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Cantona, Kung-Fu King

1995 fut aussi marquée par un geste fou. L’agression d’un spectateur en tribune par Éric Cantona à Selhurst Park aura le don de renforcer sa légende, tandis que la Premier League renaissait. 

Auteur : Richard Coudrais le 25 Mars 2020

 

 

La carrière d'Éric Cantona fut l’une des plus atypiques de son époque. S’il est courant aujourd’hui de voir des joueurs français en Premier League, c’était encore une véritable curiosité en 1995. Non seulement les footballeurs de l’hexagone s'exportaient peu, mais le foot anglais lui-même était traditionnellement hermétique à la main-d'œuvre étrangère.

 

 


Ooh aah !

Moins par nationalisme que par suffisance, les clubs d’Angleterre ont toujours eu pour seuls "étrangers" des joueurs écossais, gallois et irlandais. Y évoluaient aussi quelques Scandinaves anglo-compatibles et des curiosités exotiques issues des pays du Commonwealth comme l’Australie, l’Afrique du Sud ou la Jamaïque.

 

Ainsi, les Argentins Osvaldo Ardiles et Ricardo Villa défrayèrent la chronique quand ils rejoignirent Tottenham Hotspur en 1978, tout comme le Français Didier Six qui passa une saison à Aston Villa. La frilosité des dirigeants alla d’autant plus en s’assouplissant qu’un bon joueur étranger coûtait moins cher qu’un joueur britannique moyen. 

 

Si Éric Cantona s’est retrouvé en Angleterre dès 1992, c’est parce qu’à vingt-six ans, sa carrière était au point mort après un ultime coup de sang à Nîmes qui s'ajoutait à de multiples coups d’éclat. Exclu pour un ballon jeté sur l’arbitre, puis suspendu, il annonça mettre fin à sa carrière.

 

Mais Michel Platini, sélectionneur de l’équipe de France, tenait à conserver son attaquant dans la perspective de l’Euro 1992. L’ancien numéro 10 activa ses réseaux pour lui trouver un club, et seule l’Angleterre était susceptible de l’accueillir à cette période de l’année.

 

Après un essai sans suite à Sheffield Wednesday, Cantona se retrouve à Leeds United, qui fait la course en tête. Le nom du premier Français champion d'Angleterre sera vite chanté dans les travées d’Elland Road, mais c’est au début de la saison suivante qu’il marque les esprits avec un triplé à Wembley lors du Charity Shield.

 


Éric the Red

Alors qu’il est devenu une pièce maîtresse de l’attaque de Leeds, on apprend en novembre qu'Éric Cantona a rejoint Manchester United. Ce qui ressemble au premier abord à un nouveau symptôme d’instabilité va s’avérer être un coup gagnant.

 

Le club d’Alex Ferguson remporte la Premier League après vingt-six ans de disette et son numéro 7 français devient le premier joueur à remporter deux titres consécutifs avec deux clubs différents. L’année suivante, United réalise le doublé et son frenchie inscrit deux buts (sur penalties) en finale de la Cup.

 

La légende est en marche. L’attaquant, replacé comme meneur de jeu par Alex Ferguson, est souvent brillant. Il réalise quelques gestes de classe et s’offre des buts somptueux. De surcroît, il n’hésite pas à aller au charbon, à donner des coups autant qu’il en reçoit.

 

Il ajoute à ces talents une attitude théâtrale (le buste haut, le col relevé, un dédain surjoué) qui plaît manifestement au public anglais. Les publicités qu’il tourne avec de grandes marques achèvent de construire le personnage.

 

Cantona reste également un international français en puissance. Il est régulièrement appelé par Gérard Houiller, rêve de Coupe du monde américaine, mais subit le cataclysme de France-Bulgarie. Mais il garde la confiance d’Aimé Jacquet, qui lui confie le brassard de capitaine.

 


Des mouettes et des sardines

Le 25 janvier 1995, la légende va prendre une dimension particulière. Expulsé d’un match de championnat contre Crystal Palace, et alors qu’il rentre aux vestiaires en longeant la ligne de touche, Cantona est invectivé par un individu qui conspue bruyamment sa nationalité et le métier de sa mère.

 

Le sang du frenchie ne fait qu’un tour: il saute par-dessus le panneau publicitaire et se jette les deux pieds en avant sur l’excité. Il rate un peu sa cible, mais termine le travail à coups de poing, sous le regard éberlué des autres spectateurs. Le soigneur qui l’accompagnait et quelques stadiers parviennent à l'extraire de la bagarre.

