La Gazette : 15e journée
Pôris est môgique : le PSG réussit à faire se retourner les vestes comme par enchantement. Les Monégasques, eux, donnent dans l'artisanat à la mode Guidolin, et ça marche. Et le classement en relief remet tout le monde dans le bon ordre.
Auteur : Le Feuilleton de la L1
le 23 Nov 2005
L'OL augmente l'écart sur son premier poursuivant, qui est désormais le PSG, pour deux buts marqués à Lescure permettant aux Parisiens de devancer les Girondins – les deux adversaires de dimanche se situant tous deux sur la ligne des 27 points.
Auxerre voit sa différence de but redevenir positive, signe que la déroute de Bollaert est effacée. Surtout, l'AJA se repositionne un peu plus comme un prétendant européen qui peut compter sur sa régularité (même si la victoire a été difficile à arracher contre Lille), et sur l'homogénéité de son effectif.
Monaco rejoint Saint-Étienne grâce à sa victoire logique sur les Foréziens (histoire de fêter le sacre d'Albert II), les deux AS se trouvant à la tête d'un peloton central au sein duquel Rennes, Marseille et Nancy ont fait les bonnes opérations.
Derrière, on patine à qui mieux mieux, à l'exception des Sochaliens qui sont allés gagner à Ajaccio, et les positions n'évoluent pas beaucoup. Les nuls de Metz et Strasbourg donnent un semblant d'espoir à des clubs où l'actualité est assez intense hors des pelouses.
Les résultats de la journée
Rennes-Toulouse : 4-1
Auxerre-Lille : 3-2
Marseille-Nantes : 2-1
Lyon-Troyes : 2-1
Monaco-Saint-Étienne : 1-0
Nancy-Le Mans : 1-0
Strasbourg-Nice : 0-0
Lens-Metz : 0-0
Bordeaux-Paris-SG : 0-2
Ajaccio-Sochaux : 0-1
Match en retard de la 10e journée
Ajaccio-Lens : 0-0
Intronisation réussie à Monaco
Rapidement baptisé Gwendoline par des supporters monégasques amateurs d'Heroic Fantasy, Francesco Guidolin a repris les rênes de l'ASM après un intérim plutôt réussi de Jean Petit, qui avait réussi à replacer le club à portée de fusil des places européennes. Dans le contexte perturbé de la Principauté, l'entraîneur italien avait réussi son entrée en matière en battant sèchement Metz à Louis II (3-0), avant de chuter à Sochaux (2-1). Un autre 3-0 conclut la réception d'Ajaccio, mais c'est à Paris que l'on put mesurer les progrès accomplis, avec un nul (0-0) qui ne rendit pas justice à la supériorité des Rouge et Blanc ce soir-là. Enfin, le week-end dernier, les Monégasques ont dominé des Stéphanois pourtant en confiance, et pointent désormais à trois petits points de la seconde place.
Réputé pour sa culture tactique, Guidolin a procédé a de nombreux essais – testant même une défense à trois au Parc des Princes –, souvent dictés par les blessures au sein d'un effectif dont on ne sait plus s'il est victime de son staff médical ou de sa pelouse (Maicon vient de rejoindre une infirmerie où Chevanton a un lit à l'année). Ainsi, seuls Warmuz, Givet, Maicon, Bernardi et Meriem ont été systématiquement titularisés lors de ces cinq rencontres, tandis que les milieux de terrain étaient invités à faire valoir leur polyvalence: Plasil, Meriem, Kapo et Sorlin ont occupé alternativement des postes axiaux ou latéraux, Sorlin étant même à deux reprises positionné en récupérateur – comme l'avait essayé Didier Deschamps plus tôt dans la saison. Cet entrejeu à géométrie variable eut la charge d'approvisionner au mieux un attaquant de pointe qui fut successivement Adebayor, Gigliotti et Chevanton au coup d'envoi.
L'essentiel ne se situe pas tant dans ces évolutions que dans leur acceptation par un effectif qui renoue avec les ambitions. Il est vrai qu'on n'a pas encore trouvé de meilleur moyen de s'assurer la paix sociale dans un club qu'une série de bon résultats... Avec son discours humble mettant l'accent sur les vertus de l'esprit collectif, Guidolin a réussi la première partie de son pari, consistant à redonner forme et moral à cette équipe où les talents ne manquent pas. Il lui reste à atteindre l'objectif de placer l'ASM sur le podium, pour la quatrième année consécutive…
Fournier taille patron
L'heure était à l'affûtage des machettes, la semaine dernière, dans le petit monde des observateurs spécialisés: "une zone de turbulences s'ouvrirait pour l'entraîneur parisien", promettait déjà Le Parisien si la pêche girondine ne s'avérait pas plus abondante que le maigre point rapporté des déplacements successifs à Saint-Étienne, Le Mans, Marseille puis Auxerre.
