La Gazette, numéro 14
7 d'un coup, ça fait toujours plaisir
Que l'on ait ou nom des penchants coupables pour le PSG, la victoire spectaculaire contre Rosenborg a quelque chose de parfaitement jubilatoire, et ouvre une semaine pour laquelle on se prend à rêver de carton plein pour les équipes françaises engagées en coupes européennes. La précédente avait été effectivement bien triste, mais le déferlement de constats désolés et de nouvelles condamnations des clubs français qui avait suivi nous avait proprement exaspérés.
La statistique tout-terrain devient réellement envahissante dans le monde du journalisme sportif, que ce soit sur les télévisions ou dans la presse, et chacun y va de son infographie, de son chiffre-clé ou de son pourcentage magique. On a pu voir ainsi des bilans tirés au bout de quatre journées de Ligue des champions, avec histogrammes à l'appui et comparatifs accablants. Quelle validité peuvent bien avoir des résultats obtenus avec une série statistique aussi courte? Peu importe, ça remplit les pages, nourrit les commentaires et tout sera oublié à la prochaine édition. Les spécialistes du foot sont recordmen de la production de contrevérités et de conclusions hâtives, vite recouverts d'une nouvelle couche. Au moins, dans les Cahiers, il est possible d'aller voir les conneries écrites dans un passé plus ou moins lointain... Allez donc rechercher les articles de L'Equipe du mois dernier! Ou ceux de 98...
Tout ça pour dire qu'ils ne sont pas si mauvais nos clubs français. Un 7-2 dans les résultats de Ligue des champions, c'est une ligne remarquée dans toute l'Europe. Bien sûr, Rosenborg, reconnu comme très fort la veille sera tout à coup déconsidéré, et on arguera à juste titre de l'absence de Hoftun, qui a considérablement affaibli la défense... On ne suivra pas un Laurent Perpère onaniste qui voit la "naissance d'un grand club", mais est-ce bien le moment de bouder son plaisir?
les plans de Bergeroo
Plutôt celui de goûter un match qui ressemblait enfin à une coupe d'Europe. Mieux organisés, les Parisiens sont montés d'un régime et leurs individualités ont eu leur plein rendement. En associant Déhu et Luccin, Bergeroo aimerait régler le débat sur l'organisation de son équipe. Cette doublette de milieux défensifs offre potentiellement un compromis idéal entre assurances défensives et capacité de relance et de construction. Si elle trouve les bons réglages, la nécessité d'un meneur axial deviendra nettement moins évidente. Le Basque ne semble d'ailleurs pas très fan de Benarbia (qui supporte mal l'ombre) ni d'Okocha (dont il se demandait en avril 99 s'il devait le faire jouer demi de mêlée). Il est également résolu à imposer l'autre paire, celle de Christian et Anelka dont la prestation ce mardi a pu convaincre les dubitatifs. Le jour où Robert connaîtra un passage à vide, il suffira que Dalmat hausse son niveau pour rééquilibrer l'ensemble. Voilà à quoi pourrait ressembler l'ossature du PSG et son 4-4-2, tels que les envisage Bergeroo, abstraction faite des aléas de la rotation ou des blessures.
Le filet à (gros) poissons est-il troué?
La route reste longue pour Paris en LdC, et incertaine: à voir la liste des clubs qualifiés pour la seconde phase, ce ne sera pas la peine d'espérer une poule clémente. À la veille de la dernière journée, il est plus surprenant de constater le nombre de clubs huppés en mauvaise position: la Juventus, Barcelone, et même Manchester sont en ballottage défavorable. Après l'éviction de l'Inter par Helsingborg au tour préliminaire, il semble que le couperet tombe aussi sur les gros. La Ligue des champions est donc mal verrouillée? Voilà qui ne va pas dissuader le G14 de mettre en place une ligue privée et auto-qualifiante.
un coup de tête et de Trafalgar
Deux ans après un écart fatal contre l'Arabie Saoudite au Mondial 98, Zidane a malheureusement récidivé avec un coup de tête qu'il va payer cher, peut-être même d'un ballon d'or. On pourra épiloguer sur les provocateurs auquel le meneur doit s'affronter (remember Wise), un tel geste appelle logiquement sa sanction. Le terrain de foot a ceci de particulier qu'on ne peut s'y défendre contre les agressions dont on est victime. Et ça doit être bien difficile de se retenir. Vous y arriveriez?
Dommage que l'incident survienne au moment où l'image du Turinois était à son zénith. Il faut dire qu'elle était peut-être devenue un peu trop lisse... Il survivra.
la peur du Vélodrome
L'article de Clément (Marseille sans terre) a suscité un intéressant échange, avec de belles contributions comme d'habitude, mais on ne peut que constater la tendance du débat à tourner aux comparatifs Paris/Marseille. Bravo pour la retenue des propos, mais décrochez un peu bon sang! L'OM et le PSG sont deux fascinants sujets de discussion, mais qu'il vaut mieux séparer strictement.
Toujours est-il que, comme prévu, la situation tourne au saumâtre. Les supporters précisent leurs menaces. Les Yankees sont finalement revenus sur leur annulation du déplacement à Strasbourg, mais ils préviennent, par la voix de Lionel Tonini leur président, qu'en cas de contre-performance à Strasbourg, "ça risque d'être chaud", que les joueurs, "incapables de se faire respecter", "devront nous rendre des comptes" (AFP 23/10/00). L'annonce de ce boycott a pris une importance disproportionnée, jusqu'à apparaître au 20 heures de TF1, et témoigne d'abord de l'émergence d'un nouveau pouvoir par le biais des associations et de certains de leurs leaders, très médiatiques. Mais on voit aussi les voyeurs professionnels s'approcher de l'endroit probable du drame: les parkings du stade et de la Commanderie sont plus que jamais sous surveillance vidéo... A force d'espérer de tels événements, les médias vont finir par les organiser...
En écho, les joueurs se sont inquiétés de l'atmosphère très négative générée par la violente pression des supporters, qui avait déjà fait de graves dégâts matériels et psychologiques la saison passée. Dans La Provence du 24 octobre, Maurice s'inquiète du "blocage" ressenti par les Olympiens devant leur public. Issa, pris pour cible, est plus blessé qu'il ne veut l'admettre: "Vous savez, il me semble n'avoir jamais triché avec l'OM. J'ai été formé ici et j'ai toujours tout donné pour ce maillot. Je suis un Olympien dans l'âme. Maintenant, si les gens continuent à me siffler mais que l'équipe gagne, ce n'est pas grave". Trevisan est plus explicite: "Il ne faudrait surtout pas que l'on ait peur de jouer au Vélodrome. Comme ce fut le cas la saison dernière, sinon nous vivrons une année-catastrophe".
Le décor est posé, les caméras sont place, les acteurs ont le trac et les figurants ont même été recrutés: le club a renforcé son personnel de sécurité... Dans les jours qui viennent, les supporters marseillais peuvent ruiner définitivement leur image déjà contestée de "meilleur public de France", et précipiter leur club dans un gouffre dont ils ne pourront le sortir. Pour quel bénéfice?