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Matthias Sindelar (1/4) - Le joueur de papier

Avant de devenir un mythe, Sindelar a été l’une des étoiles du football viennois de l’entre-deux-guerres. Retour sur le parcours en club du meilleur joueur autrichien du vingtième siècle.

Auteur : Toni Turek le 16 Mai 2011

 

Le nom de Sindelar reste indissociable du surnom de "Mozart du football". Pourtant, contrairement à Mozart, Sindelar ne naît pas Salzbourg. C’est à Kozlau bei Iglau – l’actuelle Kozlov, en République Tchèque – que Mat?j Šindelá? voit le jour, en 1903. Comme bien d’autres dans cette contrée, la famille Sindelar est pauvre. Le père Jan, maçon, veut tenter sa chance ailleurs avec son épouse Marie et leurs enfants, dans l’espoir d’une vie meilleure. En 1905, la famille Sindelar part s’installer à Vienne dans le quartier ouvrier de Favoriten, où vagabondent déjà de nombreux exilés tchèques et hongrois. C’est dans cette zone défavorisée de la capitale autrichienne que Mat?j – au prénom germanisé en Matthias – découvre puis pratique le foot, en compagnie des fils d’autres émigrés de Bohême-Moravie. A l’instar du Brésilien Friedenreich [1], c’est la rue qui est la première école de football de Sindelar.


Du Hertha Wien, club de son quartier…

1918: les années ont passé, la Première guerre mondiale aussi. Depuis un an, le chétif Matthias s'est engagé dans une formation d’apprenti mécanicien. Un passage précoce dans la vie d’adulte rendu indispensable par la disparition de son père au front, et par la nécessité d’aider sa mère, devenue lavandière, à faire vivre la famille – Sindelar a trois sœurs. Il n’a cependant pas arrêté le foot. Bien lui en a pris: excellent dribbleur et finisseur, il est repéré par un recruteur de jeunes talents, qui lui fait vite intégrer un des clubs de son quartier, le Hertha Wien. Sa formation et ses entraînements vont dès lors rythmer la vie du tout nouvel attaquant du Hertha. D’abord avec les jeunes, puis avec l’équipe première à compter de 1922. C’est durant cette période où il porte le maillot bleu et blanc du Hertha que Sindelar gagne ce poétique surnom de Papierene. "L’homme en papier" est en fait une allusion à son physique, car il paraît aussi frêle que quand il était enfant – il pèse alors à peine 60 kg. Mais Sindelar obvie à cette carence en physique par une technique hors pair qui lui permet d’esquiver et dribbler à volonté ses opposants, et de se faufiler avec une facilité déconcertante au sein des défenses adverses.

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Les années 1920 débutent pourtant mal pour le jeune avant-centre du Hertha de Vienne. Il doit faire face au chômage en 1922, quand il perd sa place à l’usine automobile qui l’emploie. Côté sport, il n’apparaît qu’irrégulièrement avec l’équipe première de son club. Pire, en mai 1923, il se blesse grièvement à un genou dans une piscine. C’est le début d’une très longue phase d’indisponibilité.
À cette même période, le Hertha de Vienne connaît lui aussi bien des soucis. Même s’il est présent dans l’élite depuis la création du championnat en 1911, le club est un habitué du bas de tableau. Ce n’est pas sa première mauvaise passe sportive, loin s’en faut [2], mais cette crise est cette fois également économique.



… à l’Austria Wien, club de son cœur – et de son genou

Pour survivre, le club bleu et blanc doit réduire son groupe, et Sindelar appartient au lot des partants. Pour le Hertha, relégué pour la première fois, l’été 1924 marque le début du déclin. A contrario, pour Sindelar, c’est le début d’une ère meilleure. En 1924, il consulte le médecin d’un autre club viennois, qui lui conseille de se faire opérer du ménisque. Une telle opération est risquée, mais elle est devenue nécessaire tant les douleurs sont aiguës et persistantes. Sans elle, la fin de carrière est inéluctable. Elle a donc lieu, avec succès puisque quelque temps après, Sindelar rejoint le club du docteur qui a été de si bon conseil. Et il ne s’agit pas de n’importe lequel: en 1924, les Wiener Amateure ont gagné leur premier titre en championnat et remporté leur deuxième victoire en Coupe.

