Du monde aux Balkans
L'équipe de France a repris le collier à Sarajevo en assurant l'essentiel, c'est-à-dire en entretenant le sentiment d'une continuité avec son parcours allemand, même si tout reste à (ré-)écrire...
le 17 Août 2006
Les matches internationaux de reprise, en plein mois d'août, sont généralement de pénibles pensums qui voient s'affronter des équipes à court de condition, leur prestation étant perturbée, de surcroît, par des changements pléthoriques... Il y a toutefois des exceptions, comme le France-Côte d'Ivoire d'il y a un an, qui avait placé le retour de Zidane, Makelele et Thuram sous le signe d'une belle réussite. Mais en 2004, pour la prise de fonctions de Raymond Domenech à Rennes, la rencontre face à cette même Bosnie-Herzégovine n'avait enchanté personne et n'était restée dans l'histoire que pour des polémiques dispensables (les portables bannis pendant les massages et les protège-tibias obligatoires à l'entraînement).
En ce mois d'août 2006, on est bien loin de ces deux précédente situations, au lendemain d'une finale de Coupe du monde et dans la perspective d'une difficile phase qualificative pour l'Euro austro-suisse. Mais face à une équipe bosniaque rugueuse et déterminée, les Bleus ont justifié leur statut par une victoire à l'extérieur. Il n'en fallait pas plus.
Des coups et des chantiers
L’une des interrogations majeures, avant ce match de reprise, concernait la capacité des Bleus à capitaliser sur leurs acquis mondialistes. La reconstruction étant devenu une notion taboue, il s’agissait donc, a priori, de n'agir que par retouches pour avancer avec confiance vers l’Euro 2008. A ce titre, le match joué à Sarajevo aura confirmé un certain nombre de certitudes, tant au niveau des forces de cette équipe que des chantiers prioritaires.
Au rayon des satisfactions : une envie de bien faire et un véritable sens du collectif, comme une assurance contre les gros passages à vide. On avait vu des joueurs capables de se rendre sans cesse disponibles pendant la Coupe du monde, cette leçon semble bien retenue. On aura remarqué également que l’équipe de France reste une équipe de coups, patiente et capable sur une seule accélération, un seul mouvement, de prendre à revers son adversaire. La ressemblance frappante entre le but de Gallas et celui de Vieira contre l’Espagne est un signe...
Côté chantiers, celui des coups de pieds arrêtés défensifs commence à s’apparenter à un running gag, mais il a le mérite d’être clairement identifié. Avec ces joueurs ou avec d'autres, les bons réglages finiront bien par être trouvés dans ce domaine. Enfin, le plus gros défi de Domenech pour les années qui viennent était déjà apparu en Allemagne, et n’est toujours pas résolu: l’animation offensive. Seule faiblesse notoire des Bleus pendant le Mondial, elle n’a pas disparu comme par magie. Il reste maintenant deux ans pour trouver des solutions et des automatismes, avec l’avantage certain de connaître avec une quasi-certitude trois des quatre joueurs qui se partageront les places de titulaire en 2008...
Des Bleus d'attaque ?
Pour entamer ce nouveau cycle à la tête des Bleus, Raymond Domenech a intimé à ses cadres mondialistes de hisser les nouveaux arrivants à leur niveau de performance. La continuité est assumée dans les propos du sélectionneur et dans l’épatant esprit de compétitivité réaffirmé par les Bleus à Sarajevo. Certes, on n’est pas près de revoir Bernard Mendy dans une défense à cinq comme lors de la prise de fonction de Domenech en 2004 : les certitudes défensives post-Mondial sont tangibles dans ce secteur, malgré quelques imperfections persistantes. Mais la continuité promulguée par le sélectionneur s’est accompagnée d’un revirement sensible dans l’animation offensive, avec le retour d’un soutien aux côtés de Thierry Henry – ce qui n'avait été le cas en Allemagne que lorsque Zizou n’avait pu être aligné, face au Togo.
Pourtant, Florent Malouda semble s’être durablement accaparé le couloir gauche, et, à en juger par ses débuts réussis, Julien Faubert pourrait s’affirmer dans le couloir droit. Malgré de réels atouts sur les côtés, le désormais indispensable Franck Ribéry, pourrait donc avoir un avenir dans l’axe des Bleus, poste auquel il s’est épanoui en fin de saison dernière au sein d’un OM enfin séduisant. Si tel était le cas, l’organisation offensive des finalistes de la Coupe du monde ne se serait peut-être pas envolée en fumée avec la retraite de son n°10. Les polémiques sur l’isolement de Thierry Henry en pointe non plus. Reste à savoir jusqu’où Raymond Domenech poussera son désir de continuité…
Les observations en vrac
> La Marseillaise jouée avec moult fausses notes par la fanfare municipale, c'est pour nous faire comprendre que la Coupe du monde est vraiment terminée?
