La Gazette, numéro 60
Poker mortel à Marseille
Alors que le malade est traversé de convulsions, tout le monde se bouscule pour livrer son diagnostic au chevet de l'OM. Courbis, Olmeta, Goethals défilent sur les chaînes sportives pour donner un avis autorisé. Le premier pour dire que c'est difficile d'être entraîneur, le dernier pour dire qu'avant, c'était pas pareil. Celui du milieu, on n'a pas bien compris.
Mardi, France Football se fendait d'un de ces articles dont l'hebdomadaire a le secret (voir Vestiaire Story), narrant par le menu des faits et gestes tellement rocambolesques qu'il est difficile d'y croire totalement. Ils sont pourtant tellement énormes et si peu démentis qu'on se dit que le football professionnel ressemble parfois à un mauvais polar écrit par des scénaristes amateurs. On a beau être inquiet, il est difficile d'avoir autant d'imagination.
La partie de poker continue, les cartes sont abattues dans tous les médias disponibles (et ils le sont pour profiter du cirque) par les deux protagonistes qui font assaut de bonne foi. Le directeur financier en est presque à couvrir son responsable sportif, niant toutes les malversations suggérées par FF et prenant la défense de certains des gros bras de Tapie (La Provence, 07/09). Il y va aussi de la crédibilité de Dubiton, qui est censé préserver le club de telles dérives, et qui s'est retrouvé sur la sellette au moment où il pensait que son rival l'y devancerait… Il propose même de travailler avec Tapie, assurant en être parfaitement capable. Ce n'est peut-être pas une mauvaise idée, compte tenu de l'urgence des dossiers, comme ceux du quota d'extra-communautaires et des contrats en stand-by. Sans parler de la gestion du championnat de France.
Chacun essaie en fait de montrer patte plus blanche que l'autre, dans l'espoir d'emporter le morceau auprès de RLD, dont le silence est aussi assourdissant que d'habitude. L'actionnaire peut-il se résoudre à choisir entre les deux prétendants, en a-t-il l'ombre d'une intention? Les spéculations sur Louis-Dreyfus (un imbécile parfait pour les uns, un Machiavel achevé pour les autres) ne sont pas près de cesser.
Privés de Coupe ?
Alors que les nations se qualifient les unes après les autres pour la Coupe du monde, on s'aperçoit que le problème de la retransmission de la compétition sur les chaînes françaises n'est toujours pas réglé. Alors que les télévisions allemandes et espagnoles ont cédé aux exigences financière de Kirch, aucun accord n'est en vue pour nous autres. La menace d'une non-retransmission au moins partielle plane donc encore, même si l'on se doute qu'un accord minimum devrait être conclu pour les matches des Bleus, quitte à faire intervenir la force de dissuasion nucléaire et le Charles-de-Gaulle. Par contre, le spectre d'une offre payante plus importante que prévu se rapproche (voir La Coupe du monde en morceaux).
La négociation tombe assez mal, dans une période où la surenchère des dernières années a quelque peu échaudé les chaînes, moins sûres de rentrer dans des investissement de plus en plus pharaoniques. La perspective du décalage horaire (dont on a pu estimer l'impact à l'occasion de la Coupe des confédérations) n'est pas de nature à les motiver. Mais en face, il y a une redoutable force de chantage, rodée aux négociations les plus terribles et forte de ses précédents succès en Europe. L'Italie et le Royaume-Uni sont dans le même cas que la France. Outre-Manche, Kirch a même accusé ITV et la BBC d'agir en cartel pour avoir groupé leur offre, tandis que la Belgique et la Suisse ont annoncé leur décision de ne pas diffuser la compétition mondiale (La Tribune, 22/08).
On n'a pas fini de se demander pourquoi la FIFA a sous-traité l'exploitation des droits de ses compétitions. Elle se retrouve maintenant dans l'impossibilité d'intervenir dans les négociations, avec la faillite d'ISL-ISMM sur les bras et une Europe soumise au chantage des ayant droits. Le football restera-t-il universel si sa diffusion ne l'est plus ?