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Dans ce championnat viennois, devenu professionnel en 1924, Sindelar s’intègre petit à petit au sein de son nouveau club. Des débuts glorieux: les Amateurs occupent le haut de l’affiche, avec en championnat une deuxième place en 1924/25 et un nouveau sacre en 1925/26 – le tout agrémenté de deux trophées supplémentaires en Coupe. Depuis son retour sur les terrains, plus encore qu’avant, Sindelar se sert de sa capacité à se défaire de ses adversaires en un contre un, afin d'éviter un choc qui serait fatal à ce genou droit si fragile, autour duquel est serré en permanence un bandage blanc – l’autre explication au surnom de Papierene.
L’année 1926 marque un triple tournant. D’abord pour les Amateurs viennois: leur nom est modifié en Austria Wien, le club aux tenues violettes étant désormais professionnel. Ensuite, pour Sindelar: l’attaquant est appelé pour la première fois en sélection. Enfin, pour le Hertha de Vienne: l’ancien club de Sindelar vit là sa deuxième rétrogradation en trois ans.



Vers les sommets européens

Par la suite, l’Austria de Vienne quitte les premières places du championnat: la faute aux départs de plusieurs joueurs cadres convaincus par un exil doré, aux Etats-Unis notamment. Si l’Austria devient une spécialiste de la Coupe avec deux finales (1927, 1930) et trois nouveaux sacres (1933, 1935, 1936) à son actif [3], le plus souvent les "Violets" vont vivoter dans le ventre mou du classement, laissant le Rapid, l’Admira et le First Vienna FC se livrer à une lutte féroce pour le titre. Consolation: en ne posant pas de condition au recrutement, l’Austria parvient à renouveler régulièrement son effectif et évite un déclin semblable à celui de l’Hakoah de Vienne [4]. Le ventre mou vaut toujours mieux que la D2…

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Malgré les résultats médiocres de l’Austria en championnat et les problèmes financiers auxquels elle doit faire face, Sindelar maintient au fil des ans une fidélité sans faille à son club. Pourtant, les occasions de changer d’horizon ne manquent pas: convaincus, les dirigeants du club rival du Rapid de Vienne, de même que ceux de certains clubs étrangers (le Slavia de Prague, et des clubs anglais – le top niveau à l’époque), tentent de persuader le brillant avant-centre de l’Austria de rejoindre leurs équipes en empruntant un pont d’or. Sans aucun succès. En ne donnant pas suite à ces offres, l’humble Sindelar renforce sa popularité, déjà grande par le jeu et la personnalité, à l’Austria. En effet, si le Rapid de Vienne – le club ouvrier de la capitale – aligne des joueurs qui misent plutôt sur le physique, l’Austria est le club de la bourgeoisie et de l’élite intellectuelle locale: les fans des "Violets" apprécient particulièrement l’élégance et la distinction de leur chouchou blond sur le terrain – et le voir rester les comble.



Un trophée qui manque, un souvenir qui reste

Grâce à ses résultats en Coupe et championnat, l’Austria dispute cinq années de suite la Mitropa-Cup [5]. Pour sa première participation en 1933, Sindelar démontre tout son talent. En quarts, il marque au retour le but du 3-0 qualificatif face au Slavia de Prague qui l’avait pourtant emporté 3-1 à l’aller. En demi, il inscrit un but contre la Juventus de Turin (3-0, 1-1). Enfin, après la défaite 1-2 chez l’Ambrosiana Inter de Milan en finale aller, Sindelar réalise au retour un triplé au Prater-Stadion. L’ultime but est inscrit dans les dernières minutes, peu après celui de Meazza qui avait remis les deux équipes à égalité sur les deux rencontres. Avec ses cinq buts, le néo-trentenaire finit meilleur buteur d’une compétition qu’il remportera avec l’Austria une seconde fois en 1936, et dont il sera également deux fois demi-finaliste en 1935 et 1937, contre les Magyars du Ferencváros FC Budapest.

