Miodrag Belodedici, le Serbe de Roumanie
Les joueurs d'exception - Ménageons à ce libéro de classe, au palmarès exceptionnel, la place qu'il mérite dans le panthéon du football européen.
Ce joueur possède un record, mais lequel? But le plus rapide du championnat roumain? Non. Plus de cartons jaunes en une saison? Non plus. Belodedici est le premier joueur à avoir remporté la Coupe des Clubs Champions avec deux clubs différents. Avec le Steaua Bucarest en 1986 (avec les Duckadam, Boloni, Lacatus et Piturca) et l’Etoile Rouge de Belgrade en 1991 (avec Mihajlovic, Savicevic, Prosinecki et Pancev). Ce sont d’ailleurs les deux seuls clubs d’Europe de l’Est à avoir remporté la désormais Champions’ League. Mais revenons à Miodrag.
Suivre son étoile
Ce libéro de grande classe, surnommé le Cerf en raison de ses tacles élégants, est né dans une famille d’origine serbe dans le village roumain de Socol, situé à la frontière entre les deux pays. Après avoir fait ses classes au Minerul Moldova Noua (une ville proche de Socol), il est repéré et recruté par le Luceaf?rul Bucure?ti. Ce club, formé par la Fédération roumaine de football, regroupe à l’époque tous les jeunes talents nationaux. Les plus grands joueurs des années 80 et 90 y ont joué: Gheorghe Hagi, Gheorghe Popescu, Florin Prunea, Mircea Rednic…
Au bout d'un an, Belodedici signe au Steaua Bucarest, sur la demande expresse de Ion Alecsandrescu, le président (et légende) du club). Il évolue six années durant dans la capitale, le temps de remporter quatre championnats, trois coupes, la C1 en 1986 et la Supercoupe d’Europe en 1987. Il y découvre également la sélection en 1984, avec laquelle il honore dix-neuf sélections (et quatre buts) durant son séjour au Steaua. Mais ce supporter de l’Etoile Rouge de Belgrade depuis son enfance se lasse de son club, et veut traverser la frontière. Problème: le régime communiste de Nicolae Ceausescu ne permet pas les départs de joueurs roumains à l’étranger.
La fuite à Belgrade
C’est pourquoi, en 1988, Miodrag Belodedici quitte le club et le pays pour joindre la Yougoslavie voisine. Il expliquera plus tard son arrivée à Belgrade: il contacte le président de l’Etoile Rouge, Svetozar Mijailovic dès son arrivée, mais ce dernier était occupé à panser les plaies de son équipe après la défaite contre le voisin haï du Partizan. Il accepte de recevoir le Cerf, mais sans grande conviction. Durant l’entrevue, un de ses amis serbes essaie d’ailleurs de convaincre Belodedici de signer au Partizan, mais l'intéressé lui signifie qu’il préfère attendre. Mijailovic interrompt alors la conversation, se rendant compte du type de joueur qu’il avait en face de lui (un vainqueur de la Coupe d’Europe!) et le fait signer dans la foulée. Pour un président qui n’avait pas le temps de rencontrer un joueur…
Le Steaua n’ayant pas été mis au courant de ce transfert, Belodedici y est toujours engagé contractuellement, et le club roumain saisit l’UEFA qui le suspend un an de toutes compétitions. Le joueur ne peut donc participer qu’à des rencontres amicales. Mais surtout, le régime de Ceaucescu l’accuse de trahison et le condamne à dix ans de prison par contumace! La sentence sera annulée après la révolution de 1989, lui permettant de retourner en Roumanie
Histoire de penalties
La même année, il peut enfin jouer en compétition officielle avec l’Etoile Rouge et devient un maillon essentiel de la défense. En 1991, il joue et remporte sa deuxième Coupe des clubs champions face à l’Olympique de Marseille, inscrivant le troisième tir au but. Cette même année, il demande à la FIFA de jouer pour la Yougoslavie – demande refusée puisqu’il il a déjà été sélectionné en équipe de Roumanie.
Sa notoriété explose en Europe, et en juillet 1992, il quitte la Yougoslavie sur trois titres de champions, une coupe et une victoire en Coupe Intercontinentale. Malgré un intérêt prononcé de la Sampdoria, il signe au Valencia CF en juillet 1992. C’est d’ailleurs à ce moment-là qu’il est rappelé en équipe nationale, après quatre ans d’oubli.
Il reste à Valence deux ans, et en 1994, il part aux Etats-Unis disputer la WorldCup. Après avoir terminé premier de son groupe, et éliminé l’Argentine (sans Caniggia ni Maradona) en huitièmes de finale, la Roumanie sera arrêtée en quarts par la Suède, qui terminera troisième du tournoi. La rencontre est épique: Brolin ouvre le score pour les Scandinaves à la 78e minute, mais Raducioiu égalise en toute fin de match. Démarrent alors les prolongations: à la 101e minute, Schwarz est expulsé et Raducioiu marque son deuxième but. On croit donc à l’élimination des Suédois mais Kennet Andersson égalise à la 115e. Les Roumains perdent aux tirs au but, à cause de l’arrêt de Ravelli sur le tir de Belodedici. Tireur heureux en 1991, malheureux en 1994…
Belodedici quitte donc le club Ché pour Valladolid puis Villarreal (une année pour chaque club), et signe en 1996... à Atlante, au Mexique! Il y évolue deux ans en tant que titulaire, et reviendra dans le club de ses débuts, le Steaua Bucarest. Il y reste trois années, le temps de remporter un championnat et une coupe, et raccroche les crampons en 2001, à trente-sept ans.
Fiche du joueur
Miodrag Belodedici (ou Miodrag Belodedi? en Serbe), né le 20 mai 1964 à Socol (Roumanie), libéro.
Carrière
1978-81: Minerul Moldova Noua
1981-82: Luceafarul Bucuresti
1982-88: Steaua Bucuresti
1988-92: Crvena Zvezda Beograd
1992-94: Valencia CF
1994-95: Valladolid
1995-96: Villarreal
1996-98: Atlante
1998-01: Steaua Bucuresti
Palmarès
Championnat de Roumanie: 6
Coupe de Roumanie: 3
Supercoupe de Roumanie: 1
Championnat de Yougoslavie : 3
Coupe de Yougoslavie: 1
Coupe des Clubs Champions: 2
Supercoupe d’Europe: 1
Coupe Intercontinentale: 1
Sélection nationale
53 capes, 5 buts pour la Roumanie entre 1984 et 2000.
Présent à la Coupe du monde 1994.
Présent à l’Euro 1996.
Présent à l’Euro 2000.