La Gazette, c'est toujours la vraie actualité du football. On y parle éthique, messages personnels, augure, archives, footballeurs-trop-payés et télévision industrielle. Mots-clés : Rocheteau, Henry, Canal+, TF1, Le Lay, Jean-Paul II, Olive mais pas Tom.
L'effectif du Real fait baver tout le monde, même le Pape. |
Rocheteau veut frapper
Le Conseil national de l'éthique a été créé quelques semaines avant l'élection de Frédéric Thiriez, à un moment où la Ligue avait un urgent besoin de se racheter une conduite. Sa première réunion officielle a d'ailleurs eu pour objet l'audition de Jean-Michel Aulas et Luis Fernandez (absent), consécutivement aux incidents de Lyon-PSG (17 février). Dès sa naissance, il était clair qu'une question allait très rapidement se poser pour savoir si le Conseil serait un hochet inoffensif, ou bien s'il pourrait infléchir la dégradation des comportements au sein de l'élite. Car s'il peut se saisir d'un incident et déférer les personnes devant la Commission de discipline, il est dénué de pouvoir de sanction. Autant dire qu'il ne menace pas grand monde et que s'il peut sermonner les contrevenants, la politique de discipline reste aux mains de la Ligue, malgré l'accumulation invraisemblable de décisions dramatiques lors des deux saisons précédentes (depuis l'affaire OM-Monaco jusqu'à celle des faux passeports en passant par un laxisme général dans les sanctions ordinaires).
S'il semblait d'abord se résigner à cette impuissance, Dominique Rocheteau, président du CNE, s'est résolu à l'évidence, dénonçant un statut imprécis et réclamant explicitement ce pouvoir de sanction : "Nous ne l'avons pas encore et il nous le faut" (L'Equipe, 06/09). Frédéric Thiriez, féru d'éthique, l'écoutera-t-il?
Kyd Henry
Thierry Henry nourrit la chronique britannique, pour être passé outre l'interdiction de passer des messages personnels sous le maillot. Il faut dire qu'on en est plus au stade de l'artisanat chez le Gunner, qui fait imprimer ses t-shirts chez des professionnels de la typographie, bien loin des laborieux griffonnages au marker vus ici et là. Passons sur la jet-setification de notre attaquant national, qui fréquente les vedettes internationales ("For the new born kyd" célébrait la naissance de l'enfant de Sharleen Spiteri, chanteuse de Texas). Comme l'épineux problème de la liberté d'expression textile du footballeur est un sujet récurrent sur ces pages, indiquons ces quelques références:
Ferme ta gueule et tais-toi, septembre 1999.
Elégance et bonne tenue, mars 2002.
Rétroviseur
Les Cahiers du football valorisent leur patrimoine, et ressortent donc leurs vieilles tranches. Il y a deux ans pile, quelques semaines après un Euro 2000 ô combien victorieux, notre collaboratrice Julie Grémillon jouait les Cassandre, mais tapait plutôt juste.
"Espérons que la saison 2001/02 soit plus nettement centrée sur le sport que sur les relations publiques" s'inquiétait-elle…
Les Bleus au risque de l'arrogance.
Les télés mordent, mais plus à l'hameçon
Est-ce la revanche des vrais nantis sur les pue-la-sueur qu'ils ont enrichi à leur corps défendant? Patrick Le Lay, ci-devant président de TF1 a en effet violemment stigmatisé des footballeurs trop grassement payés. Cette charge n'est que l'accompagnement musical d'une vaste offensive des télévisions pour prendre les devants de la crise et pousser les droits de rediffusion à la baisse. C'est un exercice délicat, qui nécessite de ne pas trop dévaluer le produit. Le registre habituel des télés sur les matches qu'elles diffusent est en effet plutôt la promotion béate, cette fois il leur faut cracher dans la soupe, mais avec retenue. Par exemple, Canal+ ne peut dire à la Ligue (qui vient d'ouvrir l'appel d'offres pour la remise en vente des droits à partir de 2004/2005, vingt-quatre mois avant sa clôture), votre "championnat de seconde zone, on ne pas vous en donner beaucoup".
L'usine nouvelle
Karl Olive est le nouveau directeur des programmes sportifs de Canal+. Une nomination surprenante pour ce journaliste, deux ans après son arrivée sur la chaîne cryptée. Animateur de D2 Max, il s'est surtout rendu célèbre auprès de nous par les commentaires de ses résumés dans Jour de foot, extraordinaires florilèges d'approximations lexicales et de métaphores hasardeuses (voir ci-dessous). On se disait que le journalisme sportif à la télé, c'est un peu comme la police au niveau recrutement, mais on n'était pas au bout de la surprise, puisque le jeune homme (33 ans) connaît aujourd'hui une belle promotion. Ancien directeur d'antenne d'une chaîne câblée des Yvelines, il a en tout cas bien employé ses réseaux. Sa polyvalence doit le servir, puisqu'il animait récemment un séminaire d'entreprise à Clairefontaine (en compagnie d'autres personnalités, pour les curieux, voir la page sur le site de la
FFF).
Il paraît que Thierry Gilardi voulait retrouver le "terrain", c'est-à-dire l'animation des soirées de Ligue des champions au contact de l'enthousiasme légendaire de Michel Platini. Difficile d'interpréter ces mouvements de personnel dans le contexte d'incertitude qui entoure la chaîne. Cela ne l'empêche toutefois pas de lancer un "pôle sport", dirigé par Michel Denisot, incluant la nouvelle chaîne Sport+ et qui comptera 150 journalistes, soit dans les termes de Karl Olive "la plus grande rédaction sportive télévisuelle d'Europe" (AFP 16/02).
En plein virage sur l'aile (à une altitude dangereusement basse), abandonnant toujours plus de sa singularité originelle, Canal+ va donc se lancer sous nos yeux dans le journalisme sportif industriel.
Karl Olive : extraits
"Regardez avec quelle assiduité Pauleta marque ce but".
"Sur ce terrain où le gel de vendredi contre Lens a laissé place ce soir aux escalopes naissantes".
"M. Rosetti a un point commun avec Lille, il a arbitré l'équipe de Parme contre Piacenza".
"L'histoire va-t-elle se répéter? Peut-être que oui, mais peut-être que non".