Hoarau en raccourci
Après Luyindula et avant Nene, notre tournée des partants du mercato parisien passe par Guillaume Hoarau, attaquant attachant.
Guillaume Hoarau s’est engagé tout récemment pour le championnat chinois, en signant au Dalian Aerbin. Peut-être un choix financier, peut-être un choix de vie et sûrement un peu des deux. Arrivé chez les pros sur le tard, avec une éclosion tardive et néanmoins fulgurante, découvrant à Paris l’équipe de France pour finir remplaçant du remplaçant dans son club, la carrière de Hoarau n’avait de toute façon rien de classique.
Forgé en Ligue 2
Arrivé à l'âge de dix-neuf ans en métropole, en janvier 2004, depuis sa Réunion natale et à la faveur d'un partenariat entre son club l’AS Saint-Piéroise et Le Havre AC, Hoarau entamera vraiment sa carrière professionnelle lors de la saison suivante... avec seulement neuf entrées en jeu. En 2005/06, il ne quitte pas son statut de remplaçant (28 matches de L2 pour 5 titularisations). Le public ne le ménage pas, et en février 2006, il sort même sous les sifflets de Jules-Deschaseaux. Barré la saison suivante par le duo Lesage-Traoré, il est prêté à Gueugnon où, enfin dans la peau d'un titulaire, il inscrit six lors de ses neufs premiers matches. Gueugnon souhaitera prolonger le prêt, mais Jean-Marc Nobilo, le nouvel entraîneur du Havre, et ancien coach de Hoarau en équipe réserve, en décide autrement.
En Normandie, les départs de Lesage et Traoré lui ouvrent un boulevard. Il réalise notamment une impressionnante série de 16 buts en 16 matches entre la 5e et la 20e journée. Le HAC, n’ayant pas couvert ses arrières en prolongeant son contrat, se retrouve en janvier avec un meilleur buteur libre dans six mois… Contacté par Lens ou Marseille, il se met très vite d’accord avec Paris – notamment séduit par le discours de Paul Le Guen, venu lui expliquer qu’il comptait miser de plus en plus sur des jeunes joueurs. Il signe à Paris, est prêté au Havre pour six mois dans la foulée, et choisit de reverser au HAC sa prime à la signature de 500.000 euros pour le remercier "de lui avoir permis de venir en métropole et d’atteindre le niveau qui est le sien aujourd’hui". Champion de L2 et meilleur buteur avec 28 buts, il réalise le meilleur total depuis Tony Cascarino en 1996 avec l’OM.
Paris, Giuly, l'Europe
Ces statistiques impressionnantes ne lui valent cependant qu'une arrivée anonyme dans la capitale. Paris vient de vivre une saison terrible et surtout, Pauleta, le meilleur buteur de l’histoire du PSG vient de partir à la retraite. Hoarau ne craint pas de reprendre son numéro 9 et d'affronter les doutes. Il marque pour son premier match au Parc face à Bordeaux, puis donne la victoire aux siens à Caen, mais début octobre, le PSG affiche la pire attaque de L1, avec quatre buts inscrits en sept rencontres. La cible est toute trouvée: un joueur trop tendre pour la L1 et le PSG… surtout en comparaison de l’autre recrue offensive, Mateja Kezman, au pédigrée bien plus impressionnant. Paul Le Guen lui conserve sa confiance et le défend publiquement, imité par son coéquipier Mickaël Landreau – conscients de son apport dans le collectif parisien avec ses qualités de remiseur, sa très bonne technique pour un joueur de son gabarit et sa présence précieuse lors des coups de pied arrêtés… défensifs (quand il ne se mue pas en libéro lors des fins de rencontres serrées).
Le déclic intervient juste après cette période délicate: deux jolis buts de la tête face à Nancy puis Lorient, un doublé au Vélodrome. Les performances de Kezman faisant le reste, Hoarau acquiert le statut d’avant-centre numéro un et trouve en Ludovic Giuly un complément idéal en attaque: l’association caricaturale du grand remiseur et du petit vif fonctionne à merveille. Il découvre la coupe d’Europe et, malgré un faible temps de jeu dans cette compétition, parvient à inscrire trois buts décisifs. Au printemps, il est appelé dans le groupe France, même s’il ne jouera pas en match officiel cette fois-là. La saison s’achève toutefois sur deux blessures successives, mais aussi sur un bilan de 20 buts toutes compétitions confondues, dont 17 en L1.
