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Le tourbillon de l'avis

Perfusés aux commentaires à l'emporte-pièce, les médias tournent en rond comme des chèvres attachées à un piquet: pas question de brouter au-delà la corde.
Auteur : Thibault Lécuyer le 29 Sept 2009

 

Contaminé, envahi, grippé. C'est une pandémie sans vaccin. Le gêneur occupe la place et c'est le football tout entier qui se retrouve noyé sous une avalanche verbale et verbeuse: les commentaires. C'est l'avis, qui grignote peu à peu toutes les autres formes d'expression autour du ballon rond.


tourbillon_avis_2jpgEnvoyés dans l'espace
Engoncés dans les comptes-rendus de matches, les journalistes de L'Équipe se sont octroyé depuis peu un espace pour y allumer leurs lumières. Un hors-texte pour sortir du cadre: Alonso est un meilleur meneur que Sessegnon. Auxerre-Nice: quelle purge. Cavenaghi est à la cave. Lâche tes comm', Duluc. Après les matches, le lundi c'est permis. 

Un autre exemple? Plus pernicieux, dans L'Équipe Magazine. La rubrique Zoom: quatre doubles pages, rares dans la presse, laissent de la place à la photo de sport. Sobrement légendées avec un bandeau dans un coin jusqu'en 2007, elles ont d'abord été souillées d'un petit à-plat noir venu s'immiscer plus proche de la scène en 2008. Depuis la rentrée, c'est carrément un micro article – à la valeur ajoutée incertaine – qui vient s'ajouter à la légende. Le besoin de commenter devient compulsif. Les écrans de télévision ou d'ordinateur, les ondes radio sont aussi empoisonnés par la maladie du commentaire, peut-être même sont-ils la souche du virus. Pas la peine de faire un dessin, personne ne demande "Dessine-moi les moutons".


Facile à chanter
Pour des médias qui ont été graduellement vidés par la diffusion en masse des matches, que reste-t-il à donner une fois que l'image a tout dit? Son avis, bien sûr. On pourrait profiter de l'espace créé pour approfondir le contexte et mieux connaître le jeu, mais ça demande du boulot, alors qu'un commentaire… L'avis est un long fleuve tranquille. Le commentaire n'est pas une chronique , l'avis n'est pas une analyse, l'avis n'est même pas une opinion, et encore moins une intime conviction. Car l'avis est par nature réversible, amnésique, partiel, irréfléchi. Brandao est une chèvre, Toulalan est inutile, Wenger a toujours raison. Chienne d'avis.

On pourrait croire que c'est le fond qui préside à sa forme, légère et digeste. C'est le contraire. Le commentaire doit être lapidaire, pour tenir entre deux coupages de parole, entre deux coupures pub. Il doit être assimilable et reproductible. Car une des fonctions premières de l'avis est d'être diffusable. Le microblogging n'a pas été inventé par Twitter et ses 140 caractères maximum. Le propos doit tenir là-dedans. L'avis écourte. Le récepteur doit le comprendre vite pour pouvoir le répéter sans tarder. Si l'avis comporte un bon mot, il mettra les rieurs de son côté et sera répété jusqu'à devenir une vérité.

tourbillon_avis_1.jpg


La bourse ou l'avis
Sur le marché du commentaire, la concurrence est féroce, c'est ce qui le fait proliférer. Il faut du téléspectateur, de la PDA, de l'auditeur, des visiteurs uniques et des pages-avec-publicité. Alors il se décline en émission, en blog, en podcast, en video-webcast, en articles ou en hors-texte, il fait sortir des placards du consultant qu'on déverse à la tonne, jusqu'à tout recouvrir. C'est un parasite qui se nourrit des faits, et les fait disparaître derrière lui, en minuscules chiures. Un parasite qui tue son hôte à petit feu en le vidant de son sens.

