Marche ou Kiev
Malgré les remaniements, les expérimentations et des incertitudes persistantes, Didier Deschamps a probablement une idée assez claire de l'équipe qu'il alignera contre l'Ukraine. Lisons dans son jeu.
En près de dix-huit mois à la tête des Bleus, Didier Deschamps n'a pas semblé acquérir beaucoup de certitudes sur son schéma de jeu préférentiel et sur son équipe type, mais les deux sorties réussies du mois d'octobre ont peut-être suffisamment éclairci le tableau pour deviner quelle formation pourrait être alignée contre l'Ukraine. Les tendances qui se dégagent ne présument pas de choix tactiques spécifiques qui pourraient rebattre les cartes, mais elles désignent de quelle façon le sélectionneur pourrait trancher les principales interrogations sur certains postes-clés. Essayons-nous à l'exercice, en postulant que le 4-2-3-1 a fini par s'imposer dans son esprit, et en commençant par un récapitulatif des équipes proposées depuis août 2012.
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Gardien de but : Lloris dans un fauteuil
Deschamps n'a jamais hésité quant à sa hiérarchie des gardiens, et on ne le voit pas changer son fusil d'épaule pour deux matches couperets. Même Mandanda, l'indiscutable numéro deux, semble accepter son destin avec fatalisme. Face à l'Australie et la Finlande, Lloris a montré que ses boulettes contre la Biélorussie étaient un incident de parcours. Le gardien de Tottenham n'est pas le numéro un mondial à son poste, mais il est le meilleur Français et son vécu des barrages 2009, au cours desquels il avait maintenu à lui seul les Bleus hors de l'eau, plaide pour lui.
Défense centrale : qui avec Koscielny ?
À défaut d'avoir trouvé une charnière, Deschamps a peut-être trouvé un quatuor (Koscielny, Abidal, Varane, Sakho) pour se tirer la bourre. Avec dix titularisations sur les seize rencontres de l'ère Deschamps, Koscielny présente le meilleur équilibre entre niveau technique et expérience, malgré la récurrence de certaines absences en match. Pour lui être associé, on peut imaginer que le sélectionneur privilégiera l'expérience d'Abidal, aligné lors des six derniers matches, mais les difficultés de celui-ci contre la Finlande laissent planer le doute. Varane, véritable solution d'avenir des Bleus à ce poste, qui a connu l'intensité des Clasicos Real-Barça et s'est montré convaincant lors de ses trois sélections. Reste à savoir si le Madrilène sera à 100% physiquement.
Sakho, seul joueur de champ avec Matuidi à avoir connu huit titularisations consécutives avec ce sélectionneur (série commencée d'emblée), fait figure de grand perdant du turnover de la charnière – sauf si l'on rappelle que Yanga-Mbiwa avait été installé à son côté en début de saison dernière. Rami n'a plus joué que les utilités, même s'il a eu les honneurs du Brésil en juin dernier.
Latéraux : Debuchy-Évra, le choix de l'offensive ?
Revenu en forme et en grâce au meilleur moment, Debuchy devrait profiter de ses prestations contre l'Australie et la Finlande pour occuper le flanc droit de la défense. Bien que Deschamps apprécie le profil physique de Sagna, le Gunner n'est pas assez nettement meilleur que le Magpie sur le plan défensif, mais il lui rend quelques points en ce qui concerne l'apport offensif. Or pour le barrage, il faudra marquer...
Alors que ses deux apparitions d'octobre semblaient avoir fait tourner l'alternance avec Clichy à son avantage, Évra a peut-être fragilisé sa position avec son interview à scandale pour Téléfoot. À l'instar de Debuchy, il bénéficie d'un a priori positif quant à son apport en attaque (et son entente avec Ribéry)... mais comme il devra probablement contenir Yarmolenko, un choix plus prudent n'est pas à exclure. D'autant qu'il n'a pas besoin d'être titulaire pour délivrer son discours galvanisateur de la mi-temps.
Milieux défensifs : un trio pour deux places
Les expériences Gonalons, Mavuba, Capoue, Sissoko ou – plus récemment – Guilavogui et Kondogbia – n'étant plus d'actualité, trois noms se détachent pour les postes de milieux défensifs: Matuidi, Pogba et Cabaye. L'entrejeu ne devrait leur offrir que deux places, le 4-3-3 semblant abandonné depuis Brésil-France. Le Parisien semble incontournable en raison de son volume de jeu et de son statut de pilier des Bleus (dix titularisations), même s'il a été en dessous contre la Finlande.
A ses côtés, Pogba et Cabaye sont en balance dans un registre plus "relayeur". Si le talent du Juventino apparaît intrinsèquement supérieur, sa jeunesse pourrait pousser Deschamps à s'appuyer sur l'ancien Lillois, très bon contre l'Australie.
Milieux offensifs : une place à droite
Côté gauche, le débat est clos pour un bon moment : Ribéry se rapproche de son niveau munichois et s'affirme comme le joueur le plus décisif des Bleus depuis la Biélorussie. Pour les deux autres postes, Valbuena et Nasri semblent avoir un coup d'avance, reste à savoir qui jouera derrière l'attaquant – la préférence des deux joueurs – et qui prendra le couloir droit. Car de ce côté du terrain, aucun joueur n'a réussi à s'imposer, malgré les essais de Ménez, Sissoko, Payet, Rémy et même Benzema dans les différents schémas tactiques proposés.
Avant-centre : Giroud, un temps d'avance
Benzema a beau avoir marqué contre l'Australie et la Finlande, Giroud a probablement conforté sa place de numéro un lors des deux matches d'octobre. Plus disponible, meilleur de la tête, moins enclin à décrocher, le Gunner offre un point d'appui dont les Bleus ont besoin pour trouver leur équilibre et un meilleur rendement. Il est dans une dynamique qui contraste tellement avec celle de Benzema que l'on voit mal cette hiérarchie apparente s'inverser d'ici au 15 novembre.