Zola, le petit magicien sarde
Tribune des lecteurs - On peut marcher à l'ombre et briller de mille feux. C'est ce que montre le destin de Gianfranco Zola, footballeur d'exception…
Auteur : Omar
le 6 Avr 2004
Dans la tornade nostalgique de nos esprits passionnés, nous nous souvenons des exploits des plus grands : Pelé, Platini, Maradona. Ces légendes du football font rêver, encore aujourd’hui, des milliers de fans à travers le monde. Les reportages et autres documentaires en leur hommage en sont le témoignage parfait. À l’instar de leurs aînés, les étoiles brillantes que sont Zinédine Zidane, Roberto Baggio ou encore David Beckham et Ronaldo sont en train d’accéder à cette cellule privilégiée. Grâce à leurs talents, bien évidemment, mais aussi grâce à une image savamment entretenue et une médiatisation inégalée dans l’histoire de ce sport (sponsors, sites Internet, produits dérivés). Dans les plus belles fables, il y a toujours un magicien qui, à l’ombre des étoiles et des lumières, obscurément, émerveille nos cœurs d’enfants. À l’ombre de Maradona C’est dans une ville de Naples entièrement vouée au culte de Diego, que Gianfranco Zola fit ses premiers pas en Serie A, en 1989. Ce fut aussi l’année ou Naples devint champion d’Italie pour la première fois de son histoire, l’exaltation Maradonesque étant à son comble. Et lorsque celui-ci quitta le club, il confia son légendaire numéro 10 à celui qu’il considérait comme son successeur naturel: Zola. Comme un signe pour ce jeune Sarde. C’est dans l’ombre de l’un des plus grand joueur de tous les temps que sa carrière devait prendre son essor. La succession étant quasiment impossible, malgré tout le talent de Gianfranco, la démence napolitaine ne porte qu’un seul nom jusqu’à aujourd’hui, Diego Armando Maradona. À l’ombre des Grands Clubs de Serie A C’est à Parme, sous la coupe de Nevio Scala, que Zola s’affirme vraiment. Dans ce club fraîchement promu en première division italienne, son art s’épanouit, il est le fantaisiste, le créateur qui permet à cette petite équipe qui veut devenir grande (comme la Juventus, Inter, Milan AC) de remporter la Coupe de L’UEFA. À l’ombre de Baggio Zola est alors appelé à défendre les couleurs de son pays pour le Mondial aux Ètats-Unis en 1994. Entraînée par Arrigo Sacchi, la Squadra Azzura arrive sur le nouveau continent avec de grosses ambitions dans ses bagages. Mais malgré toutes les qualités de Zola, la vedette italienne se nomme Roberto Baggio, et Arrigo juge similaire le style des deux hommes, et donc incompatibles. Gianfranco est très peu utilisé, jusqu’en quarts de finale contre le Nigéria où comble de son infortune, il se fait expulser une dizaine de minutes après avoir foulé la pelouse. À genoux, effondré, le visage dans les mains, il se dit qu’il est alors frappé d’une malédiction qui le condamne à l’obscurité. Cette malédiction en sélection nationale se concrétisera en 1998, malgré sa contribution à la qualification en phase finale, Zola n’est pas appelé par Cesare Maldini pour le Mondial en France. À l’ombre des Grands de la Premier League Entre 94 et 98, en 1996 plus exactement, Zola rejoint le club de Chelsea en Angleterre. Comme Parme, ce club londonien veut se faire un nom parmi les plus grands et décide de s’en donner les moyens. Zola est étincelant, délicieusement décisif: lobes, frappes enroulées, dribbles chaloupés, caresses de ballons sont denrées hebdomadaires avec le petit magicien sarde. Mais malgré les services de Zola, Chelsea n’atteint point les objectifs ambitieux et reste calé derrière Arsenal et Manchester United (seules une victoire en Cup et une victoire en Coupe des Coupes pour Chelsea). À trente-six ans Zola dispute sa dernière saison en Angleterre, marquant quatorze buts, tous plus somptueux les uns que les autres, il vient aux entraînements deux heures avant ses coéquipiers, "pour compenser la vieillesse" dit-il lorsqu’on l’interroge. Il régale les supporters londoniens qui le portent dans leurs cœurs, mais décide malgré tout de quitter l’Angleterre pour venir terminer sa carrière en Italie, près de chez lui, à Cagliari. Allergique à la lumière que Roman Abramovich attire sur le club avec ses dépenses faramineuses, Gianfranco rentre à la maison. A l’ombre des médias 28 février 2004, Zola, trente-sept ans, à l’ombre des médias, permet à Cagliari de se hisser au deuxième rang, synonyme, à ce moment de la saison, de promotion en Serie A. Et de quelle manière! Il marque un doublé contribuant à une victoire historique pour le club sur le score de 5-1 contre le premier du classement, l’Atalanta de Bergame. À l’ombre des grands, Zola alimente encore une des plus belles fables du football moderne. Car comme on le dit souvent, c’est de l’ombre que naît la lumière.