 

 

 

 

La photo fait la une des journaux du lendemain, y compris en France où L'Équipe dégaine en une sa spéciale, le titre en un seul mot: Indéfendable. Le joueur est d’abord sanctionné par son club, qui le suspend à titre provisoire, puis par la commission de discipline, qui lui inflige huit mois de suspension, enfin par la Justice qui le condamne à des travaux d'utilité publique.

 

La suite de l’affaire prend une tournure délirante. En conférence de presse, le Français lâche dans son anglais toujours hésitant une petite déclaration soigneusement préparée: "Si les mouettes suivent les chalutiers, c'est parce qu'elles pensent qu'on va leur donner des sardines".

 

La phrase est reprise et commentée dans tous les médias, à tel point qu’elle accédera dans les années futures au statut de citation.

 


L'homme du tournant anglais

Pendant ce temps, United, privé de sa vedette, perd à peu près tout: son titre de champion (pour Blackburn) et la FA Cup (battu en finale par Everton). Lorsque le banni revient sur les terrains en octobre, le délire reprend de plus belle.

 

L’intéressé se charge lui-même, sur penalty, de sauver Manchester de la défaite contre Liverpool (2-2). Quelques mois plus tard, United reconquiert la couronne d’Angleterre et s’adjuge même une nouvelle Cup après avoir battu Liverpool (1-0) – but de Cantona.

 

Le championnat d’Angleterre avait été affaibli par les cinq saisons de confinement consécutives au drame du Heysel. De retour dans le giron européen, le foot anglais avait pu mesurer (en dépit d’une victoire surprise de Manchester United en Coupe des Coupes) le retard qui lui restait à combler avant de retrouver le leadership européen.

 

La création de la Premier League, principalement financée par les droits de télévision, allait renforcer les clubs. La médiatisation d'Éric Cantona les a indéniablement incités à faire appel à des profils atypiques venus de l’étranger. L’arrêt Bosman est arrivé à point, et la Premier League est aujourd’hui le championnat le plus internationalisé d’Europe.

 

Après l’incident de Selhurst Park, Éric Cantona n’a plus jamais été rappelé en sélection. Aimé Jacquet a reconstruit une équipe sans lui, qui a disputé l’Euro 1996 et a été éliminée à l'issue d'une demi-finale disputée… à Old Trafford. Cantona a mis fin à sa carrière un an plus tard, à tout juste trente et un ans. Le reste n’est que cinéma.

 

 

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Réactions

  • Ba Zenga le 26/03/2020 à 11h10
    Merci Richard pour ce bel article sur ce moment légendaire, quoi qu'on en pense. Plus ça va, plus je pense que c'est un acte charnière pour MU et pour lui (Ferguson voulait être plus sévère avec lui, mais les dirigeants ont préféré la jouer plus prudente vu le contexte médiatique et le passif du supporter en question). Désolé si ça choque, mais c'est l'impression que ça me donne avec le recul.

  • Tonton Danijel le 26/03/2020 à 17h44
    C'est surtout un moment charnière pour l'équipe de France: Cantona assumait très mal son boulot de capitaine-meneur de jeu, et Jacquet a saisi l'opportunité de sa mise à l'écart pour installer le binôme Djorkaeff-Zidane, bien plus efficace. Malgré son retour fracassant lors de la saison 1995-1996, Jacquet (conseillé par Deschamps paraît-il, en tout cas Cantona a toujours conservé de la rancune envers DD à cause de cela) n'a plus jugé bon de le rappeler...

  • Balthazar le 26/03/2020 à 17h45
    Merci aussi! Adolescent, j'avais dans ma chambre un poster de Cantona grandeur nature. Oui, oui, grandeur nature. Sous le maillot de Leeds, je crois. Je devrais avoir honte, mais je m'en fous, je suis un rebelle. Je relève le col de mon... de ma... enfin je remonte mon T-shirt, quoi, et je m'en vais comme un prince.

  • Positive vibes le 27/03/2020 à 11h58
    Dire que je n’ai jamais apprécié Cantona (l’homme comme le joueur) est un euphémisme. Pour autant, je n’ai rien trouvé à redire sur son geste, tout comme le très beau high kick d’Evra, ou la mandale que Neymar avait filé à un rennais. Quand on cherche, faut pas venir pleurer quand on trouve.

