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Jean-François Beltramini, le maçon devenu renard

Un soir d'août 1983, il inscrivait un quintuplé avec le FC Rouen contre l'AS Nancy- Lorraine. Un soir d'août 2014, Jean-François Beltramini nous a quittés. Légende éphémère au début des années 80, mais légende quand même.

Auteur : beltramaxi le 5 Mars 2015

 

 

[Texte d’inscription soumis par beltramaxi]

Né le 5 Janvier 1948 aux Clayes-sous-Bois, Jean-François aurait pu porter le numéro 14. Né quatorzième dans une belle équipe de seize enfants, il découvre vite les joies de la vie de groupe qu'il retrouvera plus tard comme footballeur professionnel. Son père, un maçon italien, a bien bossé.

 

Malgré des débuts footballistiques à Clayes, Mantes-la-Ville ou Versailles, c'est plutôt sur les traces paternelles que Jean-François s'engage. On ne saura jamais si les murs qu'il montait à coups de truelles tremblaient autant que les filets. Toujours est-il qu'à l'âge de bosser, il doit jouer du niveau à bulle autant que de la feinte de corps pour pouvoir se payer le 45 tours Made in Normandie de Stone et Charden, gros succès de l'année, et pas qu'en Normandie. Mais “L'amour made in Normandie”, comme dirait Stone ou Charden, c'est pour plus tard. Il a en commun avec Charden (ou Stone, je ne sais plus) une grosse tignasse brune et légèrement bouclée recouvrant les oreilles.

 

En 1973, à vingt-cinq ans déjà, Beltramini sort de deux saisons honorables avec Mantes en deuxième division quand Henri Germain, le paternaliste président du Stade de Reims, lui offre son premier contrat professionnel. Jean-François, toujours les yeux rieurs, quitte l'encombré cocon familial francilien pour la Champagne. Mais l'aventure sera courte, à l'image de sa fiche de paie, pas conforme aux promesses: zéro match, zéro but, zéro franc, et une rupture de contrat qui lui vaudra une suspension de six mois par le Groupement – l’ancêtre de la LFP.

 

Fini le ballon, retour aux chantiers pendant six mois et à la pierre de meulière, spécialité de Beltramini frères, qui bâtit une bonne partie des maisons de Clayes-sous-Bois avec ce matériau. Et comme on n'est jamais mieux servi que par soi-même, la fratrie Beltramini construit aussi sa propre maison. Mais l'attaquant est en sommeil.


 

 

De Paris à Paris

En 1974, c'est à Laval, chez les Tango et Noir, que sa carrière est relancée. Quatre buts suffiront à éveiller l'intérêt du Paris Football Club, alors en D2. Retour près des siens pour plusieurs saisons. Sous les ordres de Robert Vicot, la stabilité permet à Beltramini de s'épanouir enfin, et ses treize réalisations ouvrent la voie vers l'accession en Division 1 en mai 1978.

 

Dans l'élite, il marque quatorze buts et confirme, mais cela ne suffit pas à maintenir le club. Il s'en faut de peu pour qu'il quitte à nouveau la famille. En plein essai à Toulouse, Francis Borelli, l'homme au baise-en-ville, affrète un avion direction la Ville Rose et débarque pour empêcher la signature de Jean-François chez les Violets. Il l'emmène à Cannes pour signer un contrat au Paris-Saint-Germain de Dahleb, Baratelli, Bathenay, Pilorget, Lemoult, Fernandez, Boubacar... D'un Paris à l'autre, Beltramini ne fait donc que quelques kilomètres pour continuer à jouer au plus haut niveau.

 

Vasovic, le coach, ne le connaît pas. "Essaye-le!", lui demande Borelli, sûr de son poulain qui plante but sur but avec la réserve sous les yeux de Camille Choquier, l'adjoint. Ce dernier remplacera Vasovic, éjecté après de mauvais résultats et sous la pression de la corporation, Guy Roux en tête, qui lui réclame un diplôme. Choquier, lui, fait confiance à Beltramini et ce dernier marque treize buts en une vingtaine de matches. En 1980, c'est l'arrivée de Dominique Rocheteau, attaquant vedette des Verts de Saint-Étienne, qui va encore une fois couper son élan. Snobé par son entraîneur, il ne joue que quatre rencontres et n'inscrit aucun but.

 


Cul rouge

 

Alors, Robert Vicot se souvient de lui. Celui qui l'avait dirigé au Paris FC est à la tête des Diables Rouges du FC Rouen en Division 2. Vicot, ça fleure bon le paquet de chips de chez Coop. Mais Vicot, c'est surtout une main ferme et une mâchoire carrée, qui confie à chaque joueur un ballon d'entraînement avec son nom dessus et l'obligation de le ranger à la fin de la séance. Le Robert a beau être un gentil, il en impose et quand tu le croises dans le tunnel humide de Diochon, tu fais pas le malin.

 

Le bonhomme avait déjà à son actif deux montées en première division avec le Paris FC et le Paris Saint-Germain de Just Fontaine. Il récidive avec une joyeuse équipe sans stars mais avec deux gars qui assurent à chaque bout: Michel Bensoussan (qui deviendra plus tard champion olympique à Los Angeles en 1984) dans les buts, et Jean-François Beltramini donc, qui plantera à seize reprises. À trente-quatre ans, ce dernier s'offre une nouvelle chance de confirmer dans l'élite.
 

