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Le Cid et le Zid

Pourquoi Brandao va signer au Real – Fantaisie en un acte.
Auteur : le petit prince le 14 Jan 2011

 

Un seul acte peut-être, et même une seule scène, mais tout de même bien remplie : on y apprend pourquoi Brandao va signer au Real, mais aussi comment le Real prépare son huitième contre Lyon, où en est Benzema, qui est vraiment Zinédine Zidane, comment Arsène Wenger est devenu muet et comment il fait venir tant de jeunes à Arsenal, et ce que deviennent Jolly Jumper, Bernardo et Christophe Dugarry.

* * *

theatre_football.jpg


Derrière le rideau, transparent, une table et des chaises, mobilier luxueux. Au moins six personnages autour de la table. Les acteurs, couverts de poussière, sont déjà en place, immobiles.
Suivant le nombre d'acteurs disponibles, on peut en remplacer par des pantins. On entend des ronflements.
Quand à peu près tout le public est installé, un personnage entre sur scène derrière le rideau avec un plumeau, et fait le tour de la table pour épousseter les meubles et les acteurs, replacer un objet, allumer une lampe.
Au bout d'un moment, il disparaît puis reparaît, devant le rideau, et s'adresse au public.


L'employé - Je suis l'employé. Je remets un peu d'ordre, parce que ça va bientôt commencer. Je le sais parce que vous êtes là. Derrière ce rideau, il y a un bureau très chic, à Madrid. On a mis ce qu'on avait de plus chic et tous les acteurs qu'on avait. Enfin, tous ceux pour qui on avait un costume et des belles chaussures. Regardez sous la table ; c'est là que tout se joue dans le football moderne. Vous voyez, sous la table, toutes ces grosses pointures au vernis noir ? Et sur la table, regardez toutes ces mains, avec leurs six gros doigts bronzés porteurs de bagues ; six doigts ! Un-dos-tres, quatro, cinco, seis... celui qui n'a pas de bague, c'est le pouce, et celui avec le bout qui fume, c'est le cigare.
Le plus gros cigare, au milieu, c'est celui de Florentino Perez, le président du Real Madrid. Il est toujours bien coiffé, avec de la gomina de 1954. Un jour ils ont fait un concours dans une soufflerie entre Florentino Perez le gominé, Cristiano Ronaldo le gélifié et Zidane le chauve : c'était à celui qui aurait la coiffure la plus résistante, le premier cheveu qui bouge a perdu... le perdant devait faire une pub pour Danone. Florentino a tout de suite perdu à cause des poils dans ses oreilles, mais il a dit que ça ne comptait pas et ils ont recommencé. Bref, c'est quelqu'un de très sérieux.
À sa droite, c'est Jorge Valdano, un conseiller, et à sa gauche, le chauve qui n'a pas de cigare, on en parlait à l'instant, c'est Zinédine Zidane, un conseiller spécial, je vous expliquerai tout à l'heure pourquoi "spécial", parce que là ça va commencer.

Le rideau commence à se lever

L'employé - Ah, juste une dernière chose : ce que vous entendez, ce sont les ronflements de Benzema. Il est couché derrière la table, on ne le voit pas mais c'est à cause de lui, depuis qu'il dort tout le temps, qu'ils sont là et qu'ils sont aussi sérieux...

Il sort. Pendant son monologue, les acteurs se sont peu à peu légèrement animés: pages de journal (Marca, As, les Cahiers du foot) qui se tournent, cigare porté aux lèvres, etc. Tandis que le rideau se lève on perçoit quelques bribes de conversation, par exemple ce qui suit:

Conseiller 1 - ¿Que hacemos con los Diarras? ¿venderles?
Conseiller 2 - "DiarrassS", no se dice.
Conseiller 1 - ¿Cómo se hace el plural de las palabras en "-a", en latín?
Conseiller 3 - "-ae" al final, pero se pronuncia "é".
Conseiller 1 - ¡Tenemos Diarræ!
Conseiller 2 - À propos, Kaká revient en forme...

Au moment où le rideau est complètement levé, un ronflement de Benzema beaucoup plus sonore interrompt la conversation.