Premières (et dernières) sélections
À l’intersaison, Antoine Kombouaré, nouvel entraîneur du PSG, souhaite associer Hoarau à Mevlüt Erding. Mais le Réunionnais entame la préparation sans être suffisamment remis et il doit patienter jusqu’à la 5e journée pour débuter une rencontre de L1, au moment même où Erding se blesse. Il n’aura pas vraiment le temps d’enchaîner: victime d’une rupture du ligament interne du genou droit lors de la 9e journée, il évite l’opération mais ne reviendra qu'en janvier. À son retour, il lui faut du temps pour se remettre dans le rythme, et si Kombouaré le fait jouer sans hésiter, il a du mal à retrouver son niveau de la saison précédente. Son entente avec Erding, avec qui il est enfin associé, ne saute par ailleurs pas aux yeux. Le numéro 9 parisien finit quand même bien l'exercice en inscrivant le but victorieux en finale de Coupe de France face à Monaco.
En raison de la suspension collective des mutins de Knysna au début de 2010/11, Hoarau est appelé en équipe de France pour disputer un match amical face à la Norvège. Sa première est plutôt encourageante, mais il n’arrivera pas à s’imposer chez les Bleus, malgré la confiance de Laurent Blanc: son match raté face au Luxembourg quelques semaines plus tard, son jeu atypique ainsi que l’impression de nonchalance causée par sa relative lenteur seront des freins pour sa carrière internationale. Il aura connu ses cinq seules sélections lors de cette saison-là.
Les blessures et les larmes
À Paris, ses performances sont de meilleure facture. Pourtant, l’échec de son association avec Erding se confirme, et il a tendance à inscrire ses buts par périodes, de façon assez irrégulière. Il a également le tort de rater quelques occasions voyantes face à Benfica en coupe d’Europe, ou en direct sur Canal+ à Montpellier. Il réalise tout de même quelques coups d’éclats, avec des buts face à Marseille ou Lille, un doublé face au FC Séville, et un triplé en coupe de France. Avec 20 buts toutes compétitions confondues, Hoarau atteint le même total que deux ans plus tôt lors d’une saison alors considérée comme réussie, augmenté de 9 passes décisives. Sa saison s'achève lors de l’avant-dernière journée, avec une expulsion face à Lille et des larmes au moment de quitter le terrain.
Ce sort contraire s'obstine en août 2011: blessé aux adducteurs en coupe d’Europe, il est ensuite opéré à l'épaule. Pour son retour à la mi-décembre, il transforme un penalty face à l’Atletic Bilbao, mais Ancelotti, qui remplace Kombouaré, estime assez vite que son attaquant n’est pas prêt pour débuter les rencontres. En février, après un but face à Montpellier, il a enfin sa chance. Le joueur réalise un joli doublé face à Lyon lors d’un excellent match de sa part, mais à partir de mars, Ancelotti adopte un schéma à trois joueurs offensifs sans pointe, et le Réunionnais n’est plus jamais titulaire.
Devant Weah
Victime d'une nouvelle blessure en fin de saison – une entorse à la cheville –, le joueur semble être réellement hors de forme lors des matches de préparation. Ancelotti le fait très peu jouer par la suite, d’autant que Hoarau ne présente pas un profil très compatible avec Zlatan Ibrahimovic. Il connaîtra toutefois une très bonne semaine début novembre: titulaire en coupe contre Marseille, il obtient un penalty, puis marque en Ligue 1 face à Saint-Étienne et à nouveau en Ligue des champions aux dépens de Zagreb. Ces buts anecdotiques en apparence lui permettent de dépasser George Weah en nombre de buts marqués pour le PSG: avec 56 unités, il devient le huitième meilleur buteur de l’histoire du club. La suspension d’Ibrahimovic lui permet même de débuter enfin en L1… mais l’expulsion de Sakho au bout de dix minutes lui sera fatale, puisqu’il devra sortir dans la foulée pour laisser sa place à un défenseur central.
Hoarau ne comptera plus qu’une poignée d’entrées en jeu jusqu’à la trêve hivernale, tout ceci menant à son départ en Chine. Même si le site officiel du PSG n’a rien trouvé de mieux que de saluer le départ de Hoarau par un best-of de ses blagues, c’est bien un joueur important de l’histoire du club parisien qui vient de partir, parfait trait d’union entre deux exceptionnels buteurs, Pauleta et Ibrahimovic.