Le match sans les yeux
Pourquoi regarder les matches quand on peut les imaginer? Essayons le journalisme de fiction avec une version homérique d'Olympiakos-ASSE.
Auteur : Jérôme Latta
le 21 Fev 2009
Nul ne l'ignore : c'est le lobby militaro-médiatique, à l'aide de drogues puissantes et de présentateurs faibles, qui nous a persuadés que quand on aimait le football, on devait en regarder beaucoup. C'est oublier le temps où nos grands parents vivaient la grande mythologie de ce sport en le suivant à la radio ou au travers des comptes rendus de la presse. Aujourd'hui, alors que les diffusions se dispersent sur des canaux inaccessibles et que les abonnements s'avèrent bien chers, il est temps: arrêtons de regarder les matches, rêvons-les!
* * *
L'AS Saint-Étienne n'aborde pas ce seizième de finale à Athènes avec beaucoup de certitudes, à part que Varrault ne va pas être l'homme du match. Alain Perrin a décidé de jouer la carte des régionaux de l'étape en alignant Tavlaridis, Dernis et Bafegomis. Malheureusement, Olastuladanlos n'a pas pu être inscrit sur la feuille de match. Mais Ilan aussi est là, lui que la presse locale a surnommé Ilan-Baros.
Les Verts attaquent bille en tête, et on ne parle pas là de Payet. En débordant un peu large, Varrault trébuche sur le plâtre de Landrin qui avait pris place sur le banc. Mais Machado récupère et adresse un centre violent que Mirallas veut reprendre de la tête. Sous le double effet gras / rigide de son gel capillaire, le ballon prend une trajectoire inattendue et revient sur Ilan qui trompe le gardien. Mahilisdevis n'est pourtant pas une trompette, mais le Brésilien est en réussite depuis que Jocelyn Angloma lui a remis le trophée de la coiffure la plus ridicule du championnat.
Ilan passe la seconde
Les visiteurs assoient leur domination, mais butent sur le féroce défenseur Ogécénis, qui tacle sévèrement Blaise Matuidi. Tavlaridis réplique en cisaillant Osteoporos, qui sort sur une civière. Seul en pointe, Toriamos, déjà peu viril, évite les contacts. En fin de période, Ilan place un démarrage qui laisse l'arbitre sur place et sert parfaitement Dernis, après avoir quand même un petit peu hésité. L'ancien Lillois réussit sa spéciale, le tout petit pont, en passant entre les jambes du défenseur avant de doubler la mise.
La reprise est dure pour les hommes de Perrin. Les Athéniens jouent désormais avec deux demis offensifs et deux Demis Roussos. À l'heure de jeu, Roberpiros réduit l'écart. C'est encore lui qui s'échappe seul en contre quelques minutes plus tard, Mais Benalouane sent une moustache lui pousser et il revient in extremis lui reprendre le ballon. Le match se durcit, les insultes fusent. "Sophocle you!" "Salonique ta mère!" "Va te faire voir chez nous!" L'arbitre croate, M. Defursak, a du mal à tenir la rencontre.
Le coach grec joue son va-tout: Angelmarcos fait entrer son joker, le fantasque Patrisiakas, au moment où Tavlaridis doit sortir, victime d'une entorse au règlement. Mais il est trop tard. Gomis, plutôt remarqué pour son sens de la largeur cette saison, prend la profondeur et s'en va donner un avantage décisif aux siens. Le stade se vide et la sono diffuse une chanson de la vedette locale Stingdepolis, mais ce sont les Verts qui poursuivent une triomphale tournée européenne.