Benzema - RRR ZZZ.
Florentino - Ce n'est pas à ça que je pensais quand je demandais un nom ronflant...
Conseiller 1 - On s'est fait avoir, tout ce qui brille n'est pas d'or.
Conseiller 2 - Et tout ce qui dort n'est pas brillant.
Zinédine - Pas brillang.
Tous - ¿¿¿¿????
Benzema - rrr zzz ???
Zinédine - Pardong : pas bieng.
Conseiller 1 - Ah.
Conseiller 2 - Le Barça a eu un Ballon d'or ; nous on a un melon qui dort.
Conseiller 1 - Et le pire, c'est qu'il parle en dormant. C'est comme ça qu'ils ont eu ses aveux pour Zahia, il s'est endormi pendant l'interrogatoire et il a tout raconté.
Benzema - rrr zzznhiaa
Conseiller 3 - Señores, en lisant Corneille, il m'est venu une idée.
Conseiller 1 - Je ne vois pas l... IL A BOUGÉ !

Tout le monde s'interrompt. Benzema vient de bouger : il s'étire dans son sommeil, baille et se rendort, fausse alerte.

Conseiller 2 - Il baille au Corneille. Racine avait raison.
Conseiller 3 - Vous, au Real, vous êtes comme un gardien anglais, vous avez les habits et-les-gants, mais vous ne saisissez pas toujours tout. Vous connaissez le Cid ?
Conseiller 1 - Gerald Cid, qu'est-ce qu'il fout là, Gerald Cid, le mec de...
Conseiller 2 - Bordeaux ?
Zinédine - C'est bieng.
Benzema - rrr zzz
Conseiller 3 - Incultes ! Le Cid, Chimène...
Florentino - "Nous partîmes avec 500 millions..."
Conseiller 3 - Voilà, le Cid Campeador...
Conseiller 1 - ¿Campeador? Alors il campait aussi dans la surface, le Cid ? Comme Karim ?
Benzema - grrr zzz
Conseiller 2 - Le Cid ! "La valeur n'attend pas le nombre des années"...
Florentino - 40 millions à 21 ans, je ne te le fais pas dire. Le Karim ne paie pas, peut-être, mais il se paie. On a ici son épée, au Cid, là, sur le mur, la deuxième. Bon, et alors, le Cid ?
Conseiller 3 - Et alors, lorsque le Cid fut tué, car Corneille ne le raconte pas, à cause de la règle des trois unités, sans compter la bienséance, mais dans la légende il fut bel et bien tué, et, c'est là ce qui nous intéresse, on cacha sa mort, et on l'attacha sur son cheval comme s'il était vivant, pour remotiver ses troupes et démoraliser l'ennemi !
Conseiller 1 - On va faire pareil avec Karim ?
Conseiller 2 - Mmmh. Et comment il tiendra sans armure ?
Conseiller 3 - Un maillot bien amidonné. On prendra le gel de Cristiano.
Conseiller 1 - Ou alors on prend un peu de muscles bien tendus dans son gros cou !
Conseiller 2 - Benzema n'a pas un gros cou, à la limite un gros c...
Benzema - grrr zzz
Conseiller 3 - Le cou de Cristiano, ¡cabron!
Florentino - En tout cas ils ont tous les deux un gros coût, avec accent circonflexe et mucho pepetes.
Conseiller 1 - Ah dans son cou ! ¡Si! Et dans ses abdos ! Il en a 3000, je l'ai lu là-dedans.
Conseiller 3 - On va ressusciter Karim...
Conseiller 2 - Les Lyonnais vont être terrorisés de le voir vivant !
Florentino - Muy bien... ¡La decima ya esta mia!
Conseiller 1 - ¡Genial!
Benzema - rrr zzz !
Zinédine - C'est bieng !
Conseiller 2 - Et le cheval ? Sans cheval, il ne bougera pas ! ¿Donde está el caballo?
Conseiller 1 - ¿Ronaldinho?
Florentino - Trop Barça, trop voyant !
Conseiller 2 - Et pas assez puissant.
Tous - ¡Mierda! Hay un problema...
Benzema - Rrr zzz...

Les acteurs se replongent dans leurs pensées, dans les postures qu'ils avaient au début. L'employé entre discrètement sur la scène, débarrasse quelques objets sur la table.

