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Remontées en blog

Invité : When Saturday Comes. Les sites indépendants et de qualité sur le football ont-il un avenir économique, et quelle sera leur relation avec les grands médias? L'exemple anglais n'est pas sans résonance ici...

Auteur : Ian Plenderleith (trad. Thomas Bayer et Jérôme Latta) le 18 Mars 2011

 

Après "L'éthique de la victoire", deuxième livraison de notre partenariat avec le magazine britannique When Saturday Comes.

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Pourquoi quelqu'un travaillerait-il gratuitement? Un des principaux phénomènes de l'histoire agitée du Net a été le renouveau des médias amateurs et de leur désir d'être pris au sérieux. Pour le journalisme de football, cela a consisté en l'émergence d'une immense agora ouverte à une foule bruyante: les fans. Après avoir résisté à ce mouvement résultant d'un mélange détonant de frustration et de mécontentement, les journaux grand public ont fini par embrasser le mouvement, non sans réticence.

Les blogs et les fils Twitter des fans atteignent désormais des audiences larges, grâce notamment à des projets comme le Fan Network du journal The Guardian durant la dernière Coupe du monde, ou son Football League Blog (même s’il semble que son concurrent, le Telegraph, ait abandonné une démarche analogue). Dans les conditions économiques actuelles, on peut être sûr qu'ils vont générer des revenus allant de nuls à minimaux, mais tout le monde y gagne. Le journal récupère du contenu gratuit, et les auteurs touchent un public plus large, en espérant peut-être de meilleures offres à terme. Selon un point de vue opposé, on peut aussi considérer qu'un journal de gauche exploite ainsi des auteurs en ignorant sans vergogne le règlement du Syndicat national des journalistes sur les salaires minimaux, et que ces rédacteurs indépendants et gratuits fournissent un travail de qualité médiocre, privant d’un salaire convenable des travailleurs légitimes.


Le dilemme de l'indépendance

Chemin faisant, la tendance du blogging a précipité la disparition des milliers de sites qui tâchaient de se faire une place au soleil il y a encore cinq ans – certains existent toujours, mais ils n'intéressent plus que quelques lecteurs. Dans le même temps, la focalisation sur les quelques blogs réellement indépendants et dignes d’intérêt a fait office de filtre qualitatif. Aujourd'hui, l'idée que toute prose un tant soit peu décente a disparu au profit d'une génération de cyber-crétins biberonnés à Twitter procède d'une terrible exagération. La question qui se pose désormais aux survivants est la suivante: maintenant que ma réputation est établie, cela vaut-il le coup de passer autant de temps à produire des articles originaux et pertinents pour aussi peu d’argent?

WSC_blogs.jpgJason Davis, de Match Fit USA, a souligné le dilemme des blogs. Suffisamment réaliste pour se rendre compte qu’il n’y avait aucune opportunité lucrative dans le journalisme footballistique américain, il lui est resté peu d'options. Il a rejeté l’idée de délayer la qualité de son site avec des titres sensationnalistes pour générer plus de visites, et constaté que la publicité au clic n'est rentable que pour les sites à très fort trafic. Il aurait pu créer une section payante, mais le risque est très élevé si l’on ne dispose pas un lectorat conséquent et loyal, ayant les moyens et l'envie de payer pour continuer à vous lire.
Finalement, à l’instar des bloggers du Guardian, il aurait pu signer avec un collectif, comme le réseau américain de blogs SB Nation, qui est "une bonne option pour certains puisqu’il garantit une notoriété au travers de la puissance de sa marque ; malheureusement, il signifie aussi une perte de la véritable indépendance". SB Nation couvre tous les sports avec une devise peu convaincante: "Une qualité professionnelle, un point de vue de fan". Un examen sommaire de ses articles sur le football révèle une vérité prévisible: une qualité pauvre, des points de vue plats.


