La Gazette : 19e journée
L'OL chute, mais son maintien est assuré. À mi-saison et à l'aide du classement en relief, tirons les bilans avec autant d'entrain que l'on tire sur les arbitres...
Auteur : Le Feuilleton de la L1
le 21 Dec 2005
L'OL a attendu Noël pour nous faire le cadeau d'une première défaite qui nourrira la trêve de rêves d'écroulement (sous le poids conjoint des ego, des compliments et de la paranoïa présidentielle). À l'image d'Auxerre et de Bordeaux, ses poursuivants n'ont toutefois pas osé léser sa majesté au point de se rapprocher du trône de plus d'une marche. Douze points d'avance, c'est le pécule lyonnais à mi-parcours. On en oublierait presque qu'avec 44 points, le club de Juninho a assuré son maintien.
Le hasard (ou la logique?) nous offre un classement qui a l'air de vouloir nous dire quelque chose. Les sept premières places sont en effet réservées aux grosses écuries. La première ligne du peloton propose Lens Bordeaux et Auxerre, outsiders qui ont bien négocié leur demi-saison. Juste derrière, une fameuse brochette de vieilles gloires, avec Monaco, Paris et Marseille qui présentent le même bilan de neuf victoires, quatre nuls et six défaites... Ce n'est pas non plus un hasard si Lille (dauphin 2005) et Saint-Étienne (prix du public) les talonnent, décrochant le reste de la troupe.
Rennes, à la dixième place, figure dans la première partie du "placement", mais dans la seconde du classement en relief. Pour les Bretons, c'est la victoire ou la mort, puisqu'ils ne comptent que deux matches nuls (comme l'AJA, d'ailleurs). Le bas-ventre mou regroupe les déçus de la L1 (Nantes, Nice, Toulouse, Sochaux) mais aussi les heureux de la L2: Le Mans, Nancy et Troyes font de très honorables promus...
Le parcours des néophytes de l'élite plombe d'autant plus le destin du trio de fin, comme si le seul suspens résiduel de ce championnat ne devait être que celui des qualifications européennes…
Les résultats de la journée
Lens-Le Mans : 2-0
Troyes-Sochaux : 2-1
Monaco-Toulouse : 1-0
Metz-Nice : 1-0
Ajaccio-Paris SG : 1-1
Bordeaux-Nantes : 0-0
Lyon-Lille : 1-3
Auxerre-Nancy : 0-1
Strasbourg-Marseille : 0-1
Rennes-Saint-Étienne : 0-1
Si vous avez raté le début...
Un exil au Qatar vous a empêché de suivre la première moitié de la saison? Peu importe: les Cahiers du football vous en résument les faits essentiels. En fait, tout a failli être absolument parfait: forts des 600 millions annuels distribués par Canal+, tous les clubs ont mené des recrutements intelligents, établi la paix des braves au sein des staffs et intimé à leurs entraîneurs d'impulser des choix tactiques ambitieux pour ravir des stades combles et enthousiastes (les Ultras abandonnant eux-mêmes des revendications dont ils mesurèrent rapidement l'inanité). Tout était donc réuni pour que la Ligue 1 obtienne un lustre capable d'éclipser la Premier League ou la Liga jusqu'aux marchés reculés de l'extrême-Orient.
Mais voilà, un ignoble complot a mis à bas ce plan parfait. Issu des bas-fonds du football professionnel national, il fut le fait d'un lumpenprolétariat qui a mobilisé un pouvoir de nuisance que la nouvelle oligarchie de la discipline a négligemment oublié de lui retirer. Le corps arbitral – car c'est bien de lui qu'il s'agit – composé d'attardés consanguins issus des couches les plus fangeuses de la société, ultimes résidus d'une époque honteuse qui ne devrait plus avoir court, a en effet entrepris un travail de démolition qui a malheureusement porté ses fruits. Rendez-vous compte du scandale : sans les erreurs arbitrales, tous les clubs figureraient aujourd'hui dans la première partie du tableau! L'OL compterait 51 points, le génie des entraîneurs français serait pleinement reconnu et la concorde régnerait partout sur nos vertes pelouses, avec des vaincus reconnaissant leur infériorité en jetant un simple regard au tableau d'affichage, résultante pure et incontestable de la confrontation des forces en présence.
Heureusement, nos instances ont vaillamment entrepris, sous la houlette d'un Frédéric Thiriez plus visionnaire que jamais, une lutte sans merci qui devrait bientôt mettre un terme à cet effroyable gâchis en éliminant toute forme d'incompétence. "Jamais un coup de dés n'abolira le hasard?" Remballez vos certitudes, Monsieur Mallarmé! Plusieurs pistes sont en effet envisagées pour les lendemains enchantés de l'éradication de l'arbitrage humain : l'issue des matches pourrait être confiée à Canal+, qui l'aurait bien mérité, ou bien à un logiciel directement issu des jeux de type "LFP Manager" (dans lesquels les matches se déroulent automatiquement sans intervention humaine ni perturbation par des aléas extérieurs aux données économico-tactiques). Il sera grand temps.