L'employé - C'est maintenant que je dois vous expliquer pourquoi Zinédine Zidane est un conseiller spécial du président Pérez. C'est parce que, jusqu'à aujourd'hui, il n'a jamais rien conseillé. En fait, il ne parle pas. Il n'a jamais parlé. Vous l'avez entendu vous-mêmes, en dehors des contrats publicitaires, il ne dit que "c'est bieng", ou "c'est pas bieng".
La dernière fois qu'il a dit plus de trois mots sans avoir signé un contrat, c'était quand il a répondu "c'est vrai ça, je peux essayer ?", un soir de juillet 2006, à un grand Italien un peu fourbe qui se proposait de lui offrir un peu de sa pilosité pectorale pour une greffe-éclair du cuir chevelu. Vous connaissez la suite. Mais aujourd'hui, tout pourrait bien changer... Regardez, je crois qu'il va parler...

Zinédine - Ooooooh mais bonne mèreu ! Je vais vous le résoudre moi votre problèmeu de canassong ! On en a plein la camargueu, des canassong, mais j'ai mieux, je la connais, la solutiong, elle est chez moaa, à Marseilleu, ce pays à l'accent chantant et à la faconde proverbialeu, bouillant de bruit, grouillant de bouillabaisseu, de rouille et de graisseu, d'embrouille et de braiseu, elle est là-bas votre solutiong hippiqueu, dans ce multibazar basané, ce musée de la méditerranée à ciel ouvert, oui, comme son stade, ou comme ses ordures, si vous voulez, elle est là-bas, dans ce pays de boules qui se cocagnent, près du vieux port et de ses petits cochonnets, à Marseille, en Provence, dans ce midi, ce demi-nid de fourmillantes cigales accouplé à une moitié de boîte de sardine ouverte sur cette mer d'huile bordée de calanques aux langoustines et de canebières blondes où repose une montagne de béton baignée de soleil et noyée de pastis, patins, couffins, elle est dans cette multipli-cité radieuse, phocéenne et vraie sirène, mi figue, mi raisin, mistral gagnant et marcel au vent du south, winner, même à Bolton, n'en déplaise aux Cahiers du football !
Je vous la trouve votre chèvre, euh, votre cheval, et peu chère encore ! Fort, bien éduqué, résistant, avec queue de cheval amovible, pur Brésil, comme Ronaldinho, mais plus solide. Brandao, il s'appelle. Son nom de cheval sur les champs de courses, c'est Eve... Evelevetoa euh non Evalongor...pardon Evaeverson Lemos da Silva da prêwikipedia, mais c'est un peu long. Alors on dit la Bête, pour faire court. Avec Karim vous aurez la Benz et la Bête… Tenez, la voilà.

(Claquant du doigt, Zidane fait apparaître l'image suivante sur le mur de scène)

Brand__o.jpg

L'employé - Evaeverson da Silva est aujourd'hui monté par le jockey Mathieu Valbuena à casaque noire bariolée arc-en-ciel et tribande couleur ciel... ciel... ciel, mon RLD !
Zinédine - Une bonne bête, vous verrez, juste un peu mauvais joueur, tel Jolly Jumper : quand il lui arrive de toucher un obstacle, il ne veut pas le reconnaître, et comme il parle, tel Jolly Jumper, mais avec un fort accent, c'est un peu ridicule. Et il est un peu noir, mais Tornado aussi. Et il est souvent sifflé, mais Tornado aussi. Voilà ! Votre cheval, la monture de Karim, c'est Brandao ! À la Castellane, les Castillans !

Ce disant, Zinédine décroche l'épée du Cid qui orne un des murs et se met à siffler :
Zinédine - Tornado ! Tornado !

L'employé sort précipitamment et rentre, imitant le cheval et portant devant le visage une image de Christophe Dugarry tirant la langue.

L'employé - Je ne suis pas Tornado, je ne suis plus l'employé, je suis Christophe Dugarry. Christophe, littéralement, en grec ça veut dire le "porte-christ", christophoros, c'est mon boulot d'accourir quand Zidane m'appelle, même quand il m'appelle Tornado.

Zinédine grimpe sur son dos, tenant toujours l'épée et traçant des z un peu partout.

