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La vanité des bûchers

"Grand déballage" et "grande lessive"... Les partisans de la table rase préparent-ils un avenir encore plus sombre pour l'équipe de France?
Auteur : Jérôme Latta le 24 Juin 2010

 


La musique de la défaite

Les vannes sont ouvertes, donc. Même Christian Jeanpierre s'énerve et se met à avoir des opinions ("Le spectacle de l'équipe de France, il est nul!"). Les Bleus vont vider leur marigot, les autres refont le football français en réclamant que du passé, on fasse table rase. Le gouvernement, fidèle à sa devise "un fait-divers = une loi", annonce une réforme du fonctionnement des fédérations sportives et l'organisation d'États généraux du football. Rama Yade est venue prendre sa revanche au JT de France 2, où elle n'a pas craint de se frotter avec ses propres records de démagogie (1). L'Équipe célèbre la défaite des Bleus comme une victoire intellectuelle. Lizarazu veut des têtes, Pires n'en finit pas de dire qu'il avait raison, Larqué jubile, Dugarry exulte...

Dans le lot, plusieurs anciens de 98 réclament des fauteuils près de la fenêtre au sein de la Fédération, certains ayant fait acte de candidature sans douter une seconde de leurs capacités: "Je crois que dans les bureaux de la Fédé, y a besoin de faire un grand nettoyage. Comme disait Fabien, peut-être mettre des gens qui y connaissent kekchose aux football. Donc moi je me propose pour aider ces gens-là (...) J'espère qu'il y aura d'autres compagnons de jeu qui viendront parce qu'on a besoin de laisser le football aux connaisseurs". Franck Lebœuf nous dit en substance qu'il n'a trop rien fait depuis sa retraite sportive et qu'il est temps de récompenser ses immenses mérites.

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La curée, et après ?

L'évocation du postulant ci-dessus devrait suffire à nous inquiéter quant à l'avenir de la Fédération et de l'équipe de France: il s'agit de ne pas faire pire. Et si les responsabilités fédérales sont évidentes, les partisans de la table rase vont devenir dangereux s'ils l'emportent. À les entendre, tout serait à jeter ou à révolutionner: l'organisation de l'équipe de France, mais aussi les structures fédérales et même le système de formation... Mais on n'a pas aperçu l'ombre d'un programme ou d'un projet, ou même d'une idée directrice. Nos entrepreneurs en démolition n'assurent pas le SAV. "Ce n'est pas parce vous brûlez toute la fédération sur le bûcher de la déception qu'on va commencer à faire de bonnes passes sur un terrain", a pourtant souligné Arsène Wenger au soir de l'élimination...

Les enjeux dépassent en effet les seuls atermoiements de l'équipe de France: ils concernent l'ensemble des disciplines sportives et du sport amateur. Au nom d'un fiasco de l'élite footballistique, faut-il remettre en cause tout l'édifice? Si la formation "à la française" est en crise, ce qui reste à établir, faut-il réellement la bazarder? D'autre part, la sélection nationale n'a pas vocation à vivre en "autarcie", selon le reproche qui lui a été adressé, mais il faut tout de même garantir l'indépendance de son staff en évitant qu'il soit le jouet d'influences ou d'ingérences permanentes.



Les calculs des pros

Derrière ces grandes manœuvres se profilent bien des intérêts qui ne recoupent que de loin ceux des Bleus. Ainsi, l'idée de "professionnaliser" les structures de l'équipe de France (2) dissimule-t-elle la volonté du foot pro de reprendre la main sur elle: à chaque fois que la sélection a connu des difficultés, le secteur a avancé ses pions pour imposer sa tutelle, en 2002, 2004 et 2008 – sans grand succès jusqu'à présent. Déjà, on se demande quelle peut bien être la légitimité de dirigeants qui, tels un Gervais Martel très en vue en ce moment, ne brillent que rarement par le brio de leur gestion sportive et économique (3).

Surtout, on a pu constater au cours des quinze dernières années à quel point les intérêts des sélections et ceux des clubs étaient divergents (4). Alors faut-il vraiment placer l'équipe de France sous leur égide en les laissant profiter de la faiblesse institutionnelle actuelle de la Fédération? Faut-il donner raison à une vindicte contre la DTN qui a le goût d'une revanche contre les années Jacquet? Laisser agir ceux qui, au prétexte de sauver l'institution, pourraient en profiter pour l'affaiblir un peu plus? À la fin des années 80, la création d'un poste de "superintendant" de l'équipe de France, occupé par le président girondin Claude Bez, avait coïncidé avec une phase sportive désastreuse... Hélas, le football français n'a pas de mémoire.