> Coup de bol : après ses félicitations au néo-retraité Konjic, Franck Ribéry n'a pas jugé nécessaire de faire un tour d'honneur.
> La vérité, Thierry : ta remise pour Gallas, c'est une énième tête ratée?
> Quand Jean-Michel Larqué a demandé à Thierry Gilardi le nom du maître de la boule lyonnaise à l'époque où Willy Sagnol faisait figure de grand espoir de la dicipline, on est passé très près d' une question SMS qui aurait valu son pesant de cacahuètes.
> On ne remerciera jamais assez Jean-Luc Delarue de programmer ses émissions pour qu’elles commencent dès la fin des matches du mercredi, maintenant ainsi la paix et l’équité dans les ménages.
La minute pathologique de Jean-Michel Larqué
41e minute. Saha échoue sur le gardien bosniaque.
"Ah que d'occasions manquées, que d'occasions manquées! Que d'occasions manquées, pour les Français. Il a le dessus, Hasagic, il est en train de prendre le dessus et ça va être très difficile. Beaucoup, beaucoup, beaucoup d'occasions pour les Français…"
Coup franc, Gallas marque.
Les gars
Avec un avant-match qui aura consisté en une interview faite de doléances reprises de volée par son sélectionneur, Coupet ne s'était pas placé dans les meilleures conditions pour retrouver une place de titulaire. Des relances peu inspirées, mais de bonnes prises de balle: il n'a eu beaucoup plus à faire.
Gallas a manqué de confirmer sa réputation de rateur de buts à trois mètres, mais la barre transversale lui a été miséricordieuse. Le reste du temps, il s'est comporté en patron de la défense. Encore hésitant, peu convaincant quant à sa complémentarité avec Gallas, auteur d'une faute (non sanctionnée) sur Misimovic en pleine surface, Boumsong risque de subir assez vite la concurrence des Mexès ou autre Squillaci. Auteur d'une glissade qui l'empêche de couper la remise sur le but de Barbarez, et parfois gêné par les crochets de Berberovic, Abidal a tout de même bien animé son côté, profitant de sa complicité naturelle avec Malouda. Sagnol a traversé le match avec sa mauvaise humeur légendaire, mais sans vraiment exploiter ses qualités offensives (préférant jouer long) ni trouver, encore, la juste distance avec Ribéry. Il concède le coup franc qui amène le but bosniaque, mais exécute parfaitement la combinaison qui précède l'égalisation.
Avec seulement quelques entraînements dans les jambes, Vieira s'est trouvé plus proche de ses performances du début de la Coupe du monde que de la fin. Son rayonnement limité a laissé trop de liberté aux Blancs dans l'entrejeu, mais un délire hallucinatoire a permis aux commentateurs de TF1 de saluer son impact physique. À ses côtés, Mavuba s'en est mieux tiré, inscrivant sa carrière internationale sur une bien meilleure trajectoire que lors de ses précédentes apparitions. Tant mieux, parce que s'il y a un joueur d'avenir – qu'on espère dans la lignée des Deschamps et Makelele –, c'est bien lui.
Une bonne frappe à la 24e minute, une autre violente mais repoussée par Hasagic on ne sait comment (29e), un coup franc lointain intéressant (34e), beaucoup d'activité sur son aile: Malouda semble mieux remis de sa Coupe du monde que lui-même semblait le penser. En revanche, son pendant côté droit a été très discret: la prestation fracassante de Ribéry au Vélodrome, le week-end dernier, masquait probablement une condition physique encore précaire.
Titularisé aux côtés d'Henry (on se serait cru revenu aux matches de préparation d'avant le Mondial), Saha s'est montré volontaire, mais maladroit ou sans réussite, à l'image de cette frappe détournée (7e), de ce duel perdu face au gardien (39e) ou de cette déviation devant le gardien qui passera près du poteau (54e). Henry a démontré son implication, comme s'il ressentait le besoin de prendre en mains une sélection dont il est désormais la seule star planétaire. Sa qualité technique et son influence positive au milieu de terrain, quand il s'y replie, laissent penser qu'il pourrait, un jour, finir sa carrière en meneur de jeu... En attendant, on retiendra sa bonne remise de la tête sur le but de Gallas.
Chez les remplaçants, Wiltord présente désormais le désavantage d'être plus lent que le joueur qu'il remplace… Tout le contraire du vif Faubert, qui ne pouvait mieux fêter sa première sélection qu'avec ce but décisif dans les arrêts de jeu. Givet a assuré les affaires courantes sans subir trop d'assauts de la part des Bosniaques.