Avant de remettre les compteurs à zéro, le cas échéant au soir, du 3 décembre prochain en cas de logique défaite à Gerland, les prochains jours seront placés sous le signe d'une sirupeuse réhabilitation de Laurent Fournier, promu entraîneur de la semaine par la grâce d'un remaniement tactique digne des plus illustres techniciens. Nous voici déjà contée "la grande victoire tactique de Laurent Fournier", sur le thème de "l'affirmation de Laurent Fournier qui pour une fois n'a pas hésité à trancher" (Europe Foot). On entend même parler de "la prise de pouvoir véritable de Laurent Fournier", là même où l'éventualité d'un renfort du staff technique par Vincent Guérin était jugée comme "mesure absolument insuffisante par rapport aux manques flagrants de Laurent Fournier" (On refait le Match). Et à L'Équipe, où l'inénarrable Jérôme Touboul s'est fait porter pâle, on consacre fermement la métamorphose: "Changement de tactique et changements d'hommes, l'entraîneur parisien a transformé le visage de son équipe".
Sans remettre en question la qualité du match parisien, Ricardo a constaté que "Bordeaux a raté son match (…) pas grand-chose n'a marché (…) on est passé au travers" (L'Équipe). Que serait-il advenu du concert de louanges autour de l'entraîneur parisien en cas d'opposition girondine plus consistante? Ou en cas de hors-jeu sanctionné sur le but de Yepes? On n'aurait certainement pas pardonné à Fournier d'avoir écarté "le décisif" Kalou et "l'indispensable M'Bami" du onze de départ…
Mais la victoire acquise, on préfère affirmer avec force de conviction que "Ricardo s'est fait voler la vedette par son ancien protégé Laurent Fournier" (L'Équipe), claironner que "Fournier a fini par prendre la mesure de son poste cette semaine" (On refait le Match) les rares avis moins tranchés se faisant plus discrets. En tendant l'oreille, on discernera tout de même quelques timides "On peut s'interroger si Bordeaux n'a pas un peu raté son match" ou encore "Tous les joueurs du PSG ont réussi en même temps à hisser leur niveau de jeu face à des fantômes bordelais" (Europe Foot).
Quand on sait à quoi tient le résultat d'un match de football – trois fois rien tout au plus – on peine à supporter la fière tirade de synthèse: "Ca fait plusieurs semaines qu'on dit à Fournier de laisser Kalou de côté. Au moment où il a laissé Kalou sur le banc, et bien forcément, ça a fonctionné" (Europe Foot). De grandes proclamations définitives en fonction du sens du vent, forcément ça fonctionne toujours.
Kalou a calé
Finalement, il s’est bien trouvé au moins une personne pour croire à la thèse de la fragilité de l’entraîneur parisien: Bonaventure Kalou en personne qui, remplaçant à Bordeaux, a confié à L'Équipe ses états d’âme de star blessée dans son orgueil. Expliquant qu’il avait été "recruté pour jouer", l’Ivoirien exige des explications auprès de son coach, mais aussi de Jean-Michel Moutier. Le Camp des Loges est-il si vaste qu’un joueur ne parvienne pas à y dénicher son entraîneur, et se retrouve forcé de s’adresser à lui via la presse? Plus sûrement Kalou a-t-il intégré les données de la communication actuelle, espérant qu’il ferait plus efficacement pression sur un Fournier présenté comme friable en prenant la France du foot à témoin qu’en discutant de son statut en tête-à-tête et en démontrant à l’entraînement sa capacité à prétendre de nouveau à un rôle de titulaire.
La réponse du coach, fort de son succès en terre girondine, a fusé: rappelant les valeurs essentielles de la solidarité du groupe, Fournier appelle son joueur à plus de modération… sans pour autant jouer les père fouettard comme l’avaient fait en semblables circonstances ses deux glorieux prédécesseurs sur le banc parisien. En attendant le match de Lens, dimanche, l’ancien porteur d’eau du milieu semble avoir conforté sa position autant que son fantasque numéro 15 paraît avoir fait une erreur de calcul. Mais que Fournier aligne la même équipe face aux Sang et Or, sans succès cette fois, et nul doute que la construction de son échafaud reprendra immédiatement…