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La feuille Blanc

Au moins a-t-il désormais un sélectionneur dont le mandat s'inscrira sous le signe du renouveau. Les conditions dans lesquelles Laurent Blanc prendra ses fonctions sont cependant incertaines. Il peut déjà souffrir de la probable instabilité institutionnelle au sein de la Fédération et du retard de la mise en place d'une nouvelle organisation de la sélection. Les conséquences sur les joueurs eux-mêmes sont elles aussi imprévisibles, entre les traumatismes personnels, les ressentiments mutuels et l'éventualité que certains ne soient plus "sélectionnables" après enquête et sanctions explicites ou implicites.

En revanche, il va bénéficier d'une indulgence inversement proportionnelle a celle dont pâtissait son prédécesseur, qui devrait être encore accusé de tous les maux du football français durant une dizaine d'années. Blanc aura toutes les excuses, au nom de "l'héritage" et du "champ de ruines" dont il aura entrepris la reconstruction. De surcroît, les pires détracteurs de Domenech sont ses amis personnels et ils occupent des positions de force médiatiques (5).

Au-delà de ce cénacle et de ces considérations, Laurent Blanc jouit d'un crédit qui ne pourra pas être dilapidé du jour au lendemain, et surtout il a le profil pour réussir: réjouissons-nous donc du retour d'un peu de sérénité autour des Bleus. Toutefois, après avoir incarné durant deux ans l'antithèse de Raymond Domenech, il devra prendre garde à ne pas trop détromper cette image idéale: les attentes ne vont pas être très élevées pour son équipe, mais lui-même devra honorer l'estime dont il bénéficie. On lui souhaite surtout de pouvoir travailler dans les meilleures conditions possibles: l'été très agité qui commence en décidera.


(1) "Comment se fait-il que des joueurs de football dont certains gagnent 900.000 euros par mois passent devant des supporters français qui ont fait des milliers de kilomètres jusqu'en Afrique du Sud pour venir les voir, ou même simple un signe de leur part et qu'ils ne reçoivent qu'indifférence?" Et encore, vous échappez à l'image de sa mine compassée et à son interprétation mélodramatique.
(2) Bixente Lizarazu a résumé ce désir d'assimiler le management des sélections à celui des clubs: "La Fédération et l'équipe de France doivent être gérées de manière très professionnelle, comme c'est le cas dans les grands clubs à l'étranger".
(3) Jean-Michel Aulas serait légitime de ce point de vue, mais l'objectif de rendre la sélection nationale plus sympathique le rend inéligible.
(4) Sur les calendriers, les conditions de libération et des internationaux ou l'indemnisation pour leur mise à disposition.
(5) S'il n'y avait que l'intérêt scientifique de l'expérience en jeu, on serait curieux de voir quels trésors de mauvaise foi ils devraient déployer en sens inverse sen cas de difficultés pour la sélection.

Réactions

  • Tonton Danijel le 24/06/2010 à 12h57
    "Les enjeux dépassent en effet les seuls atermoiements de l'équipe de France: ils concernent l'ensemble des disciplines sportives et du sport amateur."

    Bonne remarque dans cet excellent article, je me demande quel peut être l'impact de ce foutoir sur les autres fédérations sportives.

    Parce que le hockey ne va pas trop mal (depuis qu'ils ont leur propre fédération), le basket et le volley ça se passe plutôt bien, le rugby sort d'une belle saison, et le hand, n'en parlons pas! Pour quoi la fédération du foot serait la seule à couiner???

  • Gone n' Rosette le 24/06/2010 à 13h09
    J'étais un peu jeune à l'époque, mais quelles ont été les réactions quand Platini est devenu sélectionneur. Il arrive certes avec une aura exceptionnelle, mais combien de temps cela a-t-il duré ?
    Peut-on s'imaginer que Blanc sera conspué dès le 2ème match nul d'affilé ?

    Je doute réellement de la liberté de Blanc, et du blanc seing que semble lui être signé.