Un exemple? Le traitement médiatique des gardiens de but. Il suffit que l'un d'eux soit touché par la lumière médiatique pour être d'abord glorifié puis ridiculisé, à outrance. De tous temps, les gardiens de but ont pris des buts casquette. Les bons comme les mauvais, les Arconada comme les Van Breukelen. Les tayloristes du commentaire se repaissent des malheurs occasionnels des gardiens starifiés, tirant des conclusions comme on tire à vue. Quand on a joué avec Landreau comme un chat avec une souris hémiplégique, quand on a décidé que l'un était un incapable parce qu'il avait raté deux sorties aériennes, que l'autre ne supportait pas la pression parce qu'il avait provoqué un penalty, doit-on s'étonner que les seuls gardiens qui fassent l'unanimité soient ceux qu'on ne voit que très peu? À l'avis, à la mort.


Contrat moral
Les avis se construisent comme les épidémies. La radio prend l'antenne quelques minutes après le match, les balles doivent déjà se trouver dans le barillet. Puis la grande machine s'enclenche dans un fracas assourdissant: sur les blogs le soir même, chez Roustan sur L'Équipe TV le dimanche soir, puis sur M6 une heure après, dans le journal le lendemain, dans les émissions du lundi soir. On commentera les commentaires pendant le restant de la semaine, avant d'en trouver d'autres le week-end suivant.
La course est si effrénée qu'on construira les avis le plus tôt possible. À l'image d'un Franck "On sent bien après trente-cinq secondes de jeu que Cissé n'est pas du tout dans son match" Sauzée, ou de médias qui décident d'accorder des enjeux disproportionnés aux rencontres avant même qu'elles aient débuté.

Il fallait voir la réaction incrédule du présentateur d'une émission confidentielle bien que nationale lorsque l'auteur de ces lignes, sommé de répondre à la question "Ibrahimovic fera-t-il aussi bien qu'Eto'o à Barcelone?" s'est contenté de répondre "Je ne sais pas". Mordre dans l'avis, outrage suprême, coup de canif dans le contrat moral. On sert à quoi si on n'a pas réponse à tout? "Si tu n'as pas d'avis, pourquoi est-ce que je te pay…" Ah non, c'est pas payé. Lutte contre l'avis cher?

Réactions

  • Sue Oddo le 29/09/2009 à 01h57
    Le fond est connu, par contre j'adore la forme, ça se lit parfaitement.

  • charabia le 29/09/2009 à 02h06
    Les commentaires commencent même avant le match, à la manière d'un compte à rebours. A la limite le match n'est plus que l'enregistrement des commentaires, leur concrétisation. Si j'osais parler comme Baudrillard, je dirais que d'une certaine façon les matches ne sont plus que l'alibi des commentaires.

  • losc in translation le 29/09/2009 à 07h52

    Sue Oddo
    mardi 29 septembre 2009 - 01h57
    Le fond est connu, par contre j'adore la forme, ça se lit parfaitement.
    _______________

    +1

    Açta l'avis stabéïbé.

  • Qui me crame ce troll? le 29/09/2009 à 09h31
    Etrange papier que celui-ci donnant son avis sur les avis (en mode masturbatoire et verbeux) et engendrant lui-même des commentaires et des avis. Comme un serpent qui se mord la queue. Internet a donné la parole à l'internaute, aux personnes capables et coupables d'un avis lapidaire, aux adeptes du comportement moutonnier suivant la doxa sans connaître le moins du monde leur sujet et, plus rarement, aux analystes sérieux et compétents. Ce qui marche sur le net marche forcément dans la presse. Le café de la gare se matérialise sur les forums avant d'envahir les médias qui n'avaient pas besoin de ça pour racler les tiroirs. Bientôt l'Equipe mais aussi les journaux télévisés (celui de M6 entrouvre une voie mais n'ose aller plus loin) seront constitués des avis des gens du commun, de nous tous qui avons un avis sur tout sans en maîtriser tous les paramètres.

  • Tonton Danijel le 29/09/2009 à 09h39
    Qui me crame ce troll?
    mardi 29 septembre 2009 - 09h31

    Ouais, grosso modo, Internet a permis de lutter contre la fermeture des bistrots de campagne en permettant à chacun de trouver un espace de dialogue, même les interdits de bistrot.

