Chronique coréenne : l'invasion de Séoul
Vol AF 264 bien arrivé. Onze heures de vol, la température au sol 24 degrés, le taux d’hygrométrie raisonnable à peine 75%. On touche enfin le but. "Welcome the world" annonce l’immense banderole déployée dans le hall de l’aéroport international d’Incheon dans la banlieue de Séoul. Le ton est donné. "Salut Séoul", répond ce supporter français, qui s’agenouille pour embrasser le sol avant de se raviser devant le courroux de sa compagne: "C’est crados ici".
Aimé, Johnny et les copines
Comme eux, ils sont une bonne centaine a avoir fait le voyage pour, via la FFF, assister au match d’ouverture vendredi. Cette fête, c’est la leur, "champion du monde oblige". On veut marquer son territoire maillot, casquette, écharpe, la panoplie est de sortie. Normal. Le dénommé Dédé sifflote pour sa part depuis son arrivée "on est les champions". Dédé est aphone. Le décalage horaire? non, Johnny beuglé une bonne partie de la nuit après quelques scotchs.
Et puis, il y a Aimé, le Saint homme, beau comme un astre dans son survêt officiel. Déjà en tenue Mémé. Il a fière allure le DTN. Une femme s’avance avec son ballon jaune à faire dédicacer. "C’est coach?", interroge-t-elle. Si on veut lui répond l’écho.
Enfin il y a les femmes des joueurs avec leurs grosses valises, venues pour dix jours supporter leurs héros de maris. Des blondes, des brunes, des stars, guettées par les photographes et télévision. Mais y’a pas Mam Micoud. C'est trop bête, elle a été retenue à Roissy. Passeport périmé. Il paraît qu’elle a fondu en larmes dit-on, une info que l’on tiendrait de mam Djorkaeff. Johan elle a raté l’avion, mais t’inquiètes, elle prend le suivant.
Elles ne sont donc plus que quatorze. Elles sont belles dans leurs survêts à elles. Jean neige relooké top tendance, petit haut et lunettes colorées. Des Anastasia en puissance mais moins vulgaires. Elles en jettent un max avant de monter dans leur bus réservé où une guide Coréenne les attend, en tenue traditionnelle. Le choc des cultures sûrement. A quand l’échange des maillots?
Veille de Coupe à Séoul
Je prends le "Car 2" avec mes nouveaux amis lorrains et leurs gros sabots. Notre guide, Gin, essuie les premiers sifflets. Classe. "C’est quand qu’on mange du chien?", lance Patrick. Quel déconneur celui-là. Gin reste stoïque et tonique. Au micro elle raconte sa ville en chiffres avant de commenter le paysage.
"Séoul est prête à accueillir le Mondial", dit-elle en préambule. Tu m’étonnes. Partout des drapeaux aux couleurs des 32 nations et des banderoles rappelant l’événement. Rien n’est trop beau pour la World Cup, mais Séoul tourne trop rond. Au bord du Han Gang, l’immense rivière qui traverse la ville, on aperçoit plusieurs centaines de figurants répétant la cérémonie d’ouverture. Dix mètres plus loin, d’autres s’entraînent aux supporters. Tout en Bleu avec des drapeaux français secoués frénétiquement. Le car exulte. "On est chez nous".
Les policiers sont partout en bleu clair, en noir, à pied, en voiture, à vélo… La ville est étrange. La densité de population est comme prévue impressionnante. Les immenses tours semblent avoir été construites sur les restes, visibles et habités, de petites maisons plus typiques. Les grues sont partout. Les stades aussi. L’olympique stadium, vestige des J0 de 88, devenu trop vétuste et inadapté au foot (avec sa piste d’athlé) d’après l’omnipotente FIFA de l’inamovible Sepp Blatter. Rien n’est trop beau pour lui, c’est connu.
Dans le bus, Gin s’est tue. Nos gars vont pas tarder à l'imiter. "Au fait, nous sommes désolés, mais vous ne pourrez pas assister à l’entraînement cet après midi", annonce le représentant du tour operator. Le choc est rude. Bien punis les gars. "Non c’est juste pour des raisons de sécurité", répond l’effronté. Ben c’est que les champions du monde pour une journée encore, on ne les dérange pas comme ça. Roger veille. Mais cela c’est un autre sujet et un autre récit. J’en ai déjà le titre chers amis des Cahiers: Tiens, voilà du boudin.