

Dans beaucoup de domaines, ceux qui s’expriment le plus souvent et le plus fort ne sont pas ceux qui connaissent le mieux leur sujet. Évidemment, notre sport préféré n’échappe pas à la règle.

Auteur : Christophe Kuchly le 7 Nov 2013

 


En démocratie, tout le monde peut donner son avis, et c'est heureux. Que le sujet soit futile, comme peut l’être un match de football, ou bien beaucoup plus sérieux. S’il expose l’émetteur, le discours implique aussi le canal. Ces micros qui se tendent pour donner un écho à des propos pas toujours très pertinents. Et prouvent l’incapacité des personnalités médiatiques, puisque ce sont bien elles qui se retrouveront en position de partager leur sentiment, à se modérer, à avoir l’exigence intellectuelle de se rendre compte qu’elles n’y connaissent pas grand-chose et s’apprêtent à exposer leurs lacunes.
 


Célébrités et inanités

Cette première définition renvoie bien entendu à tous ces moments où l’actualité footballistique sort de son cadre traditionnel et fait l’actualité. Dès qu’il échappe à ce qu’il reste – un jeu – le sport court le risque d’une appropriation par des personnes dont c’est habituellement le dernier des soucis. Hommes politiques, de télévision, philosophes (de télévision pour beaucoup), tous viennent donner leur avis. Qui ne doit pas nécessairement être disqualifié de facto, puisque rien n’empêche une personne extérieure au milieu sportif d’avoir un regard avisé, mais qui se révèle malheureusement souvent vide.
 

Ainsi est le quotidien du football en France depuis la fin du siècle dernier: en dehors des émissions spécialisées, il n’est abordé que sous un prisme totalement déconnecté du jeu. Ce qui ne nécessite donc pas d’en regarder pour en parler. Valeurs morales, réalités économiques, reflet social, tous les thèmes y passent. S’il n’y a pas besoin de connaître le schéma tactique de Valenciennes pour analyser la part des salaires dans le bilan comptable d’un club par exemple, se couper du terrain c’est se couper du sujet dont on parle. Et si la passion est parfois aveuglante, l’indifférence, voire le mépris, le sont tout autant.
 

 



 


Les experts: police footballistique

Le rituel est bien connu: en situation de crise, on fait parler un peu n’importe qui. S’il s’agit d’aspects moraux, chacun appréciera la prise de position selon sa propre vision des choses, s’il s’agit du terrain, le fan bien informé ne tardera pas à démasquer les incompétents. Tout devient plus flou quand il s’agit de sportifs et d’experts autolégitimés. Ces trendsetters de l’avis, qui proposent leur ligne de pensée à grande échelle mais n’ont plus rien à justifier une fois leur position établie, sont forcés de parler de tout et n’importe quoi. Et c’est ce n’importe quoi qui gêne.
 

Citer des noms est inutile. Mais qu’ils soient journalistes de formation ou consultants légitimés par leur passé sportif, tous ces acteurs du milieu footballistico-médiatique s’expriment aussi sur des sujets où ils n’ont aucune compétence. Exemple le plus évident où tout le monde se heurte à ses limites sans oser le reconnaître: l’identité des joueurs sélectionnés en équipe de France. Il est matériellement impossible d’avoir vu suffisamment évoluer tous les élus et recalés de justesse pour avoir un avis complètement pertinent. Morgan Schneiderlin par exemple, présenté comme l’un des meilleurs à son poste en Europe, reste ainsi un mystère pour la plupart de ces commentateurs. Qui se doivent malgré tout de juger la légitimité de la présence d’autres joueurs à sa place sans avoir aucune carte en main, si ce n’est la vue de quelques vidéos, ou la consultation d’articles et de statistiques (au mieux).
 


On ne peut pas tout (sa)voir

Quelle légitimité accorder alors à toutes les analyses qui sont faites en télévision, radio et parfois presse écrite? Chaque journée d’un championnat à vingt clubs représente à elle seule quinze heures de football. Même quand on dédie sa vie à ce sport, c’est beaucoup trop pour tout voir. En considérant arbitrairement la valeur de cinq heures de visionnage de Ligue 1 par semaine, ce qui est déjà beaucoup, il faudrait donc attendre trois journées minimum pour avoir une première vue générale de tous les clubs. Si l’on ajoute les doublons (regarder chaque semaine Paris, Marseille ou Monaco) et d’éventuelles réticentes à se coltiner les équipes moins flamboyantes, le chiffre grimpe encore. Et l'on parle là d’un seul visionnage, le match en question pouvant être exceptionnellement bon ou mauvais de la part d’une équipe et ainsi fausser une perception qui aura pourtant tendance à rester ancrée.
 