 


 


Lors de la saison 82/83, avec dix-neuf buts, il aura pour beaucoup contribué au maintien du FC Rouen en première division. Si Rouen est l'une des pires équipes à l'extérieur, Diochon est une citadelle imprenable depuis plus de trois ans et seul Saint-Étienne viendra mettre fin à cette série. Le club se maintient de justesse, seulement à un point devant le premier relégable, Tours.

 


Le match d’une vie

 

31 août 1983. En ce début de saison, un journaliste taquine le buteur rouennais sur son trente-cinquième été: "Il a une licence bleue, celle des vétérans." 14.330 spectateurs se faufilent et investissent les gradins bétonnés du stade Robert-Diochon pour la réception de l'AS Nancy-Lorraine. La plupart des supporters sont debout, derrière les buts ou dans la tribune Shell (qui tient son nom de la station-essence installée en dessous), la "populaire". Les autres, chanceux ou pas, s'assoient en face, sur les bancs en bois brut de la tribune présidentielle, et profitent des chants qui résonnent fort dans ce vieux stade à l'anglaise. Les deux stands de saucisses-frites fument à plein régime dans la moiteur estivale (je rigole, on est à Rouen et on se croirait en mars).

 

De mon côté, je me suis fabriqué un petit drapeau rouge et blanc avec deux bouts de tissu et un bâton en bois. Vêtu du survêtement d'entraînement du FCR, je l'agite comme un dingue même s'il paraît tout petit au stade. La déferlante des Rouge et Blanc, et surtout de Beltramini, va commencer.

 

Tlemçani, le technique international algérien, lui dépose un corner sur la tête. But.

 

Deuxième mi-temps, bis repetita. But.

 

Superbe passe en profondeur de Philippe Redon, tir instantané de Beltramini. But.

 

Coup-franc, centre tir de l'argentin Carlos Alberto, tête de Beltramini. But.

 

Centre de Tlemçani dévié par Philippe Jeannol, reprise opportuniste de Beltramini dans les six mètres. But.

 

Quintuplé. Tlemçani et Monzuck se partageront les restes. Une victoire 7-1, l'une des plus larges en première division.


 

 

Renard brun 

 

Ce soir-là, ce match-là, c'est Beltramini. C'est le premier match qui vient à l'esprit d'un supporter rouennais (et sûrement nancéien) ni trop jeune ni encore mort, à l'évocation de son nom. Sa silhouette fine surmontée d'une tignasse noire le rendait facilement reconnaissable sur le terrain où, s'il ne manquait pas de rapidité et de spontanéité, il montrait surtout un fort instinct dans le placement. Pas très grand, pas très costaud, mais toujours à l'affût. Un renard brun. "Il fallait marquer, c'était mon seul et unique objectif", se souviendra t-il bien plus tard. Un phrase en apparence simple mais à laquelle on pourrait opposer la volonté de briller, de montrer des signes ostentatoires de technicité.

 

Après cette éclatante soirée, Beltramini s'essouffle un peu (quatorze buts au final et une honorable quatorzième place pour le club) mais il a marqué les Culs Rouges. Son déclin et sa fin de carrière sonnent comme le début de la descente aux enfers de Rouen, aujourd'hui anonyme club amateur de Division d'honneur, dans un stade Robert-Diochon vide mais relifté depuis les années 2000 et un sursaut éphémère en Ligue 2.

 

En 1985, Jean-François Beltramini met un terme à sa carrière de footballeur. Il retourne construire des maisons à la maçonnerie des Clayes-sous-Bois, humble et les yeux toujours rieurs.

 

Réactions

  • José-Mickaël le 05/03/2015 à 02h18
    J'adore cet article ! Beltramini fait partie des joueurs que j'ai découverts en même temps que le foot. Je l'aimais bien, Beltramini, je ne sais plus pourquoi, peut-être pour la simple raison qu'il marquait plein de buts, donc notamment grâce à son quintuplé. Car je m'en souviens, de son quintuplé, je l'ai lu dans le journal et j'ai dû le voir à Téléfoot. Il est vrai que j'étais Meurthe-et-Mosellan. Mais fan de Nantes, hein, pas de Nancy.

  • Gouffran direct le 05/03/2015 à 03h30
    Merci pour ce super portrait, je ne m'en rappelais pas, mais j'adore ces histoires.
    Les vidéos ajoutent un cachet unique.

    On vend encore des bobs dans les boutiques des stades?

  • Sens de la dérision le 05/03/2015 à 09h38
    Pareil que les deux compères ci-dessus, j'adore cet article ! Bravo à l'auteur.

  • Tonton Danijel le 05/03/2015 à 11h27
    Magnifique, en effet!

    Et sache que si Rouen est en DH, les diables ont un fil rouge sur le forum, permettant de suivre leur reconstruction.

  • newuser le 05/03/2015 à 11h58
    Le coup du but raté pour changement de cassette c'est tellement bon que ça mérite cet article

  • beltramaxi le 05/03/2015 à 12h05
    Merci !

    Et oui Tonton, j'irai faire un tour ce fil pour débattre de la future fusion du FCR et de l'USQ.

  • Ba Zenga le 05/03/2015 à 18h15
    Bravo, merci et bienvenue!

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