    Sinon, à la prochaine question stupide, Lécuyer pourra la parer façon Ménès-Poelvorde: "Tiens, une question pourrie!" (Je le félicite pour avoir eu l'intelligence de dire "je sais pas" car je pensais que le Barça s'était fait escroquer en refilant Eto'o + 40 millions pour Ibra, et vu que Zlatan en est déjà à 5 buts en 5 matchs de Liga, j'ai comme un gros doute du coup...).

  • Hassan sans SAS le 29/09/2009 à 09h47
    Ce qui est drôle, c’est qu’en lisant l’article, j’ai pensé à tous nos avis donnés sur le forum.
    Parce que OUI, ce sont des avis. On pense que « machin » n’est pas bon à tel ou tel poste, que la tactique de l’équipe « bidule » n’est pas la bonne, et on donne même très souvent notre avis sur la composition de l’équipe pour le prochain match.

    Alors je pose la question, quelle est la plus-value de cet article ?

    L’avis et/ou le commentaire (c’est au choix) est certes un instantané qui n’est «valable » que peu de temps. Mais le sport, voire l’avis (moi aussi je fais des jeux de mots), n’est-elle pas une suite d’instantanés, qui s’additionnent, se contredisent, se remplacent… ?
    Ex : ma femme est belle, ma femme est douce, ma femme est chiante, j’aime ma femme… tout dépend du moment de la journée où l’on se pose la question.

    A vrai dire, plus que l’article sur « l’avis », je souhaitais ici marquer « ma déception » sur une succession d’articles des CDF qui sont de plus en plus « donneurs de leçons » parce que c’est la marque de fabrique du journal mais qui lorsque l’on analyse le contenu sont assez « discutables ». Enfin, ce n’est que mon avis…

  • suppdebastille le 29/09/2009 à 09h55
    Je viens de comprendre le titre de l'article, clap, clap.

  • funkoverload le 29/09/2009 à 10h37
    En fait cet article est la justification théorique du magn'etoo.
    Assez inutile à mon sens car nous savons tous ici à quoi nous en tenir.
    Tant qu'à enfoncer des portes ouvertes, autant le faire sur un mode un peu moins sentencieux. Pour ça le magn'etoo remplissait parfaitement son rool de briseur de chevilles enflées.

  • king carrasco le 29/09/2009 à 10h42
    Hassan sans SAS
    mardi 29 septembre 2009 - 09h47
    "A vrai dire, plus que l’article sur « l’avis », je souhaitais ici marquer « ma déception » sur une succession d’articles des CDF qui sont de plus en plus « donneurs de leçons » parce que c’est la marque de fabrique du journal mais qui lorsque l’on analyse le contenu sont assez « discutables ». Enfin, ce n’est que mon avis…"

    Moi, ce que je trouve assez désolant, c'est que les réactions aux articles ne servent quasiment plus jamais à débattre des sujets proposés, mais sont devenues pour une large part un rendez-vous de juges-arbitres qui vont statuer sur la légitimité de l'article lui-même – ce qui revient à reprocher tout et n'importe quoi aux Cahiers (ce qu'ils sont, ce qu'ils ne sont pas, ce qu'ils devraient être – conformément à la vision forcément subjective de chaque lecteur, qui n'hésite pourtant pas à la généraliser).
    Ça ressemble parfois à un conseil de surveillance chargé de dire aux Cahiers ce qu'ils doivent faire et ne pas faire...

    Ben oui, les contenus des Cahiers sont "discutables", c'est le but il me semble: proposer des arguments, un ton, des sujets qui doivent susciter autre chose que les polémiques à la con qui sont en vigueur ailleurs, dire autre chose que les lieux communs et les consensus creux... bref, solliciter l'esprit critique des lecteurs, pas leur esprit de critiques.

    L'ironie, c'est que ce papier sur la dictature de l'avis expéditif et narcissique en a déjà suscité quelques-uns. Et moi, je n'arrange rien, puisque je fait de la critique de critique :-)

  • Qui me crame ce troll? le 29/09/2009 à 10h54
    Tu oublies de dire que l'article en est un aussi.

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