Ce calcul, qui a surtout valeur de mise en perspective, permet un constat simple: les avis de X et Y ne sont en fait pas toujours les leurs. Ils sont aussi la reprise de ceux des autres, de l’extrapolation à partir de résumés… jusqu’à de l’invention, de l’improvisation totale qui se basera sur des lieux communs (statistiques, standing du club) ou le sens du vent. Freud aurait pu en faire une blessure narcissique s’il était né plus tard, on ne peut pas se forger soi-même une opinion précise de tous les paramètres d’un championnat national, a fortiori des autres, mais on ne peut pas le dire. D’où la reprise de ces clichés et lieux communs.
 


Place des clichés

Comment expliquer que l’expression "victoire à l’italienne" soit encore utilisée, en dehors de son aspect historique vaguement rétro pas, toujours bienveillant envers ce voisin et rival historique? Que les gardiens anglais soient toujours mentionnés dès qu’il y a une bourde? Que tous les Brésiliens qui font trois dribbles soient qualifiés de pépites ? Et on ne parle pas des Africains et leur physique et autres généralisations qui tendent à associer un qualificatif selon la provenance, sans plus de raisons que cela.
 

Le manque de connaissance du football dans son entièreté, qui peut évidemment se comprendre, n’est pas pondéré par celui d’experts d’un thème précis. Si les commentateurs de Canal+ ou beIN Sport ont généralement leur championnat attitré, ce sont bien les éditorialistes médiatiques qui donnent leur avis à grande échelle dans les talks et influencent les discussions du lendemain à la machine à café. Discussions auxquelles prennent plus souvent part des suiveurs lointains, qui donneraient sans doute leur avis de manière aussi simpliste que les chanteurs ou acteurs si jamais ils accédaient à la célébrité, que des vrais mordus de ballon. Lesquels pourraient passer des heures, en vain, à expliquer que non, les arbitres français ne sont pas les plus nuls, que les clubs qui achètent des talents de dix-sept ans ne sont pas formateurs et que Busquets ne simule pas chaque week-end. Des idées ancrées par la répétition, l’absence d'observation sérieuse ou la puissance de certaines images.
 


Méthode du discours

Le football est de plus en plus diffusé et commenté. On voit ainsi émerger des passionnés, parfois très jeunes, qui accumulent une énorme connaissance du football actuel. Ils ne sont pas une bouée de sauvetage dans un océan de médiocrité, le journalisme écrit anglo-saxon démontrant chaque jour sa richesse, mais les exemples de ce fossé qui se creuse à mesure que les retransmissions se multiplient. Même si on peut désormais tout voir, une bonne partie des convictions du public ne repose sur rien, si ce n’est la confiance accordée aux "experts" supposés savoir mieux qu’eux.
 

Alors, peut-on parler de football sans en regarder? Tout le monde le fait, à différentes échelles. Et puisque cela semble incontournable, sauf à passer quotidiennement quinze heures à regarder un championnat spécifique, on peut toujours avoir quelque méthode. Trouver des sources sûres, si possible locales, pour s’informer sur un club précis et mettre en perspective avec ses propres observations. Mais, et c’est là le plus important, il faut garder la modestie de son avis. Il est utopique d’imaginer les vedettes médiatiques pondérer leurs sentences de "je pense" et de "il semblerait". Mais que cela soit appliqué par les fans lointains, ceux qu’on aime bien jusqu’à ce qu’ils drapent leur méconnaissance d’un manteau de suffisance, serait une belle avancée. Il ne viendrait en effet à personne l’idée de commenter un film à partir des critiques…

 

Réactions

  • Sens de la dérision le 07/11/2013 à 09h10
    Un message qui n'apportera rien mais cet article pose quand même une grande question qu'on pourrait facilement extrapoler : peut-on parler d'une équipe avec aussi peu d'éléments en main en ce qui concerne l'état physique, mental des joueurs de cette équipe ?