    Je n’attends pas des joueurs qu’ils soient des anges et je suis prodigieusement agacé de voir que dans la société dans laquelle nous vivons, quand un provoqué réagit, on s’en prend à lui et plus rarement au provocateur.
    Il est vrai qu’il est beaucoup plus facile de s’attaquer à la conséquence qu’à la cause…

    Cantona restera surtout célèbre pour ce geste, et ce n’est finalement que justice vu que c’est ce qu’il a fait de mieux dans sa vie.

  • Jamel Attal le 27/03/2020 à 13h58
    @Positive vibes
    En même temps, il y a un principe inscrit à la fois dans le droit et dans la morale commune : répondre à la violence verbale par la violence physique est condamnable. J'avoue que ce principe me semble assez légitime, notamment parce qu'il désavoue certains penchants viriliste ("Faut pas venir pleurer") qui s'expriment (entre autres) dans les violences lien football, l'admission de ce principe se traduit dans le fait que ceux qui répondent aux provocateurs – qu'on peut vilipender à bon droit, même si je pense que le vice a sa place dans le football, sauf à considérer celui-ci comme une entreprise de morale – se font expulser sans aucune surprise ni beaucoup d'excuses.

  • Toto le Zéro le 27/03/2020 à 17h52
    Je ne sais plus dans quelle interview à propos du coup de boule de ZZ, Cantona avait clairement dit que son coup d’éclat de 1995 était bien pire car il s'en était pris non pas à un autre joueur de foot, mais à quelqu'un en dehors du jeu, du terrain.
    Qu'il se soit agit d'une petite frappe néo-nazie ne change rien. Le type avait été jusqu'à nier dans ses interview TV avoir insulté Canto et/ou sa mère.

    Sacré Canto, dont le talent faisait chanter la Marseillaise aux supporteurs Anglais...

  • gimlifilsdegloin le 28/03/2020 à 17h14
    Positive Vibes, demande donc aux supporters de Manchester United si, ce qu'ils retiennent de Cantona, c'est ce geste stupide ou sa carrière au club. Sans doute les Français ont-ils retenu ses colères plus que ses gestes de classe, mais il aura été un très bon joueur et l'âme de cette équipe de MU. J'ai eu la chance de passer à Manchester à l'époque - certes avant sa reconversion temporaire aux arts martiaux - et personne, même chez les fans de City, ne remettait en question son talent.

  • Positive vibes le 29/03/2020 à 14h47
    Question de point de vue gimlifilsdegloin. Cantona est le prototype du joueur à l’ego surdimensionné qui se croit au dessus de l’équipe. Je revois cette scène hallucinante où joueur d’Auxerre, après avoir prévenu l’arbitre de se préparer à lui mettre un rouge, il se jette avec une violence incroyable sur un joueur et sort du terrain sans attendre le carton. Un type pareil n’en a rien à faire de l’équipe, du club, des supporters ; it’s just me, myself and I.

    Il a bien marché à ManU parce qu’il avait l’équipe autour qui jouait pour lui, ces joueurs de devoir (qu’il a toujours méprisé) qui faisaient le boulot pour lui et le mettaient ds les meilleures conditions. Un cossard qui jouait en marchant, incapable de donner le coup de rein pour prendre la balle qui passe à 3m de lui ; ben oui, c’est le rôle de ces vulgaires porteurs d’eau.

    C’est vrai, il était capable de fulgurances, à l’instar des Nasri et autres Ben Arfa, mais comme eux, un gros boulet pour le reste. Heureusement qu’il n’était pas dans le groupe pour le CDM 1998, il y aurait été ce qu’Anelka (autre gros melon inadapté à un sport collectif) a été en 2010.

    Un vrai grand joueur magnifie une équipe ; Cantona était magnifié par l’équipe. Et je préfère ne pas parler de l’homme ; là je vais vraiment devenir grossier.

  • MarcoVanPasteque le 29/03/2020 à 22h34
    et donc risquer de te prendre un high kick (qui sera bien mérité si on suit le raisonnement).

  • Julow le 30/03/2020 à 10h29
    Attendez : un gus lui postillonne à la gueule, le mec fait des gestes barrière 25 ans avant tout le monde, et VOUS OSEZ LUI FAIRE LA MORALE ?

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