Autriche : le pied dans la porte de l'Europe
En France, la Coupe d'Europe fait râler. En Autriche, on est plutôt content de la jouer… quand on peut la jouer.
L’Autriche a été vernie cet été: sa Bundesliga étant au quatorzième rang européen, elle a pu aligner cinq clubs sur la scène européenne… en tours préliminaires. Hélas, tout le monde n’a pas réussi à parvenir à la phase de poules. Le point sur les fortunes diverses des représentants rot-weiss-rot.
Les recalés
SK Puntigamer Sturm Graz (C3)
Le problème des tours préliminaires, c’est qu’ils font reprendre très tôt. Trop tôt. Qualifié in extremis pour l’Europa League grâce à sa quatrième place obtenue sur un rythme de relégable, le club styrien avait fini la saison 2012/13 sur les rotules. Entre l’arrivée d’un nouvel entraîneur (Milanic, ex-joueur du club), et le renouvellement pour moitié du onze titulaire, les Blackies n’ont pas eu le temps de bien se roder. Faute de buts, Graz a été piteusement éliminé par le Breiðablik Kópavogur (0-0, 0-1) après la mi-juillet, alors que le championnat reprenait. Le raté islandais a été le premier d’une série: les Styriens ont dû patienter sept journées pour enfin gagner en Bundesliga.
FC Pasching (C3)
Engagée dans le dernier tour préliminaire de l’Europa League grâce à son inattendue victoire en Coupe, l’équipe de Haute-Autriche sponsorisée par Red Bull pouvait s’appuyer sur un effectif peu remanié à l’été pour affronter Estoril. Mais le niveau et le réalisme portugais ont été meilleurs que ceux de cette équipe de Regionalliga (D3) autrichienne (0-2, 1-2). La délocalisation du match à Linz, où à peine 1.300 fans s’étaient déplacés, a pu expliquer le faible soutien à un club qui aura réussi à sauver l’honneur par Sobkova – le même joueur qui, en marquant en finale de Coupe, avait offert le ticket européen à son équipe (lire "La deuxième vie de Pasching").
Ce terrifiant duel capillaire tournera à l'avantage de Fenerbahce.
FC Red Bull Salzbourg (C1)
Sixième échec en six tentatives en préliminaires de C1 pour Salzbourg. Après Valence, Donetsk, Haifa, Tel-Aviv et Dudelange, c'est Fenerbahçe qui a maté les Taureaux de Salzbourg (1-1, 1-3). Les Autrichiens ont été malheureux, avec une égalisation sur penalty concédée à la 95e minute à l'aller, et une forte domination (25 tirs à 6) non traduite au score au retour en Turquie. Regrets et déception étaient grands, comme d’habitude hélas pour le club taurin qui stagne désespérément sur la scène continentale.
Une équipe pas prête, une autre pas au niveau et une troisième qui fait un blocage psychologique: même avec leurs onze titulaires respectifs, ils ont bien voulu, mais n’ont pas pu… Sans trop de surprise, finalement.
Les admis
FC Red Bull Salzbourg (C3)
Recalés en C1, les Taureaux sont à leur place en C3. L’accès à la phase de groupes a été une formalité, avec un large succès sur le club lituanien du Zalgiris Vilnius (5-0, 2-0). Dans son groupe C, Salzbourg est comme qualifié, avec trois succès en trois matches face à Esbjerg, Liège et Borås. Normal, c’est la phase d’élimination directe qui pose problème, d’habitude. Mateschitz attend toujours de voir Red Bull au sommet de l’Europe du foot (lire aussi "Salzbourg, encore...").
SK Rapid Wien (C3)
Malgré ses soucis (fans turbulents, stade vétuste, meneur de jeu vieillissant), l'historique club vert et blanc de la capitale s'est qualifié en sortant les Grecs de l'Asteras Tripolis (1-1, 3-1) puis les Géorgiens du Dila Gori (1-0, 3-0). Économe au mercato faute d’argent, le club de l’ex-Parisien Boskovic a aligné – avec succès – les jeunes de son effectif (Dibon et Petsos 22 ans, Behrendt et Grozurek 21, Sabitzer 19, et la révélation Schaub 18). Un motif d’espoir à moyen terme? Pour le moment, le Rapid est dernier du groupe G; mais même battu à Thoune (0-1), il peut encore se qualifier grâce à ses égalisations contre Kiev (2-2) et Genk (1-1), le deuxième, Kiev, n’ayant que quatre points.
FK Austria Wien (C1)
Devant passer comme Salzbourg par deux tours préliminaires, l’Austria a souffert: le champion d’Autriche 2013 a éliminé difficilement le FH Hafnarfjördur (1-0, 0-0) – ce qui lui a permis de se relancer en championnat – puis le Dinamo Zagreb (2-0, 2-3), avec le but du 2-3 du joker Kienast qui vaut cher: une qualification autrichienne en phase de poules, plus vue depuis 2005, l’argent qui va avec, et même les louanges du Rapid! Pour les huitièmes, il faudra par contre attendre: à mi-parcours en poule G, l’Austria ne compte qu’un point… et aucun but marqué.
France et Autriche, même combat ?
Logiquement, la France fait en C1 mieux que l’Autriche, avec deux qualifiés à un. Si l’OM ne fait pas mieux que l’Austria, le PSG est sans équivalent autrichien. En C3 par contre, les deux pays font jeu égal: deux éliminés (ASSE et OGCN vs. Graz et Pasching), un reversé de C1 (OL vs. Salzbourg), et un qualifié (Bordeaux vs. Rapid). Et les quatre clubs engagés sont encore en course pour un ticket en seizièmes.
La différence? En Autriche, on n’entend pas de critiques des clubs ou de leurs représentants sur leurs participations aux compétitions européennes. Pourtant, il y aurait de quoi dire, surtout chez les Viennois. Tôt sortis sans gloire en Coupe d’Autriche, Rapid et Austria comptent déjà au tiers du championnat une douzaine de points de retard sur Salzbourg (soit un point de retard par journée). Pire, ils sont au-delà du podium qualifiant pour l’Europe, stagnant derrière Ried – l’Auxerre local – et le promu Grödig. Avec un Rapid rajeuni et une Austria cumulant les pépins physiques, Salzbourg a la voie dégagée pour un nouveau sacre.
Mais ces parcours européens profitent aux joueurs, particulièrement aux jeunes qui acquièrent une expérience sans égale en local et précieuse pour une visibilité accrue pour une sélection… ou un transfert à l’étranger. Ils auraient tort de ne pas se donner à fond, car à part à Salzbourg, les tickets (pour les tours préliminaires) européens ne sont pas garantis d'une saison à l'autre. Pas question pour joueurs et entraîneurs de snober l’Europe: carpe diem même si la victoire n’est pas au rendez-vous et que la fatigue est là en championnat. Une leçon à suivre pour certains clubs français?