  • Zorro et Zlatan fouillent aux fiches le 07/11/2013 à 10h12
    Mais c'est tout l'intérêt du football, non ? D'en parler sans savoir, sans comprendre. Combien de spectateurs sont capables d'appréhender tous les tenants et les aboutissants d'un match, sans parler d'une saison ? Quelle proportion de fans parle de tactique et de formation en saisissant vraiment ce dont ils parlent. Certainement pas moi (mais je remercie les dé-managers d'ouvrir progressivement mes yeux) et je suis content de voir que mon ignorance est partagée le lendemain d'un match à la machine à café.
    - Bidule a dézoné hier
    - Oui quel blaireau
    Mais en vrai qu'est-ce que ça signifie ? Pourquoi, et est-ce que ça a eu une incidence sur la partie ? Et en allant plus loin, est-ce que c'est un plan voulu pour tester un schéma à l'échelle de la saison ou une simple conséquence des absences du jour ? Parfois on s'élève un peu au-dessus de la mêlée pour défendre le "catenaccio-penalty" qui demande une belle solidité défensive quand même. Mais on retombe bien vite au milieu des cris et des huées, pour notre plus grande satisfaction.

    On joue principalement au jeu des combinaisons en équipe de France, tous entraíneurs que nous sommes, mais sur la base de quoi ?

    Attention, nous sommes capables d'apprécier un beau geste et plus encore une belle séquence de jeu, fluide, bien construite, d'avoir un éclair de lucidité en reconnaissant le génie d'un Pirlo (il lève la tête, il l'a vu !) ou la discipline d'un Lahm ; et c'est pour ça que nous regardons match après match en espérant voir notre équipe réaliser la petite particule d'histoire dont on parlera à nos enfants.

    Mais en attendant ces moments d'histoire, il faut bien paler, quitte à parler de rien et on est relativement contents de voir que les soi-disant experts ne valent pas mieux que nous. On se laisse aller à nos bas instincts un peu souvent mais on est aussi contents de se cultiver de temps en temps en somme. Nous sommes des footix, mais des footix un peu éduqués au final.

    (Pardon pour ce hors-sujet massif, et cet usage excessif du "nous" qui inclut ceux qui voudront bien s'y reconnaître)

  • Gabriel Heinze Sergent García Rafa Márquez le 07/11/2013 à 11h09
    Zorro et Zlatan fouillent aux fiches
    aujourd'hui à 10h12

    (...) d'avoir un éclair de lucidité en reconnaissant le génie d'un Pirlo (il lève la tête, il l'a vu !) ou la discipline d'un Lahm ;
    ------

    Tiens, l'auteur l'avait oubliée celle-là. La fameuse discipline allemande, bien posée sur la place des clichés avec les gardiens anglais et les pépites brésiliennes.

  • Zorro et Zlatan fouillent aux fiches le 07/11/2013 à 11h16
    Il fallait bien sûr lire "le génie créatif de tous les Italiens, pas étonnant de la part d'un pays qui nous a apporté la Renaissance, et la discipline de tous les Allemands, grâce à laquelle leurs armées nous ont bien à mal avec leurs canons Krupps".

  • Belmondo Bizarro le 07/11/2013 à 12h03
    L'article est intéressant, mais au fond il tergiverse beaucoup pour n'être au final qu'une énième variation de quelques topos philosophiques: tout le monde peut-il parler de tout, ou comment savoir si l'on connait suffisamment un sujet pour en parler (et dire la vérité dessus, s'entend).

    Bref, c'est un puits sans fond, l'article apporte quelques réponses mais au final j'ai surtout l'impression qu'il dresse le constat amer que non, tout le monde ne peut pas parler de tout et on ne peut pas savoir si on dit la vérité sur le football. D'où la solution d'apporter des formules de langage pour pondérer son propos, qui est toujours mieux que de se taire. Mais que cherche à dire l'auteur à part cela ? Qu'il faut rester humble ? Je ne suis pas sûr de voir vraiment le propos de l'article.

  • Luis Caroll le 07/11/2013 à 12h57
    Ca tient en une phrase : "on est toujours le con de quelqu'un".

  • Radek Bejbl le 07/11/2013 à 13h31
    Gabriel Heinze etc : Le pire c'est que j'ai vraiment hésité à le mettre mais je n'avais pas envie que ça fasse trop liste de courses, surtout que j'ai l'impression que le regard sur l'Allemagne a vraiment changé vu de France.