Zinédine - Mon bon Tornado !
L'employé - (hennissement)
Zinédine - Ah putain, vingt-trois ans ! Vingt-trois ans que ça durait, ce pari à la con avec Arsène! Je me souviens, fin 1987, j'étais en junior à l'AS Cannes, Wenger était l'adjoint, il voulait pas me croire que j'étais Zorro, et il m'avait dit "Pfff! T'es même pas cap de faire Bernardo aussi bien que moi." "On parie?" "Si tu y arrives pas, tu signes dans mon futur club". Bon, là je crois que je viens de perdre, mais je m'en fous, j'ai plus l'âge de jouer à Arsenal et puis vraiment j'en pouvais plus, pas plus de trente mots par an, pour un Suisse ou un Alsacien, c'est de la mesure, pour un Marseillais, c'est de la torture! C'était inhumain ! Ah il en a eu comme ça, des joueurs, le Arsène, encore plus que Claude Puel avec "je te tiens, tu me tiens" ! Mais pas moi, j'ai tenu vingt-trois ans ! Et puis merde, je suis Zorro, pas Bernardo, je suis Z le Zid, Z comme Zorro! Z comme Zizou, Z comme Zahia! Tiens, la voilà!
Benzema - rrr zzzahi... hein, quoi? Zahia, t'es là?
Tous - Il est réveillé ! il est réveillé !
Florentino - Annulez Brandao !
Conseiller 1 - Monsieur si vous êtes conscient serrez-moi la main.
Conseiller 2 - Karim, tu m'entends ? Quel jour sommes-nous ?
Conseiller 3 - Comment vous appelez-vous, monsieur Benzema ?
Benzema - Je suis Karim Benzzz... Benzzz ... rrr... zzzz.
Florentino - ¡Puta mierda! Rappelez Brandao !
Zinédine - Allez viens, on va signer à Marseille avec Mario Jardel !

Tout le monde sort, y compris Benzema, somnambule. L'employé revient, essoufflé.

L'employé - Et voilà. Voilà comment Zidane monta Dugarry, Benzema monta Brandao, tout le monde monta Zahia, inutile de monter sur vos grands chevaux, car Zahia monta au rideau, et le rideau tomba."

RIDEAU

Réactions

  • DidierF le 14/01/2011 à 04h20
    Magnifique! Grandiose! Splendide!
    Je viens de voir le futur du théâtre!

  • Miklos Lendvai le 14/01/2011 à 07h45
    Ô joie ! ô grand espoir ! ô talent reconnu !
    Merci le petit prince pour ce bel acte j'en pince !

  • Diablesse Rouge le 14/01/2011 à 08h02
    Magnifique...

  • Hurst Blind & Fae le 14/01/2011 à 08h29
    Il attendait le ballon côté cour et il lui a envoyé côté jardin. Superbe exercice, si je ne craignais pas toute association avec Obispo, je me déclarerais fan.

  • Marius T le 14/01/2011 à 08h33
    Splendide !

    Deux petits trucs, Yazid n'était pas junior en 1987 et Arsène était dèjà loin de L'ASC.

    Ah bon ce n'est pas une histoire vraie !!! j'y ai cru

  • Tonton Danijel le 14/01/2011 à 09h23
    On peut tout dire sur cet auteur, sauf qu'il manque de talent.

    Clap, clap.

  • la menace Chantôme le 14/01/2011 à 13h41
    ... ou comment remarquablement caser une photo de Valbue sautant sur Brandao en une page....


    C'est dommage : mes potes fans de foot aiment le foot, mais pas ce genre d'exercice littéraire, tandis que mes copines fans de théâtre et de littérature n'aiment pas le foot.

    J'en ai marre de me marrer tout seul.

  • Ba Zenga le 14/01/2011 à 14h10
    Magnifique, fabuleux, extraordinaire, créatif, inventif, drôle, inspiré, riche… Bravo, Mr petit prince, tu es déjà grand.

  • MarcoVanPasteque le 14/01/2011 à 17h11
    Les décors sont-ils de Roger Harth et les costumes de Donald Cardwell ?
    Le texte, lui, est de toute beauté.

  • JeanBen le 14/01/2011 à 18h42
    Chouette texte petit prince !

La revue des Cahiers du football