Le jeu à la Troyenne
On peut jouer sa tête en L2 et développer quand même un projet sportif audacieux. Voire aventureux, afin que l'Estac rivalise avec Nantes, Strasbourg ou Metz.
Auteur : MAX
le 27 Mai 2011
Le président Daniel Masoni en rêvait, et il a trouvé dans son entraîneur l’homme orchestre providentiel pour enfin réaliser son rêve: créer une marque à jouer troyenne (l’équivalent du point Jacquard version footballistique) qui serait reconnue dans tout l’Hexagone et même au-delà. Après un minutieux décryptage de cette première saison du nouveau tandem fort, voici, en exclusivité, les sept préceptes fondateurs qui ont guidé l’équipe tout au long de l’exercice 2010-2011 avec le résultat que l’on sait.
1. Se dégager au plus tôt des coupes pour se consacrer au maintien
Sans remonter à plusieurs générations, la tradition est désormais bien ancrée (depuis quelques années) dans les habitudes troyennes. Malgré le risque exorbitant pris cette année – Jean-Marc Furlan avait connu la gloire dans un passé lointain grâce à ses exploits en Coupe de France – elle a été une nouvelle fois respectée à la lettre avec des éliminations précoces en Coupe de la Ligue (au premier tour) et en Coupe de France (en 32e de finale).
2. Démarrer en douceur et terminer décontracté
Avec comme contrepartie à cette tactique visant à ménager les joueurs : le risque de prendre des buts. C’est un peu ce qui est arrivé dès la toute première journée: but encaissé à Vannes dès la 4e minute. On ne compte plus les exemples par la suite: but de Guié Guié pour Tours à la 8e mn (6e journée) ou ceux de Thil à Troyes dès la 3e mn et au retour à Boulogne dès la 6e mn ou encore celui de Rivière à Ajaccio lors de la 22e journée dès la 2e mn (c’est le record)… On ne citera pas tous les exemples.
L’inverse vaut également à partir de la 12e journée où L’ESTAC s’est mis à prendre des buts, plus ou moins préjudiciables, en fin de partie: ça commence avec le but de Savadet à la 88e mn pour Clermont (12e journée) et ça se poursuivait encore vendredi soir (37e journée) avec le but de Nabab pour Laval à la 92e mn.
3. Développer un jeu de passes latéral sans dépasser le milieu de terrain
C’est là où ils sont véritablement les meilleurs et où ils font preuve d’un art du jeu et d’une maîtrise technique remarquables admirés par leurs adversaires (qui ne risquent pas grand-chose à les regarder jouer dans cette partie du terrain). Cette pratique a aussi le mérite d’offrir la meilleure visibilité pour l’ensemble des spectateurs puisque se situant au centre du terrain et non près des buts.
Cette stratégie a l’inconvénient de nuire un peu à l’efficacité offensive, si bien que l’attaque a du mal à fonctionner. Classée au 17e rang de Ligue 2, elle ne peut que progresser au cours des prochaines saisons.
4. Utiliser l’irrégularité dans les performances pour dérouter l’adversaire
C’est tout autant remarquable. D’abord, on gagne davantage à l’extérieur en limitant les victoires à domicile. Puis après avoir laissé passer une longue période de disette, on inverse tout en début d’année pour surprendre l’adversaire en gagnant à domicile et en prenant soin de perdre systématiquement en dehors de chez soi.
5. Procéder par cycles en insistant sur les cycles longs négatifs
Le président l’a bien résumé en disant que sa formation était capable du pire (deux longs cycles négatifs) comme du meilleur (comme en début de Championnat où elle s’est retrouvée à la toute première place après neuf journées)! Heureusement par la suite l’équipe s’est bien rattrapée en réalisant deux longues périodes vides. Les Troyens ont été, depuis, copiés par les Tourangeaux et les Havrais, signe que le jeu à la Troyenne commence à faire des émules.
6. Marteler le manque d’expérience de l’équipe et décrocher le maintien grâce aux jeunes
Rien ne vaut les déclarations mêmes de Jean-Marc Furlan (non sorties de leur contexte) comme à l’issue du match contre Angers (31e journée): "C’est la frustration de cette saison parce qu’on se rend compte que l’équipe manque de matches de Ligue 2, d’expérience et de suffisamment de maturité pour se dire que, finalement, le match nul est un bon résultat, face à une équipe qui, elle, possède une grande maturité et une grande expérience".
C’est finalement une équipe beaucoup plus jeune que d’habitude avec Saunier (21 ans) Sibide (18 ans) Sissoko (21 ans) Nsakala (20 ans) Baretto (20 ans) Camara (20 ans) qui a décroché le maintien vendredi soir 20 mai, face à tous les éléments contraires (des défaites à domicile en série, un but de retard au tableau d’affichage et l’angoisse de tout perdre).
7. Prôner la descente en puissance
Depuis la 10e journée, L’ESTAC, en application de cette recommandation, a dégringolé avec méthode dans les profondeurs du classement (de la 1ère place au soir de la 9e journée jusqu’à la 16e à l’issue de la 37e journée) jusqu’à se faire peur, voire faire très peur à son président car il savait que le Club ne survivrait pas financièrement à une nouvelle relégation en National (se référer à notre article prémonitoire du 2 mai et à l’aveu du président quelques jours après le 18 mai, dans L’Est Eclair). Le suspense est garanti en fin de saison grâce à cette stratégie.
Il est prématuré, après une seule saison, d’en tirer les codes définitifs. Ils vont s’affiner (tout au moins on l’espère) au cours des prochaines années ; ce qu’on ne manquera pas de suivre avec un intérêt décuplé. Le club a quand même sauvé le vital cette saison et on espère une dernière exhibition, vendredi prochain au Stade de l’Aube, à la fois insouciante et décoincée.
Article initialement paru sur Auboisement correct.
Images estac.fr