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Un championnat viennois, cinq Coupes nationales et deux Coupes Mitropa: à son joli palmarès avec l’Austria de Vienne, il ne manque en fait à Sindelar qu’un trophée de meilleur buteur. Car s’il est à l’occasion le meilleur marqueur des "Violets" sur une saison, et s’il est aussi le meilleur buteur de son pays en Coupe Mitropa avec vingt-quatre réalisations, Sindelar ne sera jamais sacré meilleur buteur du championnat autrichien. C’est le revers de la médaille pour être resté fidèle à l’Austria jusqu’à la fin de sa carrière. Dans un club plus huppé, son palmarès eût pu être aussi impressionnant que celui d’un Anton Schall [6].

Les générations successives des fans des "Violets" n’oublieront pas Sindelar, ce magicien, si fragile et si talentueux, qui figure toujours au deuxième rang des meilleurs buteurs de l’histoire de l’Austria de Vienne, pour laquelle il a inscrit cent soixante buts rien qu’en championnat, selon les chiffres officiels. Signe de reconnaissance méritée, pour le quatre-vingt-dixième anniversaire du club viennois célébré en 2001, Sindelar apparaît comme l’avant-centre de l’équipe-type de l’Austria du vingtième siècle, qui inclut aussi un de ses coéquipiers d’alors, le milieu Walter Nausch. Distinction suprême, Sindelar fait même partie du très restreint Hall of fame du club violet, dont il est l’unique représentant du football d’avant-guerre. L’homme de papier était un Ballon d’Or avant l’heure.

Matthias Sindelar (1/4) – Le joueur de papier
Matthias Sindelar (2/4) – Le Mozart du football
Matthias Sindelar (3/4) – 1934, l'occasion ratée
Matthias Sindelar (4/4) – De la légende au mythe    

[1] Lire "Arthur Friedenreich, O Tigre do Brasil".
[2] Le Hertha a terminé barragiste en 1912 et 1913 et s’est sauvé les deux fois. Lanterne rouge en 1916, 1917 et 1918, il n’est jamais descendu – la fédération ayant figé l’élite à cette période.
[3] À ses débuts, la Coupe d’Autriche est une compétition réservée aux seuls clubs viennois. Elle ne s’ouvre aux autres régions qu’en 1936. De nos jours, l’Austria est toujours cette "équipe de Coupe", avec le bilan record national de 27 trophées. Depuis 2003, elle a joué six finales et en a remporté cinq.
[4] Lire "Hakoah – Que la force soit avec toi".
[5] Cette coupe voit s’affronter vainqueurs de Coupes et champions – et plus tard leurs dauphins – de plusieurs pays d’Europe centrale (Mitteleuropa en allemand, d’où le nom "Mitropa"). En 1933, ces pays sont l’Autriche, la Hongrie, l’Italie et la Tchécoslovaquie.
[6] International autrichien contemporain de Sindelar. Avec l’Admira Wien, Toni Schall a fini cinq fois meilleur buteur, a remporté sept championnats et a gagné trois Coupes d’Autriche.

Réactions

  • Tonton Danijel le 16/05/2011 à 09h52
    Merci Toni.

    [Spoiler]
    de Sindelar je ne connaissais que la fin tragique
    [Spoiler]

    En tout cas cet article offre des précisions sur la vie du joueur, j'ignorais son origine tchèque et l'histoire de sa blessure récurrente.

  • Vieux légume le 16/05/2011 à 16h29
    Merci d'avance Toni. 4 articles pour le prix d'un, c'est la spéciale fin d'année, c'est ça ?

    Sinon, j'ignorais également qu'il était en fait tchèque. Je vais me coucher moins bête ce soir.

  • José-Mickaël le 16/05/2011 à 20h24
    Tchèque ? Autrichien ? Ah la la, on retombe dans le fameux "problème" des binationaux...

    Il ne faut pas oublier qu'avant 1919 les Tchèques faisaient partie de l'empire austro-hongrois. En fait c'est même plus compliqué que ça puisque, pour le foot (pour les autres sports je ne sais pas), on avait une équipe nationale de Bohème (qui n'est pas la Tchéquie - il manque la Moravie).

  • Croco le 16/05/2011 à 23h23
    Très bon sujet Toni. J'espère en apprendre un paquet sur le bonhomme.

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