La confiance des lecteurs

Richard Whittall a analysé la situation sur son blog Pitch Invasion au travers d’un article en six parties, intitulé "Football, Blogs and Newspapers" (article qui mérite d’être lu dans son intégralité) en imaginant un futur dans lequel les principaux médias collaboreraient avec les sites indépendants spécialisés, lesquels pourraient offrir des articles allant au-delà du contenu habituel de ces journaux. Cette évolution serait favorisée par l’intérêt "dévorant", de la part d’audiences globalisées, pour un "vaste domaine d’information" (en l'occurrence le football mondial) qui ne pourrait être couvert par un seul media, faute de moyens et de temps. "Les bons blogs indépendants ont la faculté d'attirer en nombre des catégories particulières de lecteurs", explique Whittall, "et si ces blogs sont rattachés à un grand magazine, ils bénéficient de la puissance de son enseigne. Cela permet d'augmenter la confiance des lecteurs, de renforcer les ‘liens faibles’ inhérents au Web et de présenter une information footballistique bien identifiée – ce qui est déjà l'objectif des journaux en ligne".

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Whittall s’est entretenu avec Michael Cox, créateur de l’excellent Zonal Marking, dont la qualité des analyses tactiques lui a permis d'obtenir une chronique hebdomadaire dans le Guardian. Cox se montre enthousiaste à propos de cette affiliation, tout en précisant que Zonal Marking reste "sa tâche principale". Il conçoit bien que l’avenir de son site dépendra, à terme, de sa capacité à être financièrement indépendant, mais considère pour le moment ZM comme une fin en soi. Vous vous souvenez du principe fondateur d’Internet: un contenu gratuit né de l’amour et de la passion?


Atteindre la viabilité financière avant la mort par épuisement

L’amour, cependant, est soumis à rude épreuve dans les périodes difficiles, et la passion peut s’éroder sous le poids de la routine et de la pressante nécessité de payer le loyer. Zonal Marking a indiqué que "le profit n’était pas du tout l’objectif principal au lancement du site, mais que plus il sera rentable, plus son contenu sera riche". Et si Billy Fan ne met que vingt minutes à pondre un article pour son blog ou son webzine sur les déficiences de l’entraîneur, du conseil d’administration, des défenseurs ou du jardinier, il faut beaucoup plus de temps pour regarder les matches avec attention, les décortiquer tactiquement et écrire plusieurs articles par semaine à leur sujet. Cox aussi a besoin de vêtements, de nourriture, d’un toit et d’un ordinateur portable.

Même Pitch Invasion, qui a pourtant gagné, entre autres, un WSC Gold Award l’an dernier, a subi un ralentissement de ses mises à jour depuis la Coupe du monde, son fondateur Tom Dunmore se consacrant parallèlement à l’écriture d’un livre, à la présidence de la Chicago Fire Independant Supporters’ Association et à ses contributions à l’affreux site américain Big Soccer (pour l’argent). Dunmore a déclaré que Pitch Invasion n’était "pas un business rentable, et qu'il n'avait jamais été conçu dans le but d'assurer un revenu à temps plein pour qui que ce soit", ajoutant: "Au final, je préfère ne rien publier plutôt que de publier des conneries".

En d’autres termes, la clé pour les meilleurs sites indépendants est de rester fidèles à leurs ambitions éditoriales et d’atteindre la viabilité financière avant l’inévitable mort par épuisement. Si le modèle de Whittall est plausible, il requiert toutefois un changement d’attitude de la part des grands journaux britanniques, afin qu'ils considèrent ces partenariats comme une collaboration et non comme un réservoir de main-d’œuvre gratuite.


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Lancé en 1986, When Saturday Comes est le meilleur magazine de football du monde (hors période 2003-2009). WSC cherche à offrir une vue à la fois sérieuse et humoristique du football, avec une intelligence jamais démentie. Pour un rapide historique du magazine, c'est ici et pour s'abonner, c'est par là.

Réactions

  • Sue Oddo le 18/03/2011 à 04h36
    Je m'etais dit peu convaincu au sortir du vol 1, ce second papier est beaucoup plus convainquant. Aussi bien sur le sujet (Tres interessant et particulierement pertinent pour les CDF) que sur la fluidite du texte. Clap clap clap.

    "En a marre de s'abonner a des journaux anglais"

  • Tarama Vahirua le 18/03/2011 à 09h32
    C'est très intéressant et bien écrit. On pourrait croire que ça a été écrire pour et par les CDF...