  • emink le 24/06/2010 à 13h14
    Décidément, je suis bluffé à chaque fois que je lis un article dans lequel je me retrouve autant. C'est encore le cas. Tant de recul et de lucidité dans le grand b..del ambiant, bravo, et surtout merci. A transmettre à toutes les rédactions en proie à la démagogie, la surenchère, la soif du sang et la chasse au scoop. J'ai bien peur qu'on n'en soit qu'au début, et que le feuilleton de l'été soit le grand stade des bassesses humaines. Il n'est pas encore l'heure qu'on reparle de foot en parlant de l'équipe de France (d'habitude, je mets un E à équipe de France, mais là, non, pas tout de suite, c'est trop tôt).
    Vous ai-je dit ma fierté d'être de ce forum ? Non ? Eh bien voilà, c'est fait.

  • Raymundo Menech le 24/06/2010 à 13h18
    G&R,
    Platini nous avait fait une « spéciale » assez prodigieuse : qualif pour l’Euro avec 10 victoires en 10 matchs, statut de favori, sorti de l’Euro 92 au premier tour avec 2 points, et je me souviens de Platini faisant allusion à des problèmes de discipline dans le groupe pendant le stage de préparation. Donc très bon départ et chute inattendue.

  • Tonton Danijel le 24/06/2010 à 13h19
    Gone n' Rosette
    jeudi 24 juin 2010 - 13h09
    J'étais un peu jeune à l'époque, mais quelles ont été les réactions quand Platini est devenu sélectionneur. Il arrive certes avec une aura exceptionnelle, mais combien de temps cela a-t-il duré ?
    -----------

    Jusqu'à la fin de son mandat je dirais. Même les 6 derniers mois avec quelques défaites inquiétantes (Angleterre, Suisse) et un Euro désastreux ne l'ont pas trop exposé. D'ailleurs, quand on voit ce qu'il est devenu, ce n'est pas une expérience qui a ralenti sa carrière, ou si peu.

  • nonosmc le 24/06/2010 à 13h44
    Je sais plus trop quel consultant made in France 98 a taclé la DTN pour manque de vision de long terme sur la formation des jeunes : en gros, il s'agissait de dire qu'en France, on ne produit plus que des milieux défs à gros volume de jeu, mais sans trop de technique ni de vision.
    D'où, supposément, nos problèmes de créativité.

  • Cantona rien à dire le 24/06/2010 à 13h46
    Un énorme +1 avec emink. Les CdF et le forum est le seul endroit où je viens suivre l'actualité footballistique.

    Et la note (3) m'a juste fait exploser de rire

  • Apollo Creed le 24/06/2010 à 14h07
    nonosmc : j'ai également été marquée par cette intervention (de qui ? mystère, ça ne me revient pas) ; j'ai surtout trouvé le propos curieux, très curieux. Peut-être avait-il raison mais à quelle génération pensait-il en disant cela ? Si l'on prend la prochaine génération destinée à intégrer l'EdF, 1987 nous donne Benzema, Ben Arfa, Nasri, Gameiro, etc. Techniquement parlant, euh, ça fonctionne, non ? Même en considérant Abou Diaby (1986) et Lassana Diarra (1985), techniquement, c'est du très lourd (à leur poste).

  • Apollo Creed le 24/06/2010 à 14h09
    Pfff... à force de vouloir tout accorder, je finis par m'inventer une féminité.
    > *j'ai également été marqué

  • gurney le 24/06/2010 à 14h10
    Par rapport à la note 3) sur jean michel Aulas, je suis pas sur que ça s'applique à l'équipe de france.
    Aulas est maître chez lui. Les lyonnais le bénissent avec l'ol, je vois pas pourquoi les français ne feraient pas de même si il était à la tête de l'edf et faisait le même boulot.
    Sachant que la part sombre de Aulas (ses sorties médiatiques), je suis pas sur qu'elle prendrait à l'étranger. Est ce qu'on entend beaucoup les présidents de fédérations étrangères? Je crois que je serais incapable d'en citer un seul!

    Et par rapport à Domenech, je pense qu'on pourrait faire un parallèle avec Puel. D'ailleurs c'est ce dernier qui s'en est chargé, en déclarant que ce qui est arrivé à Domenech, ça aurait très bien pu lui arriver à lui si Aulas avait pas été là pour le défendre, allumer des contres-feux.

    Je pense que si Aulas avait été un espèce de président-manager juste au dessus de domenech depuis le début, jamais ça serait partie en cacahuètes comme ça, et je me demande même si on serait pas encore qualifié à l'heure qu'il est.

    Sinon d'accord avec tout le reste, et pour finir sur Aulas, je pense pas que le job le tente plus que ça.

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