Diapason toulousain
Olivier Sadran, le plus jeune président de Ligue 1 – et accessoirement celui de Toulouse –, n’a qu’un rêve: marcher sur les traces de Jean-Michel Aulas. De TFC Coiffure au discours sur la rentabilité de l’entreprise football, le jeune homme est bien dans le rôle. Et au soir de la défaite de ses couleurs face à Monaco, il s’est même essayé à une imitation criante de vérité : "Il y a un gros problème dans l'arbitrage. Soit on frôle l'incompétence - et les images tendent à le prouver -, auquel cas ce n'est pas très grave car on formera des jeunes (...), soit il y a un problème avec toute la pression autour". Ah, la redoutable pression du stade Louis II les soirs de match contre Toulouse… Monsieur Lhermite n’y aurait pas résisté, accordant notamment (et surtout) un penalty aux locaux, à neuf minutes de la fin, après une faute, il est vrai peu évidente, de Dominique Arribagé sur Emmanuel Adebayor. Olivier Kapo s'était chargé de le transformer.
Le bourrichon tout remonté, voilà donc celui que l’on présente comme le président du futur qui prend des accents jospiniens : "Ce qui est arrivé est très triste et me donne envie d'arrêter le football. Je me pose des questions sur ma légitimité et sur ma continuité dans le football". Va-t-il en tirer la conclusion qui s’impose? "Si je reste dans le foot, je continuerai à me battre pour donner des moyens modernes [à l'arbitrage, NDLR]. C'est fou de travailler dans les mêmes conditions qu'il y a cinquante ans". La mine triste et grave, il conclut : "Ce qui arrivé ce soir, est dommageable pour le foot, pour les joueurs et la pérennité de la compétition. La conclusion a été ridicule. Là, on atteint la préhistoire".
La veille, Jean-Michel Aulas, défait pour la première fois de la saison par Lille : "je crois que les arbitres doivent se hisser au niveau des joueurs, se montrer moins présent car les vedettes sont toujours les joueurs et éviter de se tromper de manière successive. M. Duhamel n'a vraiment pas de chance avec Lyon. Les arbitres peuvent se tromper. Il ne faut pas que ce soit toujours dans le même sens". Étonnant non?
I got the pelouse
On ne connaît donc que trop bien l'habituelle excuse de l'arbitrage pour expliquer une défaite. À Bordeaux, on a innové : pour justifier la faible qualité du jeu des Girondins depuis maintenant deux mois, dirigeants (à défaut d'un Ricardo toujours très droit) et joueurs évoquent régulièrement le piètre état du terrain. Ces derniers sont d'ailleurs bien aidés par L'Équipe, qui proposait un article sur le sujet dans son édition de samedi, reprise par tous les acteurs du milieu dans la foulée, jusqu'à Gérard Houllier, déclarant dans Jour de foot que "Tout est bon à Bordeaux, sauf la pelouse".
Pourtant, si cette dernière est effectivement à peine digne de celle d'un club de promotion d'honneur, on ne peut réduire les faibles prestations de l'équipe marine et blanc à ce seul phénomène botanique. Car malgré une troisième place à laquelle le club s'accroche depuis quelques semaines maintenant, Bordeaux n'est pas bon. Y compris à l'extérieur: en dépit de résultats bruts probants, le club enchaîne les matches ternes, multiplie les 0-0 et les victoires par la plus petite des marges, mettant en évidence la faible attaque du club (17 buts seulement en 19 journées), un problème récurrent à Bordeaux depuis maintenant trois ans.
En fait, hormis une très bonne période vécue au mois de septembre avec des matches pleins contre Lyon, Lens ou Rennes, les Girondins semblent caler sérieusement, ce qui prépare peut-être un tableau retour difficile, un peu à l'image de la saison passée. Et pas seulement à cause de leur gazon maudit...
La statistique à la rescousse de la force de vente
Dimanche, sur le plateau de Téléfoot, Pierre Blayau avançait, en plus de la qualité du jeu aléatoire de son équipe, un argument massue pour justifier son entreprise de déstabilisation de Laurent Fournier : sur les quatre premières journées de la saison, le PSG avait engrangé 10 des 12 points possibles... On flirtait donc avec les 100% de réussite, pouvait apprécier le téléspectateur. La tendance, poursuivait-il, aura été beaucoup moins flatteuse ensuite : 21 points sur 45... Coup de mou dans l’ascension, même si le club se retrouve aujourd’hui à un point des deuxièmes.
L'amateur de boniments pouvait déjà apprécier la comparaison d'une période qui pesait un cinquième de la demi-saison avec son complément lourd des quatre autres cinquièmes... Il pouvait aussi noter que si le PSG n'avait pas eu le loisir de rencontrer les actuels deux derniers du championnat lors de ces quatre fameux premiers matches de la saison, ses adversaires (Metz, Sochaux, Toulouse et Troyes) figurent entre la 14e et la 18e place à l'issue des matchs aller... Des concurrents comme les aiment un grand club européen : à la limite du gruppetto. Pas comme ces gagne-petit acharnés du ventre mou qui rechignent à donner des points et ont rogné une bonne part du capital parisien...
Il faudrait voir à réformer tout ça… Ce qui pourrait vraiment rassurer les actionnaires du PSG, ce serait un championnat où les quelques clubs reconnus comme en droit d'entamer la quête d’une place qualificative pour la ligue des Champions ne rencontreraient que les cinq derniers du classement, histoire de soigner leur compteur et de se faire en douceur la belle européenne. Reste à en glisser deux mots aux spectateurs, ceux qui ne se déplacent pas que pour les abonnements "Ligue des champions".