  • Pan Bagnat le 18/03/2011 à 14h27
    En même temps, les tournures de phrase made in Jérôme Latta arrangent grandement ma traduction dont j'étais peu fier. Chapeau.

  • Raspou le 18/03/2011 à 15h54
    Excellent article.

    La question n'étant pas tant "quand les bons bloggeurs vont-ils percevoir une rémunération pour leurs analyses?" que "quand va-t-on cesser de payer de soit-disant journalistes et consultants professionnels pour écrire ou pérorer sur le foot?".

    Une profession où il apparaît rapidement que de nombreux amateurs bénévoles font nettement mieux que des professionnels rémunérés, ça porte un nom: du charlatanisme.

  • Raspou le 18/03/2011 à 15h58
    D'ailleurs, si vous me permettez de m'auto-citer, c'est déjà ce que j'expliquais ici:
    lien

  • Pan Bagnat le 18/03/2011 à 16h55
    C'est la même idée globale, même si l'article de WSC se concentre plus, d'une part, sur le media web, et d'autre part justement sur ces bloggeurs anonymes, et les moyens qui sont mis ou pourraient être mis à leur disposition pour transformer leurs analyses pertinentes en analyses pertinente et rentables, et non sur les "journalistes sportifs" qui polluent nos écrans, nos postes de radio et nos journaux.

  • Tricky le 19/03/2011 à 11h52
    ' Selon un point de vue opposé, on peut aussi considérer qu'un journal de gauche exploite ainsi des auteurs en ignorant sans vergogne le règlement du Syndicat national des journalistes sur les salaires minimaux, et que ces rédacteurs indépendants et gratuits fournissent un travail de qualité médiocre, privant d’un salaire convenable des travailleurs légitimes.'

    Deux problèmes différents, à moins de considérer que la rémunération génère automatiquement la qualité. De fait, le type de Zonal Marking ou Mangeur Vasqué et le stagiaire de Pierre Menes, pas tout à fait la meme chose (et pourtant le dernier est le mieux 'salarié).

    En revanche, la première partie de l'assertion est effectivement le cœur du problème. Dans un tout autre domaine, exactement ce qui est en train d'arriver à Arianna Huffington, éditrice d'un blog fabuleux avec des auteurs non payes (sinon par l'accroissement de leur e-réputation), rachetée par AOL, et avec une grève sur les bras puisque voulant continuer sur le meme modèle.

  • dugamaniac le 19/03/2011 à 14h16
    Si un simple bloggeur sans bouger ses fesses de devant sa télé et ses journaux arrive à avoir une analyse aussi intéressante qu'un journaliste qui a l'occasion d'être en contact direct avec les protagonistes d'un match ou d'un évènement quelconque, c'est tout simplement que le journaliste payé n'est pas assez compétent pour apporter une valeur ajoutée qui mérite rémunération.

    Ce qui est largement répandu, mais en gros je ne partage pas la thèse de cette article.
    Une vraie compétence sera forcément rémunérée si elle est capable d'apporter quelque chose d'unique.


  • la rédaction le 19/03/2011 à 22h10
    LOL

  • Joachim du Maurice-Bellay le 20/03/2011 à 18h20
    Il y a, j'ai bien l'impression, des motivations personnelles, du destin parallèle, dans la présence de cet article ici. Les gars des Cahiers font un bon, très bon boulot bon depuis longtemps, ont réfléchi et n'arrêtent pas de réfléchir à comment changer leurs beaux articles, points de vue, en €, un minimum d'€. La reconnaissance, c'est bien mais ça ne nourrit pas son fan. D'où peut-être (?) la délocalisation du côté du "Monde" (pas toujours très réussie d'ailleurs, Jérôme Latta y est sérieux à l'extrême et manque du swing qu'on peut lui connaître par ailleurs).
    Et, contrairement à ce que dit Dugamaniac, la qualité n'est pas forcément toujours reconnue et rémunérée. On rémunère même plus volontiers la grosse daube, écrite comme telle et voulue telle, etc. (j'en sais qq chose je suis journaliste et accessoirement producteur de daube).
    Bon, comme dirait l'autre, c'est vraiment très intéressant quand on est du métier.

La revue des Cahiers du football