Le Brésil, bel horizon
Invité : When Saturday Comes – En dehors du mythique Petkovic et récemment de Seedorf, peu de grands joueurs européens ont tenté l'aventure du foot brésilien. Cela pourrait changer.
Un nouvel article de When Saturday Comes traduit sur les Cahiers du football, issu du numéro de janvier. Titre original: New Adventures.
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Un calendrier très dense, des versements de salaires irréguliers au sein de clubs en difficultés financières, des terrains bosselés, un public et des médias très exigeants: voila quelques-unes seulement des raisons pour lesquelles les joueurs européens ont résisté à la tentation de jouer au Brésil. Aucune n'a été suffisante pour dissuader Clarence Seedorf, en juillet dernier, de rejoindre Botafogo en signant un contrat qui changera peut-être la donne.
Si tu vas à Rio...
Les deux parties, à ce jour, se déclarent pleinement satisfaites, même si Botagogo, septième, a échoué près d'une place qualificative pour la Copa Libertadores qui lui échappe depuis seize ans. "Nous n'avons pas vingt-cinq stars dans l'équipe, a déclaré Seedorf en octobre, mais travailler ici est très facile. Les jeunes sont vraiment ouverts et ont envie d'apprendre."
Il est apparu que Seedorf, qui a par moment exprimé sa frustration envers ses coéquipiers, était finalement plus prêt pour Botafogo que Botafogo pour lui. Deux prestations brillantes contre Cruzeiro et les Corinthians, huit buts en championnat n'ont pas pu compenser l'absence d'un bon avant-centre ni la fragilité de la défense locale. Son professionnalisme sans concession ne le range pas dans la catégorie des revenants Romario, Ronaldinho ou Adriano, qui s'entraînaient selon leur bon vouloir dans leurs clubs cariocas respectifs.
Cela n'a pas été complètement un saut dans l'inconnu pour Seedorf, dont l'épouse Luviana a grandi à Rio dans une famille de supporters de Botafogo. En parallèle à son contrat de deux ans, le Néerlandais cherche à développer des intérêts commerciaux dans une ville qui bénéficie des investissements relatifs à la Coupe du monde et aux Jeux olympiques. Rio a aussi offert de la visibilité à la Fondation Seedorf, une organisation caritative créée en 2005 pour promouvoir l'importance sociale du sport dans la vie des enfants.
"Pet" sounds
Seedorf reste cependant à quelque distance du panthéon de "Fogo" où résident des déités comme Garringha, Nilton Santos et Jairzinho, dont les statues se dressent devant l'entrée ouest du Engenhao, le stade du club depuis 2007. Assez loin même de Dejan Petkovic. Le Serbe, ancien de l'Étoile rouge de Belgrade et du Real Madrid, a connu l'exceptionnel destin de devenir une idole à la fois pour Flamengo et Vasco de Gama au début des années 2000. Revenu à Flamengo en 2009, a priori seulement pour une sorte de tournée d'adieux, il avait mystifié son monde en renouant avec sa meilleure forme pour conduire les Rouge et Noir vers leur premier titre national depuis 1992.
La maîtrise du Portugais a aidé "Pet" et Seedorf à s'intégrer au sein d'effectifs monolingues. Petkovic, en rejoignant le Brésil après ses échecs en Espagne, avait fait un pari, n'ignorant pas que ses chances d'être de nouveau sélectionné (il avait connu sept sélections avec a Yougoslavie, n'en connaîtra aucun avec la Serbie) seraient réduites. Seedorf, lui, après une carrière qui lui a fait connaître l'Ajax, la Sampdoria, le Real et des deux formations milanaises, pouvait se permettre de privilégier la qualité de vie à un plus gros chèque dans le Golfe.
Les Européens ont exercé une influence majeure au cours des premières décennies du football brésilien, au travers de Britanniques comme Harry Welfare, un attaquant qui inscrivit 163 buts en 166 matches pour Fluminense, entre 1913 et 1924 – on lui prête aussi l'importation du une-deux dans le jeu brésilien – ou Sidney Pullen, qui remporta six championnats de l'État de Rio et évolua même en sélection auriverde. Plus récemment, le succès de Petkovic avait amorcé une vague de joueurs en provenance des Balkans, mais ses compatriotes Miodrag Andjelkovic (Fluminense, Coritiba) et homonyme Vladimir Petkovic (Botafogo) ne firent pas vraiment sensation au cours de brefs séjours il y a une dizaine d'années.
Regain de lumière
En attendant les prochaines spéculations sur l'avenir de Beckham, le seul nom européen d'un joueur majeur lié à un club brésilien a été celui de Florent Malouda, qui a un temps suscité l'intérêt de Santos. En revanche, le pays a toujours été un pôle d'attraction pour les meilleurs joueurs de tout le continent sud-américaine. L'an passé, Diedo Forlan a rejoint l'Internacional trois décennies après les succès de son père à Sao Paulo, tandis que la filière argentine a compté Andrès d'Alessandro, ou encore Caroles Tevez et Javier Mascherano – dont le court passage aux Corinthians en 2005/06 avait suscité la controverse.
Tout cela pourrait changer si le Brésil continue de prospérer pendant que les économies européennes souffrent, d'autant que les entreprises locales sont désireuses de financer quelques grands noms. Le titre de Fluminense s'est aussi construit avec les investissements de la compagnie d'assurances Unimed, qui a dépensé plus d'un million d'euros par mois pour assurer la présence de Deco, Fred et Thiago Neves.
Les Européens qui voudront marcher dans les pas de Clarence Seedorf devront probablement accepter la sous-exposition médiatique dont Petkovic a fait l'expérience, le championnat brésilien et la Coupe Libertarores n'ayant pas le même retentissement que les grands matches européens. La Coupe du monde 2014 pourrait marquer un tournant, avec des salaires compétitifs et des infrastructures rénovées qui inspireront d'autres esprits aventureux.
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