    Belmondo : Tu le ressens comme ça mais il n'y avait pas spécialement la volonté de faire de la philo de comptoir. Je me pose vraiment la question et je n'ai pas de réponse définitive. J'ai d'un côté la frustration de parler à des gens qui parlent avec certitude sans rien connaître, de l'autre je trouve logique de ne pas être parfait.

    Cet article naît de deux choses : l'aveu d'un consultant célèbre de n'avoir jamais vu jouer Morgan S, de l'autre ma situation actuelle qui me fait regarder 8-10 matches par semaine (pour différentes raisons, inutile de digresser). Et de me demander dans quelle mesure j'ai appris des choses sur telle ou telle équipe en la voyant chaque semaine. Et puis ton constat "tout le monde ne peut pas parler de tout" (mais le fait quand même sur certains sujets) me semble malgré tout intéressant à écrire bien que facile à faire.

    Zorro et Sens : Effectivement, je ne pense pas qu'on puisse mais il ne faut pas se l'interdire complètement je pense. Je m'explique. Quand je me mets dans l'esprit "tactique" et que je regarde surtout les déplacements etc, je peux vite me rendre compte de soucis. Typiquement, c'est Simeone qui fait rentrer trop d'attaquants et casse son équipe en deux. Je n'ai bien évidemment aucune compétence particulière mais je suis obligé de constater que ça ne marche pas, peu importe ce qu'il a voulu faire.

    En revanche, s'il s'agit de juger une prestation individuelle, notamment des dézonages, c'est plus problématique. On peut jeter la pierre à celui qui bouge alors que ce sont les autres, statiques, qui rendent ses mouvements vains. Et reste tout l'aspect physique etc. Bref, comme le répond Zorro, il ne faut pas que ça empêche toute discussion le lendemain. Qu'on se dise "je n'étais pas dans le vestiaire donc je me tais". Parce que le foot, c'est aussi cette convivialité et mauvaise foi qui n'est pas méchante quand on ne se croit pas omniscient. Et si j'évite à titre personnel d'écrire en incluant des aspects de cette sorte, il est évident que j'ai dû le faire et me tromper.

    Luis : Tant qu'on est conscient de l'être, pas de souci. C'est même bien d'être con quand ça met dans une position d'élève avide d'apprentissage.

  • Luis Caroll le 07/11/2013 à 13h52
    Voilà, tant que ça obliger à être humble et peu péremptoire *smiley* *clin d'oeil*.

    Mais dans la mesure où à peu près tous ceux en parlent le font sans savoir grand chose, y a-t-il une véritable hiérarchie dans l'ignorance?

    [Refrain]
    Tout le monde le sait
    Tout le monde
    Tout le monde le fait
    Tout le monde
    Depuis que la terre est ronde
    On a besoin de quelques secondes
    Tout le monde le sait
    Tout le monde
    Tout le monde le fait
    Tout le monde
    Depuis que le monde est monde
    On a les mains vagabondes.

  • Radek Bejbl le 07/11/2013 à 14h06
    Quand je vois certaines productions, notamment une théorisation tactique de l'Athletic de Bilbao de 16 pages qui traîne dans mes favoris, je me dis quand même qu'on peut potentiellement arriver à un grand niveau de connaissance. On est purement dans l'expérience mentale mais j'essaie d'imaginer un mec très calé (un coach par ex mais pas nécessairement) qui regarderait 100% des matches d'une équipe. A terme, je pense qu'il pourrait plus ou moins tout deviner des consignes. Les assistants vidéo des clubs doivent être particulièrement bons pour ça.

    Mais j'ai bien noté ton "à peu près tous", il est évident que la majorité des gens a autre chose à faire. Et puis, dans le fond, ce n'est pas méchant, même s'il y a toujours la frustration quand on entend des bêtises (le "dernier défenseur", quand il vient de gens qui écrivent sur le foot et qui sont tes amis, c'est dur à vivre - c'est pareil quand il s'agit de jeu pur plutôt que des règles).

  • dugamaniac le 07/11/2013 à 14h46
    J'ai honte, il n'y aurait que moi comme gros beauf à avoir eu une réponse spontanée parfaitement misogyne à la question qui sert de titre.

La revue des Cahiers du football