Interview : Paul Le Guen
Bonus web - Nous avons rencontré l'entraîneur lyonnais à l'occasion du gros plan sur son club dans le numéro 6 des Cahiers…
le 15 Avr 2004
Vous avez un président qui intervient beaucoup dans les médias, y compris pour commenter les matches. Pour l'entraîneur, cela met plus de pression ou cela en enlève ? Ça me va bien, je vis très bien la chose. C'est une forme de protection ? Vous-même ne vous cachez pas d'employer une certaine langue de bois devant les journalistes… C'est vrai, j'aime beaucoup ça (sourire). C'est une vraie ligne de conduite. Je suis en première ligne à travers les résultats, après, en matière de communication, je prends délibérément le parti de la langue de bois… parfois. Vous n'êtes peut-être pas toujours d'accord avec ce que dit le président ? Nous échangeons très facilement, nous avons une relation très sereine et quand nous ne sommes pas d'accord, nous en discutons. Mais ce n'est pas arrivé très souvent, à vrai dire. Comment la pression s'exerce-t-elle sur un entraîneur plutôt effacé ? Ce sont les résultats qui déterminent tout. L'essentiel est que les joueurs ne ressentent pas cet effacement. Il faut qu'ils sentent la présence d'un décideur, d'un patron technique, que je pense incarner. Ça me suffit, je n'ai pas besoin de le démontrer à travers une communication spectaculaire. C'est aussi dans mon tempérament, et comme je n'ai pas envie de le forcer… De quelle façon a évolué l'environnement de l'OL en deux ans ? Il y a beaucoup d'attentes autour du club : il y a un effectif de qualité, il y a eu des résultats significatifs ces dernières années. La pression est logique, il faut vivre avec, même si parfois c'est un peu plus difficile. Évidemment, quand on reste sur un ou deux échecs, il y a plus de tension, d'agitation autour de nous. Mais il faut envisager les choses dans la durée, mettre les choses en perspective. L'essentiel est de faire le métier du mieux possible, d'essayer d'avoir soi-même bonne conscience en étant complètement investi, engagé. Après, il faut essayer d'avoir des résultats… Et le fait que le président annonce les objectifs à l'avance… Comte tenu de l'effectif, des résultats obtenus ces dernières années, cela servirait à quoi de se cacher ? Oui les objectifs sont élevés, mais je ne trouve pas cela choquant, cela a le mérite de la clarté. Vous avez justement dit, après la qualification contre la Real Sociedad, que la victoire en Ligue des champions n'était pas une utopie. Je ne pense pas avoir fait preuve de prétention, je n'ai pas dit que nous étions favoris… Nous sommes dans les huit derniers clubs qualifiés. Évidemment que le Milan AC, que le Real ont plus de chances que nous de gagner la LdC, je ne suis pas fou, je sais qu'ils ont des effectifs supérieurs au nôtre. Mais le sont-ils vraiment, quand on voit le milieu de terrain lyonnais très fourni, qui a suscité des polémiques sur les titularisations, mais qui est un gage de qualité? Il y a des joueurs de l'OL qui pourraient jouer au Milan AC… On attend les coups de fil (rires). Interrogez les entraîneurs en France ou en Europe, et demandez leur qui a le plus de chances de remporter la coupe d'Europe, de Milan ou de Lyon… Avez-vous senti un gain de popularité autour de Lyon ? Le titre a fait du bien à ce niveau-là. Après, la popularité, ce n'est pas forcément ce après quoi on court. On sait très bien que nous ne sommes pas les plus populaires, mais il ne faut pas chercher à l'être, il faut chercher à obtenir les meilleurs résultats possibles. Celui qui veut absolument être aimé, je ne suis pas sûr qu'il y parvienne. Cela passe plutôt par des performances régulières, c'est ce qui permet d'avancer. Aller dans le sens du vent, du public, cela peut marcher un temps, mais c'est surtout faire preuve de cohérence qui est essentiel.