La Gazette, numéro 29
Tranferts: dans le mur ou dans l'inconnu?
Alors que le rendez-vous décisif avec la Commission européenne se profile le 16 février, la famille du football accroît ses déchirures sans parvenir à ce projet consensuel qu'elle pourrait raisonnablement défendre à Bruxelles, en échappant à une révolution trop brutale.
Un premier report de cette réunion avait déjà eu lieu le mois dernier, devant l'ampleur des différends entre les deux confédérations (voir Réforme des transferts : discorde UEFA/FIFA, le 18/01). Les clubs avaient en effet pesé pour que la FIFA, accusée de trop transiger, adopte une position plus dure à l'égard de la Commission et des représentants des joueurs. Ceux-ci, sachant que les commissaires étaient plus proches de leurs positions, refusent de céder sur les deux derniers points d'achoppement du projet de réforme: la résiliation unilatérale des contrats et leur durée minimum.
Alors que la Commission se faisait plus pressante, réclamant une "rencontre au sommet" (acceptée puis annulée) avec tous les acteurs de la négociation et regrettant le blocage actuel, l'UEFA et la FIFA ont donc ouvert les débats, multiplié les réunions et les consultations, afin que leur task force commune puisse présenter un programme commun validé par tous. Cette manœuvre de conciliation a semble-t-il aggravé la discorde.
L'UEFA a commencé par ouvrir la porte au G14 et à lui réserver une place de choix autour de la table, alors qu'il y a encore quelques semaines il était hors de question pour elle de reconnaître cette association. Le lobby des riches confédérés a évidemment pris la parole au nom de tous les clubs, alors même qu'ils n'en représentent que la minorité la plus puissante.
Ensuite, les deux confédérations se sont effacées pour laisser les représentants des joueurs (FIFPro) et ceux des clubs (G14 et délégués des Ligues) discuter directement. Il n'en est ressorti que le constat d'un irréductible désaccord, la FIFPro ayant claqué la porte, accusant le G14 d'avoir "débarqué à Zurich sans connaître le dossier et avec des exigences démesurées". Le jusqu'auboutisme des clubs risque de coûtter cher, connaissant leurs menaces de faire basculer le dossier dans une guérilla juridique contre Bruxelles, avec un intense lobbying politique.
Sur ce flanc, le football professionnel a reçu le soutien de la présidence suédoise de l'UE, qui a affirmé vouloir résoudre le problème durant son mandat. Mais cela ne suffira pas à rapprocher des points de vue aussi radicalement opposés.
Le Calcio des faux passeports
En Italie les juges d'instruction ont ouvert plusieurs enquêtes sur des falsifications de passeports ou l'obtention frauduleuse de nationalités. L'ampleur de la crise n'est pas négligeable, au vu des clubs et des joueurs impliqués: Lazio, Milan AC, Inter, Parme, Roma, Naples, Udinese et Bari; Chamot, Aldaïr, Cafu, Amoroso, Almeyda, Zanetti pour ne mentionner qu'eux (vingt-quatre joueurs sont concernés). D'autres affaires sont instruites depuis plus longtemps ou sont d'ores et déjà devant les tribunaux, comme celles concernant Dida, Veron, Recoba, Warley ou Alberto (la découverte des faux passeports portugais de ces deux Brésiliens de l'Udinese avait déclenché les investigations).
Chez nos voisins, la justice sportive attend les conclusions de la justice civile avant de se prononcer. L'inconvénient est la longueur des procédures et la validation par défaut des résultats obtenus; l'avantage que les instances sportives sanctionnent en connaissance de cause et s'évitent de terribles erreurs. On imagine le cataclysme si des fraudes nombreuses sont révélées, comme cela devrait se produire. Faudra-t-il remettre en cause les résultats du championnat en cours, mais aussi du précédent? Les homologues italiennes de nos Commissions juridique et d'appel vont avoir de terribles responsabilités, et seront confrontées à des dilemmes pas moins difficiles que les nôtres.
Ajoutons que par ricochet, l'Espagne est concernée par les révélations actuelles: trois Argentins munis de passeports italiens douteux sont sous contrat avec l'Espanyol Barcelone et le FC Valence (AFP 06/02). Le séisme